i le glamour est dans le pré, c’est grâce à l’animatrice de M6 Karine Le Marchand, qui défraie la chronique du salon de l’Agriculture avec le lancement ce mercredi 26 février de la gamme "l’amour est tout près" dont les produits seront vendus en direct au prix décidé par l’agriculteur en difficulté financière à des magasins de la Grande Distribution (GD) se trouvant à moins de 100 km de son exploitation, avec 2 salariés maximum et sans accord de distribution avec la GD, pour un paiement dans les 30 jours au maximum. Placée sous le patronage des réseaux d’Auchan, Casino, Carrefour, Intermarché et Système U (soit 20 000 magasins), cette initiative inédite bénéficie déjà à Catherine Héraud, la propriétaire du château Saint-Christoly (15 ha en AOC Médoc).
Figure connue de la filière pour sa participation à l’Amour est dans le pré en 2020 et reconnue pour ses déclarations courageuses en prévention des suicides, la vigneronne médocaine ne cache pas sa joie d’être « le cobaye » de cette initiative de Karine Le Marchand pour contourner les négociations nationales de la GD et créer un canal de vente directe où « l’on fixe le prix. Fixer le prix de son vin en GD, c’est le rêve ! » s’exclame Catherine Héraud. Ayant du stock à disposition (du millésime 2015 au 2022), la vigneronne vient de signer son premier contrat avec l’Intermarché de Cestas (dans la banlieue bordelaise, à 74 km de son domaine) avec une mise en rayonnage scénarisée (photos ci-dessous). En pourparlers avec d’autres enseignes girondines, la vigneronne pointe la simplicité du contrat : 2 pages à signer et un Kbis à envoyer, des conditions claires pour être payée à la livraison et dégager de la trésorerie rapidement se réjouit Catherine Héraud.


Prenant en compte la TVA et la marge du magasin, « je vends entre 9 et 10 € la bouteille. C’est le prix rêvé ! Cela va peut-être permettre de boucher mon trou de trésorerie et de payer ma salariée » relève la vigneronne. Alors que l’évolution demandée par la filière vin de la loi Egalim tarde (et que l’affaire de son voisin médocain Rémi Lacombe n’a pas débloqué les rémunérations), cette avancée soudaine « montre surtout que l’État français ne fait pas sa part. Il faut ce que soit Karine Le Marchand qui négocie pour avancer. Elle a lancé en décembre une pétition qui a réuni 130 000 signatures [NDLR intitulée "Pour que les distributeurs nous aident à sauver l'agriculture française"] et en janvier elle me contactait » pointe Catherine Héraud. Gérant la vigne, le chai et des chambres d’hôtes, la vigneronne reconnaît qu’il est compliqué de se rendre disponible, mais qu’il faut l’être pour décrocher des marchés qui sortent des volumes. Proposant toujours à la vente son vignoble, Catherine Héraud note que « comme rien ne se vend en vignes, il me faut rentrer des sous pour pas m’enfouir sous des dettes astronomiques ».
Vouloir d’achat
Après les manifestations de 2024 contre des vins à bas prix (notamment chez Lidl et Carrefour), ce changement de position de la GD se voit aussi chez Leclerc (s’engageant pour la rémunération des vignerons "+20 % au-dessus des cours" sur 5 AOP rouges avec les Grands Chais de France) et Intermarché (qui affiche sur 3 cuvées "plus de 35 % du prix de vente TTC" aux producteurs), sans oublier le label Fair For Trade garantissant un revenu supérieur aux coûts de production (obtenu par les vignobles Gabriel et le négoce Mouton Cadet). Le consommateur dira si ce changement de braquet peut prendre de l’ampleur, en passant de la défense du pouvoir d’achat par des petits prix au vouloir d’achat à un prix rémunérateur pour le producteur.
Un aperçu de la scénarisation du corner "l'amour est tout près" de l'hyper de Cestas.