nnoncé ce 20 janvier au personnel du négoce Yvon Mau sur le site de Gironde-sur-Dropt, le projet de Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE) fait l’effet d’une douche froide : 53 emplois sur 73 seraient concernés par un licenciement économique d’après la CFDT (le seul syndicat constitué au sein d’Yvon Mau). Ne communiquant pas de chiffres, et ne parlant pas de PSE comme ce projet est en discussion avec les salariés et l’administration (la DREETS notamment), la direction d’Yvon Mau évoque l’objectif d’abandonner la mise en bouteille de vins AOP Bordeaux et IGP Aude (avec la fermeture du site d’embouteillage) et de concentrer le site de Gironde-sur-Dropt dans la logistique des vins de Bordeaux (châteaux et grand crus).
« Le site est en perte de vitesse depuis plusieurs mois avec la baisse des ventes de vins tranquilles. Les adaptations mises en place pour sauvegarder l’emploi ne suffisent pas. La décision n’a pas été prise du jour au lendemain. La décision n’est pas facile à prendre, il s’agit de maintenir la pérennité du site » rapporte Frédérique Lenoir, la directrice marketing et communication de Freixenet Gratien, la filiale française du groupe allemand Henkell, qui a acquis Yvon Mau en 2018 (avec le rachat de l’espagnol Freixenet, qui possédait le négoce depuis 2001). À l’époque, Yvon Mau commercialisait la première marque de bordeaux rosé, Yvecourt, et 800 000 cols de marque Premius (en Bordeaux et crémant de Bordeaux). Des chiffres qui ne sont plus d’actualité, « ils ont fortement chuté » note Frédérique Lenoir, qui précise que les réductions de personnel ne concerneraient pas les autres activités françaises du groupe Henkell (notamment Yvon Mau Grands Crus).


Alors que d’autres PSE sont en cours dans le vignoble bordelais, comme chez Univitis, la priorité est d’apporter des solutions pour que les salariés puissent retrouver un emploi pour Corinne Lantheaume, la secrétaire générale du Syndicat Général de l'Agroalimentaire Gironde CFDT. Qui pointe que la vague de licenciements économiques n’est qu’en train de gonfler. « Ça a commencé : ça s’appelle une onde de choc, quand on rentre dans un mur avec une voiture, les dégâts arrivent au fur et à mesure » indique la déléguée syndicale, qui commence « à voir des activités partielles mises en place, des arrêts d’embauche d’intérimaires, des réorganisations d’entreprises en réduisant les investissements ou la voilure... Ce sont les signes avant-coureurs des problèmes. » Qu’il s’agisse de négociants ou de caves particulières/coopératives, avec le cas d’un PSE évité dans un domaine par le passage en dessous de la barrière des 10 licenciements : « c’est quelque chose que l’on ne pensait jamais voir » constate Corinne Lantheaume. Des conséquences logiques des plans d’arrachage en cours, alors que la production de vins chute à Bordeaux et que les commercialisations restent en retrait historique.
Cellule de reclassement pour la crise viticole
« On est au début, on serre les vis » prévient la représentante de la CFDT, qui confirme la spirale de désindustrialisation dans laquelle s’engouffre le vignoble girondin : « le pire est encore à venir ». Alors que les entreprises de la filière vin ne sont pas toutes équipées pour gérer des licenciements économiques et accompagner leurs salariés, la Commission Paritaire Régionale pour l’Emploi en agriculture (CPRE) vient de lancer ce 11 février une cellule de reclassement pour la crise viticole. « L’objectif est d’être au plus près du territoire pour accompagner et aider sur le terrain les employeurs et salariés » explique Corinne Lantheaume, la secrétaire de ce nouveau dispositif, ajoutant que « les employeurs et salariés ne sont pas du tout armés pour vivre cette crise. Les partenaires sociaux et les services de l’Etat se mobilisent pour aller vite. »