u château Malartic Lagravière à Léognan, le laboratoire Excell dresse un constat sans appel le 23 janvier dernier. « On estime qu’à partir de 70 mg/L de calcium en moyenne dans les vins, il y a un risque de précipitations calciques » indique Tommaso Nicolato, directeur technique du laboratoire Excell. « Cette année, plus de la moitié de nos échantillons dépassent ce seuil ».
Et cela ne fait qu’augmenter depuis 2019. « Nous avons analysé les dépôts des troubles reçus en bouteille depuis 2019 et calculé le pourcentage de troubles liés au tartrate de potassium par rapport à ceux liés au tartrate de calcium. Jusqu’en 2020, la répartition était plutôt équivalente entre les deux. Depuis 2021, l’écart s’est nettement creusé : la majorité des troubles est liée au tartrate de calcium » affirme Tommaso Nicolato.
« Cela est dû, d’une part à l’augmentation du phénomène, mais aussi au fait que l’on maîtrise mieux les précipitations tartriques. On reçoit donc moins d’échantillons avec des troubles liés au tartrate de potassium » précise Tommaso Nicolato.
Pour y remédier et à partir du mois de février, le laboratoire Excell proposera un test d’instabilité calcique, en plus de l’analyse de la concentration en calcium. « Nous avons acquis un Checkstab de dernière génération optimisé fin 2024 dans ce but. Il ne se base pas sur une précipitation à froid car selon nous, ce n’est pas la bonne approche. Il est basé sur le principe de Wurdig : on va sursaturer le vin en tartrate de calcium et observer s’il le solubilise » déclare le directeur technique.


Avant de réaliser le test, il faudra informer le laboratoire du choix de stabilisation qui sera effectué au chai (CMC, passage au froid, …).
Le laboratoire rendra alors son verdict parmi les quatre états suivants : instable, risque de précipitations possibles, stable à court terme (au moins un an) ou stable dans les conditions normales de stockage (pas de stress thermique chaud/froid répété ni de stockage prolongé à des températures négatives).
Plusieurs facteurs favorisent les précipitations calciques, notamment la concentration en calcium dans les baies. « Avec le réchauffement climatique, le calcium s’accumule dans la vigne car cet ion est fortement impliqué dans la gestion de l’ouverture et la fermeture des stomates. La vigne va donc mobiliser le calcium pour gérer son évapotranspiration ».
L’augmentation du TAV et du pH et la baisse de l’acide malique sont également des facteurs qui favorisent la précipitation calcique. « Contrairement au potassium, le froid a très peu d’incidence sur le calcium. Les pectines pourraient également participer à cette problématique en interagissant avec le calcium » ajoute Tommaso Nicolato.


Un phénomène d’autant plus problématique les conditions d’exportations deviennent compliquées pour certains pays. « Le Brésil rajoute par exemple des analyses supplémentaires chaque semaine. Le Japon quant à lui devient très exigeant par rapport aux éléments particulaires présents dans les bouteilles. Ils vont jusqu’à refuser des lots s’ils trouvent des micro-particules » prévient Tommaso Nicolato.