ommandité par le Congrès américain dans le cadre de l’actualisation quinquennale des recommandations alimentaires pour la population américaine, le rapport a examiné l’impact, positif, négatif ou neutre, de la consommation modérée d’alcool sur huit aspects de la santé humaine, dont la mortalité toutes causes, les maladies cardiovasculaires et certains types de cancer. Quatorze chercheurs spécialisés ont évalué l’existence d’éléments scientifiques suffisants pour mener une analyse systématique de chacun de ces aspects, avant d’y procéder, leur travail étant ensuite passé en revue par dix autres chercheurs, dont certains sont connus pour leur position anti-alcool.
Les limites de la recherche
Quantifiant la consommation modérée d’un verre (14g d'alcool) par jour pour les femmes et de deux verres (28g d'alcool) pour les hommes, les chercheurs ont mené une analyse originale d’études publiées entre 2010 et 2024. Ils ont veillé à écarter de leur analyse toute étude incluant des abstinents actuels qui ont consommé de l’alcool par le passé, pour éviter ce biais méthodologique. Ils ont également hiérarchisé leurs conclusions en niveaux de certitude : forte, modérée et faible. En revanche, ils n’ont pas analysé les effets sur la santé des différents types de boissons alcoolisées pris individuellement et ont qualifié « d’imparfait » le corpus de données permettant de tirer des conclusions sur l’alcool et la santé. L’éventualité de la sous-estimation de la consommation d’alcool et le manque d’uniformisation de termes tels que « non-buveur » et « buveur modéré » constituent, en effet, des défis pour la recherche et des pistes à explorer pour combler certaines lacunes et « renforcer l’information dont on dispose ». Cela, sachant que seuls des essais randomisés contrôlés à grande échelle, qui n’ont jamais été réalisés sur l’alcool et la santé, permettraient d’atteindre un haut niveau de certitude.
Les bénéfices cardiovasculaires de nouveau confirmés
Toujours est-il que, une fois ces écueils énoncés, cet aréopage de chercheurs a conclu « avec un niveau de certitude modéré » que « par rapport à ceux qui ne consomment jamais d’alcool, la consommation modérée d’alcool est associée à une mortalité toutes causes confondues plus faible ». L’une des explications de cet effet réside dans les bénéfices d’une consommation modérée sur les maladies cardiovasculaires, notamment le risque de mortalité cardiovasculaire pour les hommes et les femmes. Il en est de même pour l’infarctus du myocarde non fatal et l’accident vasculaire cérébral non fatal, même si le niveau de certitude de ces deux derniers est faible (par rapport à modéré pour la mortalité cardiovasculaire).
Des effets sur les cancers à nuancer
Quant au domaine complexe des cancers, les chercheurs ont établi un lien de causalité entre la consommation modérée d’alcool et un risque plus important de cancer du sein (niveau de certitude modéré), de même qu’une association entre une consommation modérée élevée et le risque de développer un cancer colorectal (niveau de certitude faible), par rapport à une consommation plus faible. En revanche, « aucune conclusion n’a pu être établi quant au risque de développer un cancer colorectal parmi les consommateurs modérés comparés aux abstinents à vie ». Il en est de même pour les cancers du pharynx, de la cavité buccale, de l’œsophage ou du larynx. Enfin, les chercheurs n’ont identifié aucune preuve d’une association entre la consommation modérée d’alcool et le risque de développer une démence, la maladie d’Alzheimer ou de subir un déclin cognitif, comparée à l’abstinence ou à la consommation occasionnelle.
Des affirmations erronées brisées
« Le rapport des NASEM… offre une approche bien documentée sur l’état actuel des connaissances scientifiques concernant les effets d’une consommation modérée d’alcool sur la santé », estime le Dr Laura Catena, qui a lancé l’été dernier un site internet dédié pour recueillir des informations scientifiquement fondées sur le lien entre la consommation modérée de vin/alcool et la santé. Médecin urgentiste, la vigneronne argentine souligne, par ailleurs, que la conclusion du rapport sur la mortalité toutes causes confondues constitue « une réfutation puissante en direction de tous ceux qui affirment qu’il n’existe « aucun niveau sûr » de consommation d’alcool ».