nnoncée lors de l’estimation partielle de novembre dernier, l’OIV (organisation internationale de la vigne et du vin) confirme l’historique baisse de production de vin en 2023, dans une proportion encore plus importante. Elle s’ établit à 237 millions hl (Mhl), soit une baisse considérable de 10% par rapport à 2022, en faisant la plus petite récolte enregistrée dans le monde depuis 1961 (214 Mhl). Entre l’Union européenne (-10%) et l’hémisphère sud (-11%), cette baisse concerne l’ensemble des régions productrices et accuse un déficit de 25 Mhl par rapport à l’année précédente. « Au regard des dynamiques de commercialisation et des besoins industriels de la production vinicole (distillation, vinaigres, boissons à base de vin…), cette baisse de production va apporter un équilibre au marché », commente le nouveau directeur général de l’OIV John Barker.
Après le maintien, « pendant 4 années consécutives, d’un niveau de production en phase avec la moyenne des 20 dernières années », situe l’OIV, cette baisse n’est pas une surprise, au regard de « gels précoces, fortes pluies, sécheresses, feux, et large spectre de développement de maladies cryptogamiques qui ont conjointement contribué à cette spectaculaire chute des volumes mondiaux en 2023 », ajoute John Barker.
Italie (-23,2%), Espagne (-20.8%), Australie (-26,2%) ou Argentine (-23%) affichent les baisses de production les plus conséquentes par rapport à 2022. C’est néanmoins la Chine qui enregistre le plus fort recul (-33%), encore plus marquée par rapport à la moyenne de production de 2018 à 2022 :-53,9%. Tout comme les Etats-Unis (+9%), la France progresse dans sa production et reprend la 1ère place mondiale (48 Mhl, +4%).
Globalement, la plupart des indicateurs stratégiques présentés par l’OIV sur l’état de la vigne et du vin dans le monde sont également en baisse en 2023. La surface du vignoble recule de 0,5% (à 7,2 millions ha), la consommation baisse de 2,6% (à 221 Mhl) et les volumes de vins exportés ont diminué de 99 Mhl. Bonne nouvelle en compensation, la valeur des exportations (36 milliards €) reste élevée, en relation avec la valeur record de 3,62€/litre atteinte par le prix moyen du vin exporté.
Au sein de ces tendances globales, quelques particularités émergent, comme illustré dans les infographies ci-dessous. L’Inde poursuit ainsi une progression remarquable parmi les pays producteurs, intégrant pour la première fois le top 10 mondial en 2023 (180 000 ha, +2,7% /2022) devançant maintenant des producteurs historiques tels que le Chili, l’Australie ou l’Afrique du Sud, et talonnant le Portugal. « Cela reste néanmoins un producteur de raisins de table, avec une faible production de vins », précise John Barker.
Côté Europe, seule l’Italie (ainsi que l’Allemagne ou la Grèce, avec des poids relatifs bien moindres) maintient une timide progression de sa surface viticole (+0,2%, 720 000ha), en hausse depuis 2016. Elle ne permet donc pas de compenser « le recul global du vignoble de l’Union européenne, -0,8% en 2023, pour aboutir à 3,3 millions ha », indique le directeur général de l’OIV. Espagne et France, les deux plus grands vignobles mondiaux, conditionnent ce recul en enregistrant des réductions respectives de 1% et 0,4% de la surface de leurs vignobles. Troisième vignoble mondial, la Chine a stoppé la croissance de ses surfaces et enregistre une lente diminution (756 000 ha en 2023, -0,3%/2022) depuis un pic à 781 000 ha en 2019.
La Chine double sa baisse de production record d’un autre recul, celui de la consommation de vins. Constante depuis 2018, cette diminution atteint là aussi un sommet, -24,7%/2022. Cinquième consommateur mondial de vins en 2018, la Chine est à présent reléguée au 9ème rang. Au sein du top 10 des pays consommateurs, seules l’Espagne et la Russie se distinguent par une consommation en hausse, respectivement +1,7% et +3%, quand la consommation mondiale « atteint son plus bas niveau depuis 1996, en raison de la pression inflationniste qui engendre des hausses de prix pour les consommateurs, dont le pouvoir d’achat a dans le même temps régressé », ajuste John Barker. 51% de la consommation mondiale se concentre dans 5 pays, alors que la seule Union européenne compte pour 48% des volumes consommés.
Enfin, les exportations ont diminué en volume (-6,3%) comme en valeur (-4,7%) en 2023. Si les volumes n’avaient pas atteint un niveau aussi bas depuis 2010, la valorisation de ces échanges à 36 milliards € est le 2ème plus fort montant après 2022. « Le prix au litre a augmenté de 29% depuis 2020 sous les effets de l’inflation », situe le directeur général de l’OIV. Les vins effervescents dominent la pyramide de valorisation en ayant progressé de 31% depuis 2020, contre 24% pour l’ensemble des vins en bouteilles. A l’exception de la Nouvelle-Zélande, du Chili et de l’Australie, tous les pays majeurs exportateurs de vins affichent une hausse du prix moyen de leurs vins exportés par rapport à 2022. La France maintient là aussi son leadership avec une valeur unitaire moyenne de 9,4€/litre. « 45% des vins sont aujourd’hui exportés, en légère baisse par rapport à 2022, mais une hausse conséquente en comparaison des 26% de 2000, cela reste un point positif malgré un environnement commercial devenu difficile avec l’inflation, la déconsommation ou les tensions géopolitiques », termine John Barker.
Au regard des premiers chiffres dont dispose l’OIV, John Barker apporte une première estimation de la récolte 2024 pour l’hémisphère sud par rapport à 2022. S’il est encore trop tôt pour avoir des chiffres pour la Nouvelle-Zélande, la récolte sud-africaine s’annonce stable (+1%). Le Chili baisserait de 10% mais l’Argentine et l’Australie progresseraient de 27% et 21%.