menu burger
Lire la vigne en epaper Magazine
Accueil / Politique / "Il n’a jamais été dit que le fonds d’urgence compenserait les pertes" du vignoble
"Il n’a jamais été dit que le fonds d’urgence compenserait les pertes" du vignoble
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin

Jérôme Despey
"Il n’a jamais été dit que le fonds d’urgence compenserait les pertes" du vignoble

Alors que la polémique et le mécontentement enflent sur les modalités d'attribution des aides départementales à la trésorerie et aux pertes de récolte, le point sur la possibilité de mobiliser une réserve nationale et sur l’objectif de cet outil avec Jérôme Despey, le président du conseil spécialisé vin de FranceAgrimer. Mise au point.
Par Alexandre Abellan Le 08 février 2024
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin
'Notre combat professionnel était d’obtenir une année blanche et des aides aux cas les plus difficiles' explique Jérôme Despey. - crédit photo : Olivier Bazalge (archive 2023)
D
e grandes incertitudes et incompréhensions enflent sur les modalités d’application et d’attribution du fonds d’urgence de 80 millions €, annoncé ce 31 janvier par le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau pour répondre aux demandes de la filière. Comment lever le flou ?

Jérôme Despey : Je comprends la détresse et je la mesure tous les jours. Il y a besoin d’explications pour éviter les contre-vérités. Tout ça prouve la difficulté agricole et le mal-être viticole. Il n’y a pas à polémiquer, la cible du fonds d’urgence ce sont les aides aux situations les plus difficiles. Notre demande depuis le départ est de répondre aux difficultés causées par les pertes de récolte liées aux aléas climatiques (mildiou et sécheresse) et par les difficultés économiques liées aux situations de marché (de surstocks et de cours non-rémunérateurs). Nous avons obtenu un déclenchement du premier outil pour 20 % de perte production en 2023 par rapport à la meilleure récolte des années 2018 à 2022, et l’année blanche s’active à partir d’une perte de 20 % de l’Excédent Brut d’Exploitation (EBE) ou de Chiffre d’Affaires (CA).

La circulaire du ministère donne aux préfets la latitude pour adapter les critères selon les spécificités de chaque département, afin de graduer les aides de 5 à 20 000 € par exploitation. Il n’a jamais été dit que le fonds d’urgence compenserait les pertes. Ce n’est pas une assurance, c’est un complément. Si le dispositif devait répondre aux pertes, il faudrait peut-être 200 à 600 millions €. Au départ, il y avait 20 millions €. Notre combat professionnel était d’obtenir une année blanche et des aides aux cas les plus difficiles. Notre demande de mesure d’année blanche bancaire permet de reporter les annuités, en les consolidant en fin de tableau avec la prise en charge des frais et intérêts pour que ça ne coûte rien. 3 500 € en moyenne par exploitation.

 

Les tensions se focalisent sur les chiffres de répartition de l’enveloppe entre départements (voir encadré)…

La clé de répartition est toujours très injuste. Quel que soit l'indicateur. Nous demandions une approche équitable. Le choix du ministère a été de prendre la meilleure référence pour tout le monde : la production commercialisée en 2018. Ce qui donne plus d’aides là où il y a plus de viticulture. Bien sûr, il y des départements qui montrent des situations plus délicates. Comme les Pyrénées-Orientales. Une réserve nationale permettra de répondre aux cas où les besoins sont supérieurs pour réaffecter cette réserve là où les difficultés sont accentuées. Cette réserve représente à peu près 10 % pour départements en fragilité.

 

Où en sont les demandes d’intégration des caves coopératives, CUMA et négoces viticoles dans ce fonds d’urgence ?

L’outil a d’abord été pensé pour aider les producteurs, qui sont en cave particulière, cave coopérative, CUMA… Je plaide pour qu’il y ait des réponses aux demandes des caves coopératives. Le ministre a annoncé que les caves coopératives seraient éligibles à la transformation des Prêts Garantis par l’État (PGE) en prêts bonifiés. Avec les caves coopératives, la filière demande aussi des aides aval (comme lors du gel 2021, demande aussi portée par le secteur des fruits et légumes) et une aide au stockage privé (qui est demandé par les metteurs en marché, comme ils l’ont exprimé lors du conseil spécialisé de ce 7 février). Nous attendons les retours de la Commission Européenne sur ces points. Elle doit aussi répondre aux demandes sur l’arrachage temporaire (avec une replantation différée de 8 ans ou un arrachage définitif). Je plaide d’ailleurs pour une aide à la restructuration des coopératives de leurs outils de production face à cette réduction du potentiel de productin. Il y a une difficulté de temporalité, les vignerons sont dans l’urgence, mais le temps communautaire n’est pas celui de l’immédiateté.

 

En termes de réactivité, le gouvernement ne s’est-il pas montré trop ambitieux en annonçant un fonds d’urgence ouvrant ce lundi 5 février (ce qui n’a pas été le cas) pour de premiers versements avant le salon de l’Agriculture (ouvrant ce samedi 24 février) ?

Les premiers versements devraient avoir lieu d’ici le Salon International de l’Agriculture (SIA). L’ouverture de la plateforme n’a pas eu lieu lundi, mais on l’attend d’ici la fin de semaine. Cet outil en ligne sera ouvert 15 jours pour de premiers versements d’ici la fin du mois sur les baisses de production. Il faudra plus temps pour l’année blanche, comme cela nécessitera des échanges avec les banques.

 

S’il y a l’urgence de court-terme, la filière présentait ce mardi 6 février son plan stratégique au ministre pour se projeter sur le moyen-terme.

On a toujours impression d’être un pompier qui se bat pour obtenir des actions du gouvernement face au conjoncturel. Il y a aussi l’obligation de mettre en place une stratégie de conquête de parts de marché avec toute la filière. Il faut des outils structurels : le plan de filière se concentre sur ces éléments.

 

Les 27 départements aidés par le fonds d’urgence

D’après la circulaire ministérielle du 5 février consultée par Vitisphere et ici représentés en infographie, les 27 départements aidés sont : Alpes de Hautes-Provence (98 000 €), Hautes-Alpes (13 000 €), Alpes-Maritimes (5 000 €), Ardèche (1,45 million €), Ariège (3 000 €), Aude (9,23 millions €), Aveyron (37 000 €), Bouches-du-Rhône (1,7 million €), Dordogne (1,41 million €), Drôme (1,83 million €), Gard (8,53 millions €), Haute-Garonne (180 000 €), Gers (5,03 millions €), Gironde (14,24 millions €), Hérault (13 millions €), Landes (340 000 €), Lot (730 000 €), Lot-et-Garonne (970 000 €), Lozère (1 000 €), Pyrénées-Atlantiques (260 000 €), Hautes-Pyrénées (30 000 €), Pyrénées-Orientales (1,91 million €), Rhône (2,42 millions €), Tarn (1,15 million €), Tarn-et-Garonne (230 000 €), Var (3,23 millions €) et Vaucluse (4,78 millions €).

Vous n'êtes pas encore abonné ?

Accédez à l’intégralité des articles Vitisphere - La Vigne et suivez les actualités réglementaires et commerciales.
Profitez dès maintenant de notre offre : le premier mois pour seulement 1 € !

Je m'abonne pour 1€
Partage Twitter facebook linkedin
Tous les commentaires (12)
Le dépôt de commentaire est réservé aux titulaires d'un compte.
Rejoignez notre communauté en créant votre compte.
Vous avez un compte ? Connectez vous
HVEminator Le 19 février 2024 à 20:54:29
Faut pas rêver une partie des aides va servir a payer les personnes qui vont instruire les dossiers .
Signaler ce contenu comme inapproprié
Vigneron Le 13 février 2024 à 16:30:10
@Albert, je suis d'accord avec vous. En même temps le syndicat n'a pas pour but d'inspirer une vision stratégique d'entreprise. Le syndicalisme défend la profession et ses adhérents qui subissent les aléas du marché capitaliste inégalitaire. La solution a l'inégalité est donc plus d'aides et de justice. Sachant que tous n'ont pas les mêmes moyens de promotion, de communication, certaines entreprises sont très dynamiques et ont beaucoup de pouvoir, l'Etat lui-même a du mal à les encadrer, voir même a leur faire payer des impots en France grace aux lois de défiscalisations. Des structures d'Etat sont quand a elles censées réfléchir aux visions stratégiques, mais elles ne proposent rien non plus. La règle est de se débrouiller dans un contexte d'incertitude, a défaut de maîtriser le marché.
Signaler ce contenu comme inapproprié
Albert Le 13 février 2024 à 07:55:29
D'accord sur le fond avec votre commentaire Vigneron (solidarité, justice) à la réserve près que la filière n'aura pas arrêté d'émarger aux dispositifs d'aides (nat et/ou UE) depuis la campagne 1977-78 .. Et est-ce pour autant que la filière aura su intelligemment capter les signaux d'alerte ? .. début des années 80, se furent les premières galères (distillation obligatoire, arrachage UE si ma mémoire est encore ok) .. ce que je veux signifier c'est que la filière se caractérise surtout par ses représentants confortablement installés dans le relais du mécontentement. J'aimerais qu'il nous soit rappelé à quel moment le syndicalisme a accepté de "mouiller" le maillot en suggérant des axes de réflexion critique, d'inflexion des facilités d'accès aux dispositifs d'aides pour que la filière soit mieux armée pour l'avenir en intégrant le principe de réalité (du marché) dans l'action. Des "aides", des "aides", voilà en tout et pour tout à quoi je résume la contribution des représentants professionnels à la réflexion. Le credo d'un représentant ça pourrait être : éviter de s'investir avec lucidité, ne pas regarder l'avenir et surtout pouvoir se targuer d'avoir obtenu satisfaction aux exigences immédiates et donc d'avoir su faire plier le Minagri.
Signaler ce contenu comme inapproprié
Vigneron Le 11 février 2024 à 17:48:31
On peut développer un fond de commerce mais on n'est pas propriétaire de ses clients. C'est un coût pour les investisseurs dont certains peuvent se passer s'ils ont l'âme d'un entrepreneur. Les agriculteurs investissent beaucoup d'argent dans leur outil de production (foncier, matériel) dans le but de nourrir les gens, pour vivre souvent avec une faible rémunération et un taux important de suicides. Aujourd'hui rares sont ceux qui accepteraient d'investir et de travailler durement pour gagner de faibles revenus et un manque de considération. Les agriculteurs créent de la valeur et payent de lourds impôts. Pourquoi ne pas avoir de solidarités entre ceux qui réussissent et ceux qui ont besoin d'aides ? N'est-ce pas le rôle de l'Etat d'aider a la solidarite et a plus de justice ?
Signaler ce contenu comme inapproprié
Albert Le 10 février 2024 à 08:52:10
Ok avec Louis Bernardin.
Signaler ce contenu comme inapproprié
Christophe Le 09 février 2024 à 16:58:23
D'ici la fin de quelle semaine ?
Signaler ce contenu comme inapproprié
VignerondeRions Le 09 février 2024 à 08:30:02
Ce gars est notre sauveur, il a foutu toute la filière dans la panade par son incompétence et/ou son aveuglement. Les fédérations locales lui ont dit il y a le feu, les indicateurs étaient tous dans le rouge plus ou moins écarlate, mais non ce n'était pas vrai. Il n'a rien voulu entendre pendant plusieurs années. Maintenant qu'il a vu la vierge (à la manif de Narbonne fin 2023) il va nous sauver. Franchement Monsieur si vous aviez un minimum de décence vous démissionneriez de tous vos mandats dans la filière vin et FNSEA. Vous êtes hors sol. vous étiez annoncé à l'AG de la FDSEA de la Gironde, je serais venu vous le dire en face mais ce fut encore un acte manqué... quand on est élu national on travaille pour l'intérêt national.
Signaler ce contenu comme inapproprié
Coco Le 08 février 2024 à 18:02:06
Monsieur Despey, vous devriez dire a vos agents administratifs (parisiens en particulier) d'accélérer la cadence pour l'i struction des dossier d'aides aux investissements. Plus de 2 mois pour verifier 1 facture (et le dossier est toujours en instruction) c'est une honte!!! Que dire des investissements des caves particulières !!! 2 ans d'instruction!!!! Et pendant ce temps les entreprises font des prets relais en attendant les subventions! VOUS ETES a l'origine de ces situations difficiles, et vous etes un agriculteur???? ???
Signaler ce contenu comme inapproprié
Louis BERNARDIN Le 08 février 2024 à 18:00:56
Euh, Monsieur Vigneron, les impôts ne sont pas destinés à revenir directement dans la poche de ceux qui les ont générés même partiellement, ce serait la négation de l'Etat. Je suis coiffeuse ou infirmière libérale, je vais demander un retour sur mes impôts pour fermer mon salon ou cabinet et financer mon départ à la retraite parce que dans mon quartier, il n'y a plus de reprise de clientèle ou de fonds de commerce mais seulement des créations !
Signaler ce contenu comme inapproprié
Benoît Ab-der-Halden Le 08 février 2024 à 14:48:25
Au lieu d'arracher 100 000 ha pour 500 millions d'euros, ne peut on pas changer le CVI avec des surfaces ras de souche ? Cela baissera mécaniquement de 10-20% les surfaces de vignes. Les 500 millions d'euros pourraient alors être affectés à la mise en pré retraite, à des aides directes aux exploitations...
Signaler ce contenu comme inapproprié
Vigneron Le 08 février 2024 à 14:20:49
Il n'y a toujours pas de plan stratégique et de vision d'avenir pour la filière vin. On parle de mesures à très court terme. Le gouvernement et les divers instances se demandent où trouver l'argent. Le cabinet Deloite a estimé à 6.4 milliards d'euros les taxes générées par la filière vin. Il suffirait d'en redistribuer un peu. Cherchez l'erreur ?
Signaler ce contenu comme inapproprié
augustin Le 08 février 2024 à 12:17:16
zoom sur le bordelais 14 millions disponibles 6 000 exploitants disons 3500 en difficulté donc ... 4 000 euros par entité ! lacan nous enseigne :" la réalité c est lorsque on se cogne " Le reste est de la littérature ...
Signaler ce contenu comme inapproprié
La lettre de la Filière
Chaque vendredi, recevez gratuitement l'essentiel de l'actualité de la planète vin.
Inscrivez-vous
Votre email professionnel est utilisé par Vitisphere et les sociétés de son groupe NGPA pour vous adresser ses newsletters et les communications de ses partenaires commerciaux. Vous pouvez vous opposer à cette communication pour nos partenaires en cliquant ici . Consultez notre politique de confidentialité pour en savoir plus sur la gestion de vos données et vos droits. Notre service client est à votre disposition par mail serviceclients@ngpa.fr.
Politique
© Vitisphere 2025 -- Tout droit réservé