ace à la déconsommation, la filière vin développe de plus en plus la désalcoolisation. Dry January ou pas. « Ça peut être opportunité de créer des produits avec moins d’alcool pour capter des parts de marché. Ça ne va pas tout résoudre, mais c’est une fenêtre de tir à appréhender » résume Éric Paul, président du comité national des vins à Indication Géographique Protégée (IGP) de l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO). Ayant dédié trois séances de son comité permanent à la désalcoolisation partielle (plus de 0,5°.alc), le viticulteur du Var note que le sujet va avancer réglementaire avec une prochain résolution de l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin (OIV), qui pourrait aboutir dans un second temps à une modification de la réglementation européenne (et en bout de course à une application dans les cahiers des charges).
Sur ce point, les membres du comité vin IGP ont fixé leurs souhaits : que l’assemblage de vins partiellement désalcoolisés soit possible avec des vins classiques afin de réduire les degrés alcooliques. Que l’ajout d’eau ou d’arômes à des vins partiellement désalcoolisés ne soit possible que pour de l’eau et des composés aromatiques provenant du produit désalcoolisé : soit une origine totalement endogène, pour ne pas dire en vase clos. « Pas d’aromatisation autre qu’avec les arômes endogènes du produit en cours de désalcoolisation » résume Éric Paul, qui rapporte deux autres lignes rouges : pas question d’ajouter du glycérol ou d’édulcorer un vin désalcoolisé avec du saccharose.
« Le grand sujet du vin désalcoolisé, ce sont les arômes » prévient Stéphane Brière, le PDG de B&S Tech qui aide au développement de boissons désalcoolisées (no et low alcohol), pour qui « le sujet est délicat. Il faut s’intéresser à la qualité globale du produit proposé aux consommateurs. Il faut trouver un bon équilibre entre le pragmatisme et le dogmatisme. Attention à ne pas interdire, sinon les produits apparaîtront sous d’autres noms » que les Indications Géographiques (IG). Notant un moment charnière avec les travaux des AOP et IGP sur la mise en application de la réglementation européenne de 2021, Stéphane Brière espère que les réflexions aboutiront à de « nouvelles opportunités pour les vignerons. Ce serait dommage de tout bloquer. Ce serait se tirer une balle dans le pied. »


L’application des méthodes de désalcoolisation partielle aux vins IGP doit désormais être étudiée ce printemps. Si « rien n’est figé », de premières orientations vont vers « l’attention à ne pas galvauder un signe de qualité et son lien au terroir » esquisse Éric Paul, qui n’imagine pas de réduction forte des degrés d’alcool sans validation par des contrôles organoleptiques avant et après la désalcoolisation. Prudents, les vins IGP souhaitent s’appuyer sur des études socio-économiques pour mieux appréhender la réalité du marché.
Lors du dernier conseil spécialisé vin de FranceAgriMer ce jeudi 11 janvier, Jérôme Despey, son président, indique s’être engagé à demander le financement en 2024 « d’une étude comportementale et économique sur les attentes des consommateurs ». Le viticulteur de l’Hérault note que « le débat n’a pas été clivant. Il faut saisir l’opportunité et répondre à de nouvelles attentes des consommateurs. Il faudra un encadrement pour garder le lien au terroir. » Un sujet travaillé par les IGP, mais aussi par les AOC, qui prennent le temps de la réflexion.
A noter que pour le label bio ne peut pas être utilisé sur les vins désalcoolisés, faute de cadre réglementaire. Appelant les opérateurs à la prudence sur leurs étiquettes, Éric Paul note aussi que la référence à une AOP ou à une IGP est interdite, conformément à la réglementation sur les IG.