Tout est prêt ; on vous attendait.» Ce 11octobre au matin, Mathieu Boudoux, gérant de MBO Vision, n’a qu’une hâte : commencer l’essai de décuvage d’une cuve de 300 hl de merlot avec l’aspirateur à vendange de Cefinox, un tout nouvel équipement testé pour la première fois cette année et qu’il distribue. Lieu de l’essai : les Vignobles Jaubert, à Ladaux, en Gironde. Déjà, l’aspirateur est suspendu au-dessus du pressoir de 80 hl, accroché à la fourche d’un chariot élévateur. Trente mètres de tuyaux le relient à la vanne du bas de la cuve de merlot qui a été écoulée hier et dans laquelle il reste encore un peu de vin.
Philippe Marcotte, salarié de MBO Vision, se tient sur la passerelle donnant accès au pressoir, prêt à allumer l’appareil de décuvage. La cuve se trouvant à l’intérieur du chai et le pressoir à l’extérieur, il communique via un talkie-walkie avec Antoine Maupommé, le maître de chai, qui s’apprête à ouvrir la vanne.
C’est parti ! Philippe Marcotte presse sur le bouton «On». La pompe à vide se met à aspirer. Le vin monte dans le tuyau puis se déverse dans le bol en plexiglas de l’aspirateur. Survient un bruit métallique : le clapet en bas du bol s’ouvre et libère le vin dans le pressoir. Et le cycle se répète. Car c’est ainsi que cet aspirateur fonctionne : par une succession de cycles d’aspiration dans un bol transparent suivis du vidage du bol par simple gravité dans le pressoir.
«L’aspirateur est relié au réseau d’air comprimé du chai. C’est lui qui fait tourner la pompe à vide. Ici, le réseau débite 300 m3/h, mais 200 m3/h suffisent», précise Mathieu Boudoux. Sur l’appareil, seulement deux variateurs : l’un pour régler la durée d’aspiration, l’autre pour la durée d’ouverture du clapet en vue de vidanger le bol. «J’ai réglé la durée d’aspiration à 2 secondes car on aspire du vin : c’est rapide», commente Philippe Marcotte.
10 heures. Le vin a fini de couler. Inutile d’éteindre l’aspirateur. «La pompe à vide peut tourner à sec, contrairement aux pompes classiques», nous fait remarquer Mathieu Boudoux.
Pendant ce temps, le maître de chai et son caviste, Marius Pacurar, débranchent le tuyau de la vanne et installent une trémie sous la porte de la cuve qu’ils raccordent au tuyau d’aspiration. Marius ouvre la porte et se met à extraire le marc à l’aide d’un croc. La trémie se remplit. Cette fois, Philippe Marcotte a fixé le temps d’aspiration à 5 secondes. Le temps de vidange reste le même : une seconde.
Xavier Jaubert, directeur des Vignobles Jaubert, nous rejoint, curieux de voir le déroulement de l’opération. «Normalement, on utilise une pompe à marc pour décuver, mais quand on a entendu parler de cet outil, on a demandé à l’essayer, surtout pour des questions de pénibilité et de sécurité», précise-t-il.
Reste que la cuve est grande. Très vite, Marius n’arrive plus à atteindre le restant de marc. Il n’y échappe pas : il doit entrer dans la cuve pour finir de la vider. Comme il ne ménage pas sa peine, la trémie se remplit plus vite qu’elle ne se vide. «Le débit est trop lent», nous confie-t-il. Xavier Jaubert tempère : «Il faudrait une trémie plus grande. Mais c’est bien plus sûr qu’une pompe à marc.»
Un autre vigneron nous rejoint, Julien Luro, installé à Targon : « Cette année, on a décuvé toutes nos cuves à deux, il me manquait un salarié. J’ai fini avec un gros mal de dos. Ce matériel m’intéresse : il est plus sûr qu’une pompe à marc et rend le décuvage moins pénible. Alors je suis venu le voir.»
Soudain, les choses se grippent. L’aspiration ne fonctionne plus. Le verdict tombe : «Il y a un bouchon dans les tuyaux», rapporte Mathieu Boudoux, en nous assurant qu’il rencontre cette difficulté pour la première fois après plusieurs essais sans accroc. Seule solution pour l’évacuer : pousser à l’eau avec un furet.
11 heures. Le tuyau est débouché. Le décuvage reprend mais, cette fois, Xavier Jaubert veut tester la canne d’aspiration. Il débranche la trémie et raccorde la canne au tuyau pour aller aspirer le marc comme on aspirerait la poussière sur un parquet. «La canne est en aluminium, elle est légère», garantit Mathieu Boudoux. «C’est très facile d’utilisation et maniable, apprécie Xavier Jaubert. En revanche, on perd un peu de temps avec cette aspiration cyclique. Le débit de chantier est insuffisant pour la taille de notre structure.»
Un nouveau bouchon viendra clôturer cette journée de test. Le soir même, Mathieu Boudoux trouvera l’origine de la panne : un défaut d’étanchéité provoqué par une soudure défaillante au niveau de l’aspirateur. «C’est réglé, nous avons ressoudé la plaque en question. C’est aussi à cela que servent les tests», conclut-il.
Malgré ces fausses notes, Xavier Jaubert reste enthousiaste : «Le système me plaît beaucoup pour des questions de sécurité et de pénibilité : on ne travaille plus avec une pompe à marc et on peut évacuer le marc sans pelleter. Je réfléchis à m’en servir également pour encuver. Reste à améliorer le débit de chantier.»
Pour cet outil, il faudra compter environ 25 000 € HT. Son lancement officiel est prévu fin novembre au Sitevi et, d’ici là, Mathieu Boudoux promet des améliorations à découvrir sur le salon.
Le lendemain de notre visite, Rémi Lamerat, du domaine Grand Jour, à Yvrac, a testé l’aspirateur à vendange de Cefinox. Au menu : décuvage d’une cuve de 70 hl et d’un garde-vin de 30 hl. Et pour cet ancien rugbyman du XV de France, l’essai est transformé ! « Nous avons mis 45 min pour la première cuve et 30 pour le garde-vin, indique le vigneron. L’aspiration a très bien fonctionné. » Et après la dégustation, le verdict est sans appel. « Les presses sont bien plus qualitatives qu’avec une pompe à marc. Le raisin est moins trituré et on a moins de tanins agressifs. Certes, le débit de chantier est moindre qu’avec une pompe à marc, mais on gagne du temps au nettoyage : il suffit de rincer la ligne à l’eau. Sans compter que l’on utilise moins d’eau. »