utre leur utilité directe pour enrayer la propagation du phytoplasme de la flavescence dorée, les dizaines de milliers d’observations de terrain regroupées dans les bases de données des GDON et des FDON lors de leurs prospections annuelles constituent des sources d’informations précieuses pour mieux comprendre l’épidémiologie de cette maladie et améliorer sa gestion.
Dans le cadre des projets RISCA et CO-ACT2 financés par le plan national contre le dépérissement du vignoble (PNDV), des chercheurs de l’Inrae de Bordeaux sont parvenus à « faire parler ces observations » grâce à des outils de modélisation statistique.
Ils ont compilé les données récupérées entre 2012 et 2016 par le GDON des Bordeaux, en charge de la gestion de la flavescence sur les deux tiers du vignoble Bordelais, soit 75 000 hectares, le cadastre viticole informatisé avec les informations sur les cépages, les années et les densités de plantation des parcelles cadastrales cultivées en vigne jusqu’en 2016, et les données d’occupation du sol de l’IGN et du CESBIO (forêt, zone urbaine ou autre) avec une résolution de 10 mètres par 10.
« Une fois ce SIG constitué et consolidé, nous avons mis œuvre une démarche de modélisation statistique visant à identifier des facteurs reliés au risque de détection et d’infection d’une parcelle par la flavescence lors de la première année de prospection par le GDON, c’est-à-dire avant la mise en place des mesures d’arrachage des ceps infectées » expliquent les chercheurs.
La flavescence dorée a été détectée dans 7.5% des 34 581 parcelles retenues dans leur étude. « Pour chaque parcelle, nous avons renseigné neuf variables explicatives caractérisant la parcelle (surface, année et saison de première prospection, pratique culturale, AOC, âge, cépage, densité de plantation et altitude) et six variables représentatives de son environnement paysager (pourcentage de vigne, pourcentage de merlot au sein de la vigne, pourcentage de parcelles en AB, pourcentage de zone urbanisée, de forêt, et complexité du paysage). Nous avons ensuite analysé l’effet de ces variables sur la probabilité qu’une parcelle soit infectée par la flavescence dorée à l’aide d’un modèle de régression logistique spatiale. Dans ces analyses nous avons considéré 16 rayons possibles d’effet des variables paysagères, de 50 à 6000 mètres autour des parcelles ».
Ils ont remarqué que l'altitude, l’âge de la parcelle et son cépage sont les principaux facteurs affectant l'infection par la flavescence dorée. Par exemple, le risque d’infection de l'infection est deux fois plus élevé dans les parcelles cultivées avec du cabernet sauvignon, du cabernet franc ou de la muscadelle que dans celles plantées de merlot.
Par ailleurs, les chercheurs se sont aperçus que la probabilité d’infection diminue significativement tous les 20 mètres d’altitude. La saison de prospection a en outre un fort effet sur la probabilité de détecter la maladie. Cette probabilité est quatre fois plus faible en été qu’en automne.
Dans un rayon de 150 à 200 mètres, ce travail a montré que l'infection des parcelles est également affectée par leur environnement proche. « La probabilité d'infection augmente avec les proportions de forêts et de zones urbaines » assurent les chercheurs, expliquant ce résultat pas la présence de vignes ensauvagées en lisières de forêt, ou dans friches péri-urbaines, ou de vignes cultivées dans des jardins.
Plus surprenant, ils ont remarqué que la probabilité d'infection par la FD diminue avec la proportion de vigne dans le paysage. « Cette corrélation s’explique par des effets directs (protection insecticide plus homogène, dilution de l’inoculum) ou indirects via, par exemple, la valeur économique des vignobles ».
Ce modèle pourrait aider les experts du GDON des Bordeaux à cibler les zones à prospecter en priorité. « Sa précision moyenne, c’est-à-dire la probabilité qu'une commune ait réellement plus de 10% de parcelles infectées lorsqu'elle a été classée comme telle par le modèle, est de 50%. »
Le travail se poursuit désormais avec des données de prospection réalisées en Bourgogne et en Savoie.