vec 248 voix pour et 92 contre, l’article 8 de la proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France a été adopté ce mardi 16 mai au Sénat, autorisant « une expérimentation de l’utilisation des aéronefs télépilotés ou contrôlés par intelligence artificielle pour la pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques est menée » pendant 5 ans au maximum « sur des surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 % ou dans le cadre d’une agriculture de précision sur des surfaces restreintes ». Au terme de cette période d’essais, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) devra « déterminer les bénéfices liés à l’utilisation de drones pour l’application de produits phytopharmaceutiques en matière de réduction des risques pour la santé et l’environnement » ajoute l’article. Ce qui revient à remettre les compteurs à zéro après le rapport mitigé rendu fin 2022 par l’Anses sur les essais viticoles de traitements par drone.
Ce 16 mai en séance, le sujet aura divisé les sénateurs. Rapporteur du projet de loi, la sénatrice Sophie Primas (Yvelines, Les Républicains) a pourtant tenté de désamorcer le sujet : « les drones pourront être utilisés pour des pulvérisations de précision de produits phytosanitaires : il ne s'agit pas d'autoriser les pulvérisations tous azimuts, mais d'accompagner l'innovation pour diminuer les quantités de pesticides et protéger les agriculteurs. Nous sommes loin de la caricature. »


« L'Anses pointe une dérive aérienne 4 à 10 fois supérieure pour les vignes et bananeraies. Les drones entraînent un courant descendant, en raison de leurs rotors, ce qui présente un nouveau risque pour les travailleurs. Comment, dans ces conditions, les ouvrir à des usages plus larges ? » attaque le sénateur Joël Labbé (Morbihan, Groupe Écologiste), demandant la suppression de l’article, en soulignant que « la dérogation prévue va à rebours de la sortie des pesticides que nous appelons de nos voeux. Nous ne pouvons pas accepter d'entendre qu'il n'y aurait pas d'autres solutions. Les pesticides, il faudra bien en sortir ! Nous attendons beaucoup du Gouvernement à ce sujet. »
« Monsieur Labbé, ne caricaturons pas la question des drones. Les auteurs de la proposition de loi ne veulent pas épandre davantage : c'est tout l'inverse ! » réagit le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, assurant que « nous voulons, nous aussi, réduire l'utilisation des produits phytosanitaires. De plus, le drone peut être utile pour sécuriser le travail des agriculteurs, par exemple sur des terrains escarpés. » Sur « les vignobles caractérisés par de fortes pentes, comme ceux de mon département, sont particulièrement concernés. Le traitement terrestre y est dangereux et expose les exploitants à un fort risque d'accident, les chenillards se renversant fréquemment » complète la sénatrice Patricia Schillinger (Haut-Rhin, Renaissance), ajoutant que « la précision des drones permet des opérations ciblées dans le respect de l'environnement, comme l'a montré l'expérimentation menée à Guebwiller. »
Comme le résume Sophie Primas, « l'usage des drones en agriculture ne fait pas consensus. Tenons-nous en donc aux faits. La rédaction initiale envisageait la généralisation de l'usage des drones. La commission a fait évoluer le dispositif, en prévoyant une expérimentation sur les terrains en pente et pour l'agriculture de précision. Pour disposer de données, il faut expérimenter. » Une approche se voulant consensuelle et prudent. Comme l’explique Marc Fesneau : « je ne dis pas que la technologie est toujours un progrès, mais essayons ».
À noter qu’un amendement limitant l’expérimentation aux produits autorisés en viticulture biologique a été rejeté.