oiles dehors contre le gel ! Entre les fumées de bottes de paille et bruits de rotor des éoliennes à Pessac-Léognan cette nuit gélive du mercredi 5 avril, le château de Cruzeau (AOC Pessac-Léognan, groupe André Lurton) essaie des voiles d’hivernage sur 40 ares d’une parcelle de sauvignon blanc plantée en 2008 à 1,3 mètre de large (à Saint-Médard d’Eyrans, Gironde). Pour mettre en place les bâches de jute, Mickaël Besse, chef d’équipe du domaine a conçu un porte-outils dédié (photos ci-dessous). Réalisé sur plan cette fin mars avec l'appui de Stéphane Seuve, chef d’atelier du château Bonnet (vignobles André Lurton), le prototype de Mickaël Bess peut se monter à l’arrière du tracteur enjambeur pour dérouler sur 4 rangs le voile de 6 mètres sur 100 m, et il peut se monter devant pour réenrouler la bâche après la période de gel.
L’enroulage/déroulage se fait grâce à un moteur hydraulique. Un verrin est monté sur le porte-outils pour tamponner le poids de la bâche et faciliter son déroulement en la guidant. Soulignant que l’outil demande encore des améliorations (avec un moteur plus puissant, une adaptation des piquets pour éviter que le poids de la bâche ne torde leurs extrémités…), son concepteur Mickaël Besse note que sa mise en place ce mardi 4 avril a nécessité 7 personnes : un chauffeur et trois personnes de chaque côté du tracteur pour dérouler et attacher la bâche. Le tout pendant 5 heures pour 5 bâches. Soit une heure par bâche de 100 mètres avec 15 minutes pour enrouler le voile sur le support, 30 minutes pour le dérouler le voile et 15 minutes de manutention entre les différentes opérations détaille Émilie Roullé, la directrice technique du château de Cruzeau. En parallèle, deux bâches ont été posées manuellement, avec 9 personnes pour 3 heures nécessaires au déroulement d’une seule bâche. Permettant de gagner en réactivité, l’adaptation maligne du porte-outils accélère le débit de chantier.


Autorisé à titre dérogatoire en AOC, l’usage de ce voile donne de premiers résultats visibles au lever du soleil ce 5 avril : « on a les herbes blanches, gelées, jusqu’au niveau du voile. Dessous rien n’a gelé » rapporte Émilie Roullé, qui note que ce prototype permet de « couvrir une surface importante et rapidement. Ce ne sont pas des bâches sur un seul rang comme on peut en trouver sur vigne. Ce n’est pas non plus une serre : le voile est ouvert et laisse passer l’air, ça créée un écran et il peut faire plus froid sous la bâche. »
Si elle s’avère concluante, cette expérimentation permettrait de protéger les vignes du gel sans créer de nuisances auprès du voisinage. « On ne peut plus se permettre de mettre en place des outils de protection qui génèrent des fumées et du bruit pour les riverains. Et qui pèsent sur notre bilan carbone en quelques jours » pointe Jacques Lurton, le PDG des vignobles André Lurton, également président de l’appellation on ne peut plus périurbaine Pessac-Léognan.
Le porte-outils conçu et monté dans les ateliers des vignobles André Lurton. Photo : Vignobles André Lurton.
Livré plié, le voile doit être déroulée (ci-dessus) avant d'être enroulée (ci-dessous). Photos : Vignobles André Lurton.
Opération de déroulement depuis la cabine, ci-dessus et ci-dessous. Photos : Vignobles André Lurton.
Le résultat sous le voile. Photo : Alexandre Abellan.