ous les viticulteurs de l’Hérault n’étaient pas sur Millésime Bio ce 1er février. Quelques-uns se sont rendus à la marie de Roquessels, près de Faugères (34), pour y rencontrer les apiculteurs bio qui partagent leur territoire.
Si le législateur n’a pas placé la vigne sur la liste des plantes attractives pour les abeilles, beaucoup d’apiculteurs cherchent à y faire butiner leurs protégées entre les vendanges et la reprise des traitements phytosanitaires au printemps. « En ce moment mes abeilles sont sur la fausse roquette présente dans les inter-rangs » illustre Paul Gazin, apiculteur bio près de Béziers ayant déplacé des ruches au domaine de Monthélys, à Laurens.
« Elles ne feront pas de miel avec la fausse roquette mais cela les aidera à redémarrer leurs activités de ponte et d’élevage des larves » précise Anne-Charlotte Metz, chargée de mission à l’Association pour le développement de l’apiculture (ADA) en Occitanie, à l’origine de cette réunion.
Avec ses confrères, Paul Galzin invite les viticulteurs présents autour de la table à diversifier leurs couverts pour enrichir le bol alimentaire de leurs colonies. « Moutarde, radis, vesce, féverole, pois… » les incite-t-il à semer.
« Et dans la flore spontanée, y a-t-il des choses qui vous intéressent ? Je préfère laisser pousser ce qui doit pousser » demande Nathalie Caumette, présidente du syndicat des vins de Faugères et vigneronne en bio au domaine de l’ancienne mercerie. « Bien sûr, l’inule visqueuse ou la mauve par exemple » répond Paul Galzin.
« La mauve fait de trop grosses racines » estime un autre vigneron. « Elle décompacte le sol, c’est bien » pense au contraire Nathalie Caumette.
Les apiculteurs ont aussi remarqué une baisse du poids de leurs ruches quand les viticulteurs détruisent leurs couverts végétaux en février. « Il vaut mieux attendre le mois de mars, quand les insectes peuvent trouver du pollen dans les arbres fruitiers » détaille la chargée de mission.
« Février est stratégique pour le développement des ruches car il correspond au renouvellement des générations. Si les abeilles sont carencées en pollen elles mettent des mois à s’en relever » insiste Paul Galzin.
« Ce n’est pas possible dans toutes les exploitations. Quelqu’un qui a 40 hectares et un seul chauffeur ne peut pas se permettre d’attendre pour détruire l’herbe » répond Jérôme Salles, vigneron coopérateur en bio à Faugères.
« Nous sommes également très dépendants des conditions météo et de l’accessibilité des parcelles » poursuit Nathalie Caumette, se rappelant qu’en 2022 la vigne a débourré au 15 mars et qu’il est ensuite tombé près de 400 mm pendant un mois. « J’entends ce que vous dites mais si j’ai une fenêtre de travail du sol au 15 février, je dois y aller » appuie Jérôme Salles.
Cherchant un autre moyen de remporter l’adhésion des viticulteurs, un autre apiculteur rappelle qu’une étude réalisée à Sauternes, dans le bordelais, a montré que 93% du pollen que les abeilles rapportent à la colonie peuvent venir de la vigne. « Cela n’a pas vraiment d’intérêt pour la vigne qui est auto fertile et chez qui la pollinisation se fait souvent avant la chute du capuchon » lui répond-on.
Pour Nathalie Caumette, la présence d’abeilles dans son vignoble représente en revanche un bon indicateur de biodiversité. D’autres voient dans l’accueil d’apiculteurs un moyen de se diversifier commercialement. D’une façon ou d’une autre, des partenariats sont donc possibles entre les deux professions.