vec le marbre du splendide opéra de Dijon pour écrin, l’événement en impose. La dégustation annuelle des Eminents et Grands Eminents a réuni, samedi 19 mars, près de 200 dégustateurs [voir encadré] autour de crémants de Bourgogne parmi les plus qualitatifs du marché. Les deux marques, créées en 2016 par l'Union des producteurs élaborateurs de crémants de Bourgogne (Upecb), durcissent le cahier des charges des producteurs, et en particulier le temps d’élevage sur lattes, fixé à 24 mois pour Eminent et à 36 mois pour les Grand Eminent. Objectif : obtenir la reconnaissance des consommateurs, et un potentiel de valorisation pour les opérateurs.
Qu’en est-il, six ans après ? Globalement, ces marques « ont aidé les producteurs à se décomplexer », estime Édouard Cassanet, président de l’Upecb, qui note un autre point positif : la reconnaissance à l’export. «On voit qu’il y a un intérêt des prescripteurs étrangers.» Paradoxalement, la réaction est inverse en France, en particulier sur le circuit traditionnel. « La culture du Champagne reste très fortement ancrée, et il est très difficile de dépasser cette barrière du nom », déplore Pierre du Couëdic, directeur de l’UPECB. qui fait de ce circuit un objectif prioritaire pour les années à venir.
Côté prix, « la marque Eminent n’a pas pour l’instant pas entraîné une valorisation révolutionnaire, on tourne autour de 12-15 € la bouteille, quand la moyenne d’un crémant au domaine s’approche des 11 €. L’effet Grand Eminent est bien plus visible. On atteint une moyenne de 18-20 € la bouteille», détaille Pierre du Couedic.
À ce jour, une trentaine de producteurs ont recours à ces marques. En 2019, ils étaient 18 seulement. « Ces opérateurs sont autant des petits domaines que de grandes maison », précise Pierre du Couëdic. Quant aux volumes, 7 % de la production de crémants de Bourgogne serait labellisée Eminent, contre 0,4 % en Grand Eminent. Objectif : « passer respectivement à 10-15 % et 2-4 % des volumes ».
Pour cerner les exigences des consommateurs et des prescripteurs, et en faire profiter ses marques, l’UPECB a choisi l’innovation. Chaque année depuis 2016, l’ODG invite des centaines de pros et amateurs autour d’une grande dégustation à Dijon. Ces participants notent les vins sur de nombreux critères, du packaging au prix en passant par l’aromatique et la qualité de la bulle. Saisis sur smartphone, ces résultats sont ensuite traités par les étudiants de l’école d’ingénieurs Agrosup de Dijon. À la clef, « 18 à 20 000 données à exploiter chaque année », dévoile Pierre du Couëdic. Une démarche « probablement unique dans le monde viticole », et qui permet aux producteurs d’éminents et de grands éminents de positionner leur produit sur le marché. Quelques enseignements reviennent d’une année à l’autre. « On voit que les consommateurs privilégient les couleurs rouge et or sur les étiquettes. Et que la bulle n’est pas un critère pour eux. Avant, tout le monde en était persuadé ! »