Dernière demande en date : une initiative parlementaire déposée à la mi-juin par le conseiller national Benjamin Roduit. « Le secteur vitivinicole est en crise: d’une part, la consommation indigène est en baisse constante; d’autre part, les importations de vin se font à des prix toujours plus bas. Les vins suisses peinent à s’écouler, et les caves ne désemplissent pas. La fermeture des restaurants due au Covid a été la goutte de trop », déplore le parlementaire, qui demande une adaptation des contingents tarifaires pour donner la priorité aux importateurs qui commercialisent aussi des vins suisses.
C’est la deuxième fois en trois mois qu’une telle demande est formulée : début mars, les sénateurs ont rejeté une motion similaire de la conseillère Marianne Maret. Ces différentes initiatives ont peu de chances d’aboutir. « La question de la renégociation du contingent d’importation des vins en Suisse s’est invariablement heurté à l’opposition du Conseil fédéral, confirmé par les Chambres, ces vingt dernières années », note le journaliste suisse Pierre Thomas. Selon les autorités suisses, une telle mesure obligerait à renégocier les accords auprès de l’OMC et serait considéré comme une entrave à la liberté du commerce. Cela, sachant que le contingent actuel de 170 millions de litres n’a jamais été entièrement utilisé.
Les différentes instances étatiques et professionnelles privilégient d’autres manières d’aider le secteur vitivinicole. L’an dernier, le Conseil fédéral a autorisé le déclassement de 7,1 millions de litres de vins AOC en vins de table, une mesure qui semble avoir donné un coup de fouet à la commercialisation des vins suisses. En effet, d’après un rapport de l’Observatoire suisse du marché des vins, les ventes de vins suisses en grande distribution ont progressé de 13,6 % en 2020 pour atteindre 290 730 hectolitres, contre une augmentation de 11,2 % pour les vins étrangers, qui atteignent 745 560 hl. Le volume total importé sous contingent tarifaire en 2020 s’est élevé à 1,54 Mhl, en hausse de 2,9 % par rapport à 2019.
Indéniablement, il y a un écart de prix entre les vins importés – dont le prix moyen au litre s’établit en grande surface à 9,39 CHF en 2020 (+1,9%/8,66 €) – et les vins suisses, à 12,30 CHF (-0,3%/11,30 €). La forte concentration des importations parmi un petit nombre d’opérateurs – quatre entreprises (Coop, Denner, Aldi et Bataillard) s’accaparent plus de la moitié des volumes – n’est sans doute pas propice à une hausse des prix, surtout qu’Aldi a pris la troisième place à Bataillard. Mais une amélioration de la situation commence à se profiler pour les producteurs suisses. « En 2021, la situation des vins valaisans sur les marchés se détend un peu », note l’Interprofession de la Vigne et du Vin, qui ne baisse pas la garde pour autant. « Le problème des stocks n’est cependant pas résolu et les deux familles de l’interprofession… se sont mises d’accord pour accompagner la reprise de marché sans courir le risque de le déséquilibrer ». Pour la troisième année consécutive, il a donc été décidé d’abaisser les rendements dans le Valais lors des vendanges 2021.