a Bourgogne doit-elle changer de cépages pour survivre au changement climatique ? Une question difficile à laquelle Jean-Michel Boursiquot, professeur émérite en ampélographie à l’Institut Agro de Montpellier et Laurent Audeguin, responsable matériel végétal à l’IFV, ont tenté de répondre lors de l’évènement Vinosphere hébergé virtuellement par le BIVB ce 25 février.


« On peut d’abord se demander comment faire pour conserver le chardonnay et le pinot noir le plus longtemps possible » a commencé Laurent Audeguin. Les vignerons peuvent essayer de tirer partie de leur diversité naturelle par sélection clonale. « Il y a 47 clones de pinot noir et 40 de chardonnay. Dans les vieilles parcelles arrachées, certains individus peuvent aussi offrir des maturités plus tardives, accumuler moins de sucre et conserver plus d’acidité ».
Les vignerons peuvent aussi planter d’autres porte-greffes. « Le catalogue en compte 31 » poursuit Laurent Audeguin. Longtemps délaissé, le Rupestris du Lot est par exemple intéressant là où le calcaire n’est pas limitant. « Le 420A qui connaît un regain d’intérêt à Bordeaux peut ici aussi faire un bon candidat, de même que des porte-greffes tardifs et tolérants aux fortes températures et au stress hydrique venus d’Espagne, d’Italie ou de Hongrie ».
Jean-Michel Boursiquot les invite en plus à se saisir de l’opportunité récemment offerte par l’INAO de planter des variétés d’intérêt à fin d’adaptation. « C’est l’occasion de redécouvrir des cépages originaires de la région mais oubliés comme le roublot, qui descend du pinot, ou le tressot. Je pense également à l’enfariné noir, qui vient d’être inscrit, ou au gascon, qui contrairement à ce que son nom indique vient de l’Yonne ». Toutes ces variétés accumulent peu de sucres et gardent une bonne acidité.
L’ampélographe pense en outre que le savagnin aurait toute sa place en Bourgogne, de même que la syrah. A ceux qui souhaitent tester des cépages étrangers, il conseille l’assyrtiko, « au profil comparable au chardonnay avec un meilleur maintien de l’acidité », et le xinomavro, également grec. « Le nebbiolo italien pourrait aussi faire un bon complément au pinot » affirme Jean-Michel Boursiquot.


L’IFV, l’Inrae, le BIVB, le CIVC travaillent aussi sur la création variétale. « Nous avons croisé du pinot et du chardonnay avec des géniteurs porteurs de facteurs de résistance au mildiou et à l’oïdium » détaille Laurent Audeguin. Les raisins de deux parcelles plantées en 2017 ont été micro-vinifiées il y a quelques mois.
La Bourgogne n’est donc pas sans solutions face au réchauffement climatique. Et 81% des viticulteurs ayant assisté au webinaire se sont dit prêts à innover.