Qu’est-ce que l’on pinaille pour quelques grammes de glyphosate qui ne changeront pas la face du monde sur les deux années à venir ? » lance Frédéric Rouanet, le président du Syndicat des Vignerons de l'Aude, ce 8 décembre au lancement d’une manifestation matinale à la gare routière de Narbonne pour refuser en bloc la réduction de 80 % des doses de l’herbicide en 2021 (soit 450 g/l). Mobilisant 200 à 300 manifestants selon un communiqué, le rassemblement a bloqué de 9 à 16 heures le trafic ferroviaire de la gare de Narbonne (point de passage entre Barcelone, Marseille, Toulouse et Lyon).
A l’issue de cette mobilisation, Frédéric Rouanet note « quelques avancées, on ne peut pas encore applaudir. Une réunion est à venir ce jeudi avec le directeur national de l’INRAE (Institut National de la Recherche pour l’Agriculture et l’Environnement, dont l’antenne de Puech Rouge a été visité par des manifestants en parallèle) et le député de Narbonne, Alain Perea, va prendre le relai avec le ministère agriculture (nous avons eu une réunion hier avec une personne du ministère, cela n'a pas été convaincant) ». Pour le vigneron, la lutte doit continuer tant que la dose de 1 080 g/ha n’est pas acquise pour le vignoble en 2021 et 2022, d’autant plus qu’il entend dans les dernières déclarations du président de la République, Emmanuel Macron, une ouverture pour baisser dans un premier temps de 50 % son utilisation jusqu’en 2022.


Ne défendant pas le glyphosate, mais la nécessité d’un herbicide efficace et peu coûteux pour maintenir la viticulture languedocienne, Frédéric Rouanet lance aux manifestants que le glyphosate « est peut-être dangereux, peut-être pas. Qu’on l’enlève et qu’on le remplace », estimant que « pour sortir [du glyphosate], il faut trouver un produit de substitution [avec le] même coût et la même efficacité ». Le vigneron en appelle au financement massif de la recherche, estimant que le crédit d’impôt de 2 500 € pour en finir avec l’herbicide de Monsanto est insuffisant à l’échelle d’une exploitation, mais que l’enveloppe globale de 135 millions € permettrait d’aider la recherche.
Frédéric Rouanet reproche cependant aux chercheurs des approches trop théoriques du désherbage en viticulture, notamment le rapport de juillet 2019 de l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA, devenu INRAE) ayant alimenté la réduction des doses annoncée récemment par l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire (ANSES). Si une baisse de 50 % à 1 080 g/ha est acceptable pour les manifestants, « plus ça ne peut pas marcher, on ne sait pas faire » avec les cours actuels prévient Frédéric Rouanet, qui conclut que « c’est trop compliqué, c’est un autre métier ».
Déplorant les décès de Serge Vialette, ancien président de la Fédération départementale du syndicat des exploitants agricoles de l'Aude (FDSEA), et de Jean-Charles Lalaurie, président de la Fédération des Vignerons Indépendants de l’Aude, la manifestation a débuté par une minute de silence.