Comme les Américains et les Anglais, mais contrairement aux Portugais, les Français ont voulu se faire plaisir avec le vin pendant le confinement, tout en gardant un œil sur le porte-monnaie. Seuls 7 % des Français, consommateurs déjà très occasionnels, ont arrêté de boire du vin durant cette période. Pour la vaste majorité des Français, on constate, au contraire, une fréquence moyenne de consommation orientée à la hausse. Bien évidemment, les occasions sociales ont fortement diminué – mais n’ont pas disparu totalement – pour être remplacées par de nouvelles occasions.
Parmi elles, les fameux apéros virtuels via Whatsapp et autres Zoom, pendant lesquels 50 % des consommateurs déclarent avoir bu du vin. Le repas de midi s’est aussi accompagné de vin plus souvent qu’à l’accoutumé (65% des consommateurs). La fréquence de consommation est ainsi passée de 9,1 à 10,4 fois par mois, une hausse plus marquée chez les femmes, les 18-34 ans et les couples confinés avec enfants !
Ces différentes transitions ont permis au vin de résister « autant que faire se peut », selon Wine Intelligence, sur le plan des volumes, les consommateurs réguliers ayant presque maintenu leurs achats de vins tranquilles. A noter que si les répondants ont déclaré acheter moins de vin qu’avant le confinement, il se peut qu’ils aient préféré puiser dans leur cave que sortir, ce qui est de bon augure pour les ventes post-confinement. Quant à la valorisation, en revanche, « on note que la filière a très manifestement payé un lourd tribut à cette crise sanitaire », constate Jean-Philippe Perrouty, directeur de Wine Intelligence France. « L’humeur du moment n’est pas à dépenser plus mais plutôt moins ». Seule l’occasion d’un bon repas, seul ou avec son conjoint, résiste un peu mieux que les autres
Si l’on pouvait pressentir que la grande distribution, ouverte pendant toute la durée du confinement, serait la grande gagnante de la crise, les données recueilles par Wine Intelligence pointent plutôt une meilleure performance d’autres circuits. Les cavistes – souvent fermés pendant une partie du confinement – et les achats en direct sont en repli, mais les magasins alimentaires de proximité, les marchés, le hard discount, internet et les ventes par correspondance, par exemple, résistent mieux, certes sur des bases parfois relativement faibles. Il est à noter aussi que la réactivité et l’inventivité des vignerons ont pu jouer un rôle dans l’importance de la vente en directe.
Analyser le comportement des consommateurs pendant le confinement sous-entend de pouvoir déceler des tendances qui risquent de devenir pérennes. La tendance à consommer local, manifeste pendant le confinement, semble vouée à s’inscrire dans la durée – à moins que ce ne soit qu’un vœu pieu… Dans l’immédiat, en tout cas, le rapport de Wine Intelligence souligne que la possibilité de se réunir avec ses proches et d’aller au restaurant deviennent des attentes plus fortes. A contrario, les autres activités sociales, parmi lesquelles les soirées en bar et la participation aux événements sportifs sont orientées à la baisse. Point positif pour le tourisme français : partir en vacances en France devrait constituer une priorité plus grande après le confinement.
Deux autres priorités se dessinent à moyen terme (12-18 mois) : faire des économies et organiser des soirées/fêtes avec ses proches à domicile sont pour Wine Intelligence « des valeurs clairement montantes ». Comme les nouvelles occasions de consommation – à l’instar des apéros virtuels – ces valeurs seront à traduire dans les stratégies marketing post-Covid. Car, si le rapport de Wine Intelligence précise qu’à moyen terme « la hiérarchie des priorités devrait rester similaire à celle d’avant confinement », les habitudes de consommation ont indéniablement été impactées par la période de confinement, créant à la fois opportunités à saisir et défis à relever.
* : La collecte des données a eu lieu au moment du pic de l’épidémie, du 7 au 17 avril