Il est difficile de chiffrer le surstock alors que l’on ne sait pas quand et comment le confinement se finira. Si quelqu’un est capable de me dire quel est le bon prix et le bon volume pour la distillation, j’attends son appel ! » lance avec sa gouaille habituelle Stéphane Héraud, le président de l'Association Générale de la Production Viticole (AGPV). Réfléchissant depuis des semaines à une distillation de crise du coronavirus, les élus du vignoble français chiffrent actuellement les excédents à 3 millions d’hectolitres de vins. Misant principalement sur le mécanisme de distillation pour vider les cuveries avant les vendanges, l’AGPV évoque une subvention de 80 euros l’hectolitre pour les vins à appellation d’origine et indication géographique protégée (AOP et IGP).
Pour chiffrer ce volume excédentaire, « nous avons fait le tour des bassins pour estimer les volumes potentiellement en surstock dans chaque région. Avec les aléas climatiques en Provence et Côtes-du-Rhône, il devrait y avoir peu de distillation, mais les vignobles d’Alsace, de Bordeaux, du Languedoc et de Loire sont intéressés. De là à dire s’il s’agirait de 1,8 ou 2 ,3 ou 3,5 millions hl… » expose Stéphane Héraud, qui ne cache pas que les nombreuses incertitudes et inconnues de la crise du covid-19 forcent autant à l’humilité qu’à la navigation à vue. Pour chiffrer le montant de la subvention pour les vins AOP et IGP, les membres de l’AGPV se basent sur le prix de base actuel des vins IGP, notamment les Pays d’Oc. « C’est aussi le prix d’entrée de gamme de certains Bordeaux, 80 €/hl revenant à 720 €/tonneau » note Stéphane Héraud. Le montant de l'aide demandé pour les VSIG est de 65 €/hl.


Estimant que la distillation est la mesure « la plus urgente à court-terme », le président de l’AGPV demande également l’ouverture d’aides au stockage et à la vendange en vert. Même si ces mesures sont moins usuelles pour les crises viticoles françaises. D’autant plus que le vignoble français manque actuellement de cuverie de stockage (même si « dans certaines régions il s’agit plus de temporalité d’écoulement que de surstockage ») et que l’élimination du rendement d’une parcelle n’est pas dans les mœurs viticoles (que ce soit manuellement ou chimiquement). Quant à l’arrachage, déjà évoqué par certains, « il faudra voir après les vendanges 2020, aujourd’hui on gère le court-terme » répond Stéphane Héraud, pour qui la priorité reste d’obtenir rapidement l’autorisation et le financement par la Commission Européenne des mesures qui incombent normalement aux seuls états-membres. « Il faut avancer vite sur la distillation, pour des raisons administratives et techniques afin de sortir des volumes financiers et physiques en juillet et août » conclut le viticulteur bordelais.