es cycles d’expansion et de récession, le secteur vitivinicole américain en a déjà connu d’autres. Mais à la différence de la crise la plus récente en 2001, celle d’aujourd’hui ne serait pas provoquée par un emballement spéculatif des plantations, mais par une divergence entre la nature de l’offre et les besoins de la demande. Selon les chiffres publiés cette semaine par Wine Intelligence, le nombre de consommateurs réguliers de vins aux Etats-Unis a régressé de 11 millions depuis 2015, passant de 88 millions à 77 millions. Résultat : seul un adulte américain sur trois boit du vin au moins une fois par mois. En cause, schématiquement, le passage à la retraite et vieillissement des Boomers, qui ne sont pas suffisamment remplacés par les fameux Millennials, sur lesquels tant d’espoirs ont été fondés. Suit dans leur sillage, la Génération Z (né après 1995) qui boit aussi moins d’alcool que ses prédécesseurs notamment pour des questions de prix, d’attractivité d’autres boissons et produits de substitution, d’efforts marketing mal orientés, de préoccupations liées à la santé et d’une vague néo-prohibitionniste non contrée par la filière vin. « Nous avons besoin d’attirer ces jeunes consommateurs, mais nous nous y prenons mal », a affirmé Rob McMillan, fondateur du pôle vin de la Silicon Valley Bank dans son rapport annuel publié cette semaine. « De plus en plus, nous ratons le coche en termes de réponses aux attentes des consommateurs, et nos résultats sont là pour le prouver ».
Depuis la récolte pléthorique de 2018, les cuves commencent à déborder. Même si la production 2019 en Californie sera vraisemblablement moins élevée, autour de 3,95 millions de tonnes contre 4,24 millions en 2018, « cela ne sera pas suffisant pour corriger le problème des disponibilités », estime Rob McMillan. D’après le courtier international Ciatti, la Californie détient d’importants stocks de vins du millésime 2018 et des années antérieures : ces stocks s’élèveraient depuis novembre dernier à plus de 23 millions de litres de cabernet et près de 11 millions de litres chacun de chardonnay et de pinot noir. « En 2019, nous avons observé des baisses de prix notables sur les raisins de cuve et une quantité indéfinissable de tonnes de raisins ont été laissés sur pied dans tous les vignobles californiens. Nous pouvons affirmer aujourd’hui que la situation excédentaire que nous connaissons concerne l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement, y compris le commerce de détail, et tous les vignobles californiens, à tous les niveaux de prix. Du côté de la production californienne, il s’agit de la pire conjoncture depuis au moins 2001 et peut-être même de tous les temps ». Et même après des chutes de prix vertigineuses, les raisins ont peiné à trouver preneurs en raison de l’évolution négative du marché américain des vins, qui se conjugue aux difficultés rencontrées par les producteurs à l’international à cause de la guerre commerciale. « Le volume des ventes de vins accuse depuis juin 2019 et sur une période glissante de douze mois des baisses à la fois dans le circuit pour la consommation à domicile et en CHR », note Rob McMillan. « La rapidité de la baisse indique que cette tendance se poursuivra en 2020 ».
« Si nous ne mettons pas l’accent sur la stimulation de la demande, nos superficies de vignes en Californie sont trop importantes et certaines devront être arrachées, mises en veille ou replantées de manière anticipée… »