Le tonneau ? Vous aurez autant de définitions qu’il y a de localités viticoles » alertait un numéro de 1865 de l’hebdomadaire agricole la Gazette du Village, comme rapporte la massive Noblesse du Tonneau, somme éclectique de connaissances réunies par Gilles Bousquet, Roland Bugada, Frédéric Gillet et André Valognes (éditions de l’Escargot Savant, 644 pages pour 60 euros).
Appelant de ses vœux une réforme des mesures de la tonnellerie française, la Gazette du Village rapporte que « le Beaunois vous parle de son tonneau de 228 litres, de sa feuillette de 114 litres, de son quartaut de 57 litres. Vous allez de la Côte d’Or dans l’Auxerrois, et vous y rencontrez une feuillette de 142 litres. En Champagne, cette même feuillette n’a plus que 100 litres. A Bar-le-Duc elle n’a que 90 litres. A Bordeaux on emploie la barrique de 228 litres, en Touraine la pièce de 220 litres, dans le Loir-et-Cher les pièces de 245 à 250 litres… » Sans parler des termes locaux de queues, de bottes, de muids…


Cette cacophonie linguistique trouve des racines immémoriales rapporte la Noblesse du Tonneau. Dès le 17 février 1688, le Conseil d’Etat « tenta de fixer les mesures au moins dans chaque province […]. Mais ces dispositions n’eurent point de suite par les difficultés que rencontra leur exécution. Aussi le désordre ne fait-il que s’accroître avec le nombre et la variété des mesures à liquides ».
En 1865, le besoin d’une réforme devait tout simplement permettre aux vendeurs et acheteurs de s’y retrouver. « Supprimer ce jargon féodal et appliquer aux vases vinaires le système décimal, en sorte qu’on n’aurait plus que des futailles s’appelant demi-hectolitre, hectolitre ou double hectolitre » rêve la Gazette du Village. Qui espère, même timidement, « qu’on rende également uniforme la contenance des bouteilles »
Si certaines dénominations locales de tonneaux ont perduré jusqu’à maintenant, « les transactions ont fini par ne plus se traiter que sur la base de l’hectolitre effectif dans l’intérêt commun des producteurs, intermédiaires et consommateurs » conclut la Noblesse du Tonneau.