a déception est à la hauteur de l’espoir qui a été placé. Prévu avec une assurance toute démographique depuis des années sur le marché américain, le passage de relais entre les baby boomers et la génération Y (ou millenials) ne se réalise pas en matière de consommation de vin. En 2018, la population américaine consommant du vin est ainsi tombée à 84 millions d’individus, en baisse de 5 % par rapport à 2015 chiffre la dernière étude de l’agence Wine Intelligence. Ses experts rapportant que « les millenials américains sont à l’origine d’un désengagement des consommateurs avec les vins ». Restant le premier marché mondial de consommation de vin, les États-Unis voient la croissance des achats de vin continuer de ralentir (+2 % en 2018 selon Wines Vines Analytics), tandis que la consommation moyenne par habitant reste faible (12 litres par an selon Wine Intelligence).
« La croissance des ventes de la filière vin s’est ralentie ces dernières années. Et elle est sur le point de passer en territoire négatif pour la première fois depuis 1993 » note Rob McMillan, le fondateur de la division vin de la Silicon Valley Bank dans son rapport annuel sur les perspectives du marché américain. Alors qu’ils sont désormais en âge de consommer des boissons alcoolisées (ayant entre 18 et 38 ans), « la génération Y ne s’engage pas avec le vin comme on l’avait espéré » regrette l’analyste. Une déception d’autant plus grande que les principaux consommateurs de vin, les baby boomers (âgés de 59 ans à 73 ans), réduisent leurs achats après leur départ à la retraite (suite à la baisse de leurs revenus) et voient leur cohorte se réduire (du fait de son âge avancé).
Pour comprendre le manque d’attrait du vin pour les millenials, les observateurs multiplient les hypothèses. Ces explications vont des faibles ressources financières de la génération Y (commençant plus tardivement à travailler) à leur préférence pour les bières et spiritueux (y compris premiums), sans oublier la médiatisation d’études sanitaires inquiétantes (comme l’étude du Lancet sur les risques pour la santé d’une consommation d’alcool) et… La légalisation de la consommation récréative de cannabis dans les premiers états américains (Colorado et Washington).
Agitant la filière des vins américains, la peur d’une substitution du vin par le cannabis laisse perplexe Rob McMillan. L’expert relativise l’impact de cette légalisation, estimant que « 13 % des adultes américains sont des consommateurs réguliers de cannabis. Contre 60 % pour l’alcool. Au vu de cette disparité, il semble difficile que les 13 % influencent fortement les 60 %. » Reconnaissant que les plus jeunes sont les plus attirés par la marijuana, l’analyste souligne cependant qu'ils perdent cet attrait, ainsi que celui pour les bières et les spiritueux, au profit du vin. Une façon de se rassurer, et de regagner l’espoir placé dans la génération Y.