es formules chocs à la mesure choc. Après avoir appelé à la dissolution du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB), la Confédération Paysanne de Gironde demande la création d’un Établissement Public Foncier (EPF) pour racheter les vignobles menacés de déshérence afin qu'ils arrêtent de continuer à produire à perte et s’endetter faute de reprise. Une proposition évoquée depuis des années (été 2022 et fin 2023 notamment) et qui sera présentée ce jeudi 16 octobre en cellule viticole de la préfecture de Gironde, avec l’objectif de proposer un outil consensuel d’accompagnement de la filière bordelaise dans la dévindustrialisation qu’elle subit (en supprimant les excédents sans laisser la spirale destructrice actuelle aller au-delà du nécessaire).
« Face à la crise économique qui touche de plein fouet la filière viticole sur fond de déconsommation, il est nécessaire d’ajuster les quantités et les surfaces au nouveau niveau de consommation du vin » annonce un communiqué de la Conf’, qui estime que « les plans d’arrachage et de distillation seuls ne sont pas suffisants. Or, la perspective d’une diminution de 50 % des surfaces consacrées à la viticulture est un véritable séisme pour la Gironde, son économie et son espace rural », ce qui imposerait d’un EPF « chargé d’acquérir les vignes en déshérence, permettant à une génération en fin de carrière de partir dans des conditions dignes » et d’assurer « un travail de remembrement et de réhabilitation […] en vue de nouvelles productions alimentaires » par de nouveaux producteurs.
Pilotage collectif
Pointant que « les banques seraient nécessairement associées au projet », la Conf’ indique concrètement que « la région Nouvelle-Aquitaine, le département de la Gironde, les communautés de communes, les municipalités seraient garantes des missions d’intérêt général, participant à une politique cohérente d’aménagement du territoire en associant à la gouvernance la Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER), la chambre d’agriculture, les organisations professionnelles agricoles, les associations environnementales et citoyennes ».


Soit un outil local qui n’exclut pas des plans nationaux/européens de réduction du potentiel de production (par distillation et arrachage), mais qui permet de « procéder à l’ajustement [entre offre et demande], avec le moins de casse possible, en cassant la spirale actuelle de l’endettement » indique un document de la Confédération Paysanne communiquée aux participants de la cellule préfectorale. Ayant subi les critiques par le passé, cet outil se veut économiquement viable, rentable et désirable pour la filière par la Conf’ : « chiffrons grossièrement le coût de la mise en place initiale d’un établissement public foncier : 30 000 ha rachetés à 6 000 euros, soit 180 millions d’euros. Cette mesure permettrait de sortir du marché environ 30 000 x 40 hl, soit 1,2 million d’hectolitres par année, en chiffrage bas. Ce qui permet de limiter la chute des prix. Imaginons le maintien en production de ces 30 000 ha, cela nécessite environ 7 000 euros de frais de culture par hectare pendant deux ans, soit 420 millions d’euros. Ces coûts ne pourront pas pu être financés autrement que par de la dette auprès des banques et des fournisseurs. Au final, cela se traduira par de monumentales provisions pour perte que passent les banques et les fournisseurs. Ce sont des centaines de millions d’euros évaporés, en toute discrétion. Là où les banques auraient pu miser dans l’EPF, et donc garder au bilan une créance, on leur a fait préférer des pertes sèches d’un montant supérieur et des emprunteurs en situation encore plus dégradée. »
Pour la Conf’, le calcul doit être vite fait par les structures pouvant soutenir la création de cet EPF. Sachant que la situation ne cesse de se dégrader économiquement et humainement dans le vignoble bordelais. Actuellement, « la baisse de la commercialisation et le maintien de surfaces excédentaires ont conduit à l’effondrement du système et à une spirale déflationniste. Il n’y a plus de prix, ni pour les vins stockés dans les cuves, ni pour les vignes. Le marché est apoplectique » constate la Conf’, qui maintient que « 80 % des exploitations viticoles à Bordeaux sont objectivement en cessation de paiement. Les experts comptables et les commissaires aux comptes font semblant de ne rien voir. Les stocks dans les bilans sont toujours comptabilisés aux valeurs d’origine… »