n cette période de motion de censure, la Confédération Paysanne de Gironde appelle les vignerons bordelais à assister « pacifiquement » ce lundi 16 décembre à l’assemblée générale du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB) pour « demander des comptes » indique Dominique Techer, l’indéboulonnable porte-parole du syndicat agricole. Précisant être « juste cotisant » et pas « adhérent » au CIVB, le syndicaliste estime que l’interprofession et ses dirigeants « ont failli. On veut la dissolution du CIVB ». Ayant assisté ce mardi 10 décembre à la réunion entre filière des vins de Bordeaux et grande distribution, Dominique Techer estime que « la montagne a accouché d’une souris : l’interprofession avalise, ne raisonne qu’en quantité produite, demande à dynamiser le rayon vins, annonce réfléchir aux profils produits pour tenir compte des nouvelles tendances de la consommation… Tout ça pour ça ? Ce n’est pas entendable en pleine crise ! » tacle le vigneron de Pomerol.
Ayant une dent contre le système interprofessionnel (notamment le système des Cotisations Volontaires Obligatoires, CVO, ayant nourri nombre de procédures judiciaires infructueuses), Dominique Techer précise ne pas être contre le principe d’interprofession, mais opposé à une institution « en faillite politique et professionnelle. L’organisme a failli n’a pas rempli sa mission : tout se casse la gueule. Une marée de sauvegardes et de redressements arrive et sera suivie par une marée de liquidations. Il n’y a pas de flux d’affaires. Et l’on n’est pas assuré de la non-saisissabilité des maisons d’habitation des vignerons ruinés en SCEA (ce n’est pas le cas en EARL, sauf s’il y a hypothèque). On arrive dans le dur. La situation est grave. Le vignoble est en faillite, il faut dissoudre l’interprofession. »
Renouveau démocratique
Au-delà d’une banderole et d’un rassemblement au CIVB, Dominique Techer veut que la filière sorte de ses réflexes pavloviens pour aboutir à de nouvelles réflexions collectives sur les orientations stratégiques. À commencer par un renouveau démocratique en permettant l’expression apaisée des dissensions : « il n’y a plus un seul vote à bulletin secret dans les instances viticoles. Ceux qui émettent une opposition n'osent pas voter contre, par peur de rétorsion. Il faut une dissolution pour défendre les producteurs face aux prix indécents, aux vignes abandonnées en cours de saison… »
Habitué des prises de parole en fin d'assemblée générale du CIVB, Dominique Techer devrait connaître lundi prochain de nouvelle passe d'armes avec ses interlocuteurs habituels : Allan Sichel, Bernard Farges ou Fabien Bova, respectivement président, vice-président et directeur général de l'interprofession. L'histoire se répétant entre CIVB et Confédération Paysanne, les propos de Bernard Farges lors de l'assemblée générale d'avril 2018 semblent encore d'actualité (voir encadré).
« Cher camarade Dominique, les élections de la Chambre d’Agriculture ont lieu l’année prochaine, en tout cas ce n’est pas ici que cela se passe » lançait le viticulteur de l'Entre-deux-Mers à Dominique Techer le 23 avril 2018, déroulant « une fiction, en France, dans une interprofession où il y aurait une poignée d’opérateurs qui, pendant plus de dix ans, attaqueraient année après année des structures collectives où tout le monde est élu. Et qui, année après année, perdraient tous leurs procès : à Bordeaux, à Paris, à Bruxelles. Cette même poignée d’opérateur contribuerait à ce qu’ils dénoncent, c’est-à-dire le bashing de cette filière sur les sujets de pratiques culturales et politiques. Ce bashing dénoncé, mais surtout alimenté, on le sait, par la proximité avec certaines associations, contribuant à leurs éléments de langage. Alimenté en participant aussi, de manière enthousiaste, à des reportages à charge. Et de l’autre côté, dans cette filière, il y aurait un certain nombre d’acteurs des différentes familles, qui essaieraient de faire avancer cette filière. Avec toutes les difficultés économiques depuis dix ans, mais aussi le besoin de changements de pratiques, voulu par la société et par nos générations. Il y aurait des collectifs qui essaient donc, tant bien que mal, de faire avancer les choses, de les faire changer. Pas toujours suffisamment vite, pas toujours suffisamment profondément… » poursuit le vigneron. Qui conclut : « en tout cas il y a deux catégories. D’un côté ceux qui œuvrent et tentent d’agir. Puis de l’autre, il y a les commentateurs. Je crois que dans la salle il y a surtout des gens qui veulent agir… »