rac exclusif, valorisation par la bouteille, installation d’une marque ombrelle forte… Toutes les stratégies de création de valeur peuvent se rencontrer au sein des caves coopératives, mais un constat s’impose : « une fois qu’une ligne directrice a été clairement fixée, il faut la tenir sans y déroger », pose le directeur de la coopérative gardoise Vignerons Créateurs Frédéric Senac.
Participant à la table ronde organisée à l’occasion de la dernière assemblée générale des Vignerons coopérateurs d’Occitanie, le directeur des Vignerons Créateurs a pu exprimer la stratégie de travail de sa coopérative sur les coûts de production alors qu’elle a dû gérer 4 fusions successives entre 2006 et la dernière en cours d’aboutissement en 2025. A ses côtés, David Reverbel, directeur de la coopérative des 3 Grappes, au Pouget, dans l’Hérault, explique quant à lui « l’orientation 100% vrac » assumée par la cave pour mettre en marché les 100 000 hl qu’elle produit annuellement, pour 9 à 10 millions € de chiffre d’affaires. « C’est un choix d’éliminer toutes les charges de préparation des vins, de commercialisation, pour ne se concentrer que sur des lots de vrac faits sur-mesure, ‘haute-couture’ comme l’annonce notre logo, et répondre très spécifiquement aux besoins de nos clients », déroule David Reverbel.
Cette stratégie du sur-mesure, beaucoup de coopératives la revendiquent aujourd’hui dans leur processus d’élaboration des vins destinés à la vente en vrac. Le président de la cave limouxine Anne de Joyeuse, Jérôme Boyé, s’en fait également l’écho. Dans une zone très marquée par la bulle cette cave a très tôt choisi d’en prendre le contre-pied en se dédiant aux vins tranquilles. « De manière novatrice à l’époque, nous avons fait le choix de de mettre l’accent sur le vignoble avec des techniciens dédiés et le choix de plantations de ceux qu’on appelait alors les ‘cépages améliorateurs’, cabernet, merlot, chardonnay… », pose Jérôme Boyé.
En se démarquant très tôt, la cave a « raconté une histoire différente » et pris le parti de développer une valorisation en bouteilles en plus du vrac. « Avec nos 180 000hl, nous restons une cave vraqueuse avec 136 clients pour ce secteur, mais auquel s’ajoute un bonus de 7 millions de bouteilles », enchaîne Jérôme Boyé. Anne de Joyeuse a même investi depuis 2020 dans un centre de prestation de conditionnement, en association avec sa voisine historique Sieur d’Arques, qui ne fait de son côté que de la bulle. « Que ce soit pour la production de vrac comme pour la bouteille, l’investissement en matériel pour une production qualitative a permis de franchir les caps. Et dans notre zone, nous n’avons pas d’autre choix que travailler sur la qualité », valide le président d’Anne de Joyeuse, dont la cave atteint 49 millions € de chiffre d'affaires (environ 180 000hl).


Dans les Pyrénées-Orientales voisines, la présidente de Vica Fabienne Bonet souligne le tournant de marque pris depuis 2022 par la Sica (société d’intérêt collectif agricole) qui s’appelait encore les Vignerons Catalans. « Historiquement positionnés sur les marchés de grande distribution, les Vignerons catalans peinaient dans la valorisation par manque de notoriété des vins des Pyrénées-Orientales. La marque Les Vignes du Vent est née de cette réflexion pour inverser cette tendance, créer de la valeur ajoutée et rémunérer les vignerons, alors que l’état de sécheresse ne fait qu’empirer les conditions de production », décrit-elle.
Pourtant, au moment de conclure cette table ronde, « comment convaincre un conseil d’administration d’investir dans une stratégie ? » se replace au centre du débat. Si David Reverbel place la communication au centre des échanges, Jérôme Boyé n’oublie pas de préciser que « le revenu reste le moyen de convaincre, depuis 20 ans, nous avons fait le choix d’une rémunération au kg, plutôt qu’à l’hecto, laissant plus de certitudes sur la rémunération à l’hectare pour nos adhérents ».