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Plus question de vigne ou de mort
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Plus question de vigne ou de mort

Par Alexandre Abellan Le 16 mai 2025
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Plus question de vigne ou de mort
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n de plus, c’est toujours un de trop. Le vignoble est en deuil depuis que l’un des siens s’est donné la mort ce printemps : Christophe Blanc, ce 10 mai dans ses vignes à Castillon. Hélas, ce n’est pas le premier suicide qui frappe la filière vin. Des deuils frappant Bordeaux, mais aussi le Languedoc, le Rhône, le Jura… Pourtant, on veut pouvoir espérer que ce soit le dernier vigneron à se donner à la mort. On veut croire à un sursaut collectif. On veut rappeler une évidence : la crise viticole ne peut plus tuer. Il faut répéter qu’il existe toujours des solutions : de l’arrachage pouvant rétablir la rentabilité à l’évolution/innovation des profils produits pour dynamiser les ventes et la valorisation, en passant par les procédures collectives pour retrouver de l’oxygène financier et la reconversion professionnelle s’il n’y a plus de solutions. Vivre sa vigne ce n’est pas en mourir. Rompre l’isolement des idées noires paraît crucial : il est vital de crever l’abcès et de partager ses difficultés avec sa famille, ses proches, ses collègues, ses syndicats, la MSA, ses fournisseurs… Et s’entourer d’experts : économiques, commerciaux, juridiques et psychologiques. Des dispositifs institutionnels et associatifs existent pour. Le vignoble ne peut plus jouer Camille déclamant dans Horace : « se plaindre est une honte et soupirer un crime » (Corneille, 1641).

L’ampleur de la crise viticole doit combler l’abysse de la honte d’avoir un domaine endetté et un moral à bout de souffle. Quand tous les vents sont contraires, la difficulté tourne à la fatalité, mais cette fragilité ne doit pas être fatale. Quand on n’est pas vigneron, on ne peut qu’imaginer le vertige de ceux qui ont tout donné à leurs vignes pendant une vie, ceux qui se retrouvent acculés par les encours et encerclés par les créances, ceux qui voient leur foncier et leurs stocks se dévaloriser. Mais on ne peut pas imaginer que le suicide soit une solution. D’abord parce que rien n’est résolu, les dettes survivent et les successions n’en sont que plus douloureuses et coûteuses. Ensuite parce que « nos vignobles ne restent que du matériel, nos vies sont plus importantes » comme le résume la vigneronne médocaine Cathy Héraud, qui appelle actuellement ses confrères à se réunir pour trouver de nouvelles voies de commercialisation. Car dans le monde agricole, le constat des ventes à perte semble institutionnalisé. En témoigne l’appellation Castillon où le différentiel entre coût de production et prix de vente est l’un des plus importants du vignoble bordelais. L’une des raisons étant l’investissement des vignerons dans la transition agroécologique, qui ne leur est pas rendu par le marché n’en payant pas le prix. Entre l’attente prévue des consommateurs et leurs comportements réels d’achat, le coût est rude pour les domaines s’exposant à d’importants décrochages.

En témoigne crûment Rémy Grassa, directeur du domaine Tarriquet en Côtes-de-Gascogne : « on pensait répondre à une attente du consommateur, mais au final ce n’est pas valorisé sur le marché et cela ne fait pas la différence. Peut-être parce que le consommateur est perdu, désinformé. Il ne sait pas faire la différence entre celui qui prend un engagement territorial à produire dans la vigne et des acteurs dans le négoce qui profitent de l’image des vrais acteurs de territoire en achetant en dessous du prix de revient économique, ce qui décapitalise le vignoble pour générer de l’opportunisme qui déstabilise la filière. »

Devant amener à une prise de conscience collective, le drame de Castillon redonne toute sa force à l’enjeu de développement durable de la filière vin. L’inaction n’est plus possible. Les acheteurs, qu’ils soient négociants ou distributeurs ou importateurs, ne peuvent plus dire qu’ils ne savent pas qu’en achetant à prix cassés des vins ils détruisent des hommes. Ce n’est pas suivre le marché que de le déconnecter de la réalité du coût de revient. Et ce n’est pas respecter le consommateur que de lui servir des discours sur l’importance de privilégier des filières locales et durables pour sortir en promotion des bouteilles. « Accordez votre bouche avec votre courage

Pratiquez vos conseils, ou ne m'en donnez pas » dit Mélite dans la pièce éponyme de Corneille (1642).

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Tous les commentaires (2)
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Roméo Le 17 mai 2025 à 00:42:27
Combien faut il encore de mort. La viticulture n'intéresse nos politiques que pour ce qu'elle rapporte. Alors maintenant que cela devient plus difficile et rapporte moins, on nous laisse crever. Le consommateur, il est perdu il lit et entende de partout que le vin est dangereux, nocif qu'il provoque le cancer et pourtant pourquoi y a t il de tant de centenaires dans les régions viticoles. C'est l'abus qui est dangereux mais cela on ne le dit pas. Pour nous tuer on ne s'y prendrait pas autrement. Et puis comment le consommateur peut il s'intéresser aux vins français dont les prix sont de plus en plus élevés mais comment faire autrement la main d'œuvre est hors de prix, la fiscalité exorbitante, sans parler des cotisations MSA , des charges salariales pour une activité le plus manuelle, du foncier, des matières premières qui flambent et à coté de nous, d'autres états membres n'ont pas les mêmes normes, la même fiscalité, les mêmes taxes et le cout de la main d'œuvre est beaucoup moins cher. Nous n'intéressons personne car nous rapportons moins. j'ai honte de voir ce qui se passe aussi bien au niveau de notre pays que de la profession car ne nous mentons pas, le malheurs des uns fait le bonheur des autres. En France on ne veut plus de petits il faut les laisser crever il ne faut que des gros (ferme aux 1000 vaches ect). Qu'est devenu notre pays la misère !!!!!!! Bravo à tous nos politiques dont l'Ukraine par exemple semble plus important que nous viticulteurs ou Agriculteurs au sens large. C'est chez nous, devant vous nos dirigeants, mais cela ne vous intéresse pas. Cela fera moins de retraite à payer . Mais vous pensez à ces familles. Notre devise n'est elle liberté égalité et surtout FRATERNITE. Elle est où ???? Réduisez nos charges , donnez nous de l'oxygène, pour la viticulture le quoi qu'il en coute n'existe pas. On peut crever..... Maintenant que nous rapportons moins... Belle devise et quel remerciement pour vous avez tellement rapportez pendant ses nombreuses années.
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Renaud Le 16 mai 2025 à 13:53:35
Pour que ce soit le dernier il faudrait une volonté d'agir. Durant cette période de deuil il n'y a que du bon sentiment qui sera vite balayé par le prochain orage ou annonce hors sol. Quand allons nous agir ? Seneque disait: « quand tu auras appris à ne plus espérer, tu apprendras à vouloir. ». Alors soyons les sujets et acteurs de notre vie et agissons. Il n'est plus temps de négocier ou demander. Il est temps d'exiger un juste retour des contributions que nous avons versé. Je ne parle pas d'argent magique mais de redistribution. La viticulture c'est 6,4 milliards d'euros de contribution fiscale par an. Alors oui sur les 8 dernières années nous en avons reçu 1. Mais c'est plus de 50 que nous avons versé. Il faut agir fort et surtout très vite. Ce n'est pas la logique comptable qui bloque. Car la redistribution serait indéniablement positive. Ce qui bloque c'est tous les petits Marquis étriqués du porte monnaie et au chapeau trop serré. Qui ont toujours des solutions pour les autres, les pauvres contribuables . Alors qu'ils sont des sangsues à vivre sur notre dos, mais attention. À n'être que des prédateurs vous allez tarir vos ressources. Soyez réellement responsables
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