rame intime, le suicide du vigneron bordelais Christophe Blanc ce 10 mai dans ses vignes endeuille collectivement la famille vin qui est secouée par la violence de la crise frappant ses membres.
« Nous sommes meurtris par cette perte, c'est une personne de trop » réagit Élodie Kohr, l’animatrice de Solidarité Paysans Aquitaine en Gironde, l’association qui fournit un accompagnement gratuit et confidentiel aux vignerons en détresse. Alors que la crise viticole s’envenime à Bordeaux, Solidarité Paysans Aquitaine reçoit toujours plus d’appels et de sollicitations de personnes fragilisés. En 2024, l'association a accompagné un nombre record de dossiers : 198 sur les 5 départements d'Aquitaine, dont 112 nouvelles demandes, contre 167 dossiers en 2023 dont 86 nouveaux (respectivement +19 et +30 %). Fin mai 2025, l'association a déjà enregistré 45 nouveaux appels, dont 28 en Gironde (très majoritairement en viticulture).
« Nous avons plus que jamais besoin de nouveaux bénévoles actifs pour faire face » alerte Élodie Kohr, qui ne cesse de le marteler : « avant toute chose, c'est la prévention qui compte. Ne pas attendre d'être au pied du mur pour se faire accompagner et ne pas rester seul. » Actuellement, l’association compte une équipe d'une quinzaine de bénévoles en Gironde, avec des viticulteurs (actifs ou retraités) et d’autres profils (expert-comptable, cadre bancaire, psychologue…), qui vont selon leurs possibilité « sur les fermes, mais aussi au tribunal, chez les mandataires, à la banque, à la MSA, aux impôts... » accompagnant l’exploitant le demandant, en binôme avec un salarié ou un autre bénévole de l’association explique Élodie Kohr. L’animatrice pointant qu’au-delà de l’association Solidarité Paysans Aquitaine, « il y a beaucoup de solidarité dans le vignoble. Et même les administrations sont tenues par des humains, on peut discuter avec tout le monde et trouver des arrangements. »
Dans l’immédiat, le drame de Castillon « est en réalité la preuve d’une faillite collective » regrette Paul Gaudin, vigneron bordelais et membre actif de Solidarité Paysans Aquitaine. Notant le manque de « traitement humain des difficultés dans le monde agricole », le vigneron de Saint-Martin-de-Laye affirme qu’« il faut engager, rapidement, des actions, pas forcément très coûteuses mais véritablement volontaristes, dans le sens d’une optimisation du soutien et de l’accompagnement de la filière viticole et plus généralement agri-paysanne… Faute de quoi les différents intervenants seront co-responsables de nouveaux drames insupportables. » Paul Gaudin en appelle à des mesures concrètes comme « le préfinancement garanti par les collectivités publiques des arrachages », pour éviter les délais de traitement face aux dates-butoir, ou « l’accompagnement social par les institutionnels dans tous les dispositifs de redéploiement et de conversion professionnelle ».


En l’état, « personne n'a de solution magique » prévient Élodie Kohr, qui rappelle que le champ des possibles (arrachage, diversification, reconversion professionnelle…) reste ouvert et que « tout dépend de ce que le paysan souhaite au fond de lui pour la suite. La seule décision qui soit vraiment définitive est celle de s’ôter la vie, toutes les autres peuvent être remises en cause et il n'est jamais trop tard. »