iel mon mariachi. Ce vendredi 4 avril, la 31ème chambre du tribunal judiciaire de Paris a lourdement condamné les créateurs et des vendeurs de la marque "Rosé Garcia" pour délit de publicité illicite en faveur de boissons alcooliques : notamment l’acteur José Garcia qui a écopé d’une amende de 10 000 € pour avoir fait la promotion de la cuvée qu’il signe depuis l’été 2021 lors de vidéos survoltées, en triporteur faisant déguster des passants à Paris ou lors d’un dîner de la Saint-Valentin interrompu par des musiciens mexicains.
Mais pour la filière vin, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg, car dans la citation directe déposée en décembre 2023 par l’Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie (ANPAA), il était également demandé « de déclarer illicite le conditionnement de la boisson alcoolique "Rosé Garcia" » car « la présence du nom de José Garcia ainsi que la reproduction de son visage sur la bouteille crée une association entre cette boisson alcoolique et l’image d’une personnalité célèbre ». En soit, « l’ANPAA demande au tribunal de déclarer illicite non seulement la reproduction sur tout support publicitaire de cette bouteille figurant l’acteur et portant son nom, mais également le conditionnement de la boisson alcoolique "Rosé Garcia" en lui-même » résume la juridiction dans son délibéré.


Or, l’article L3323-4 du Code de santé publique définissant la loi Évin précise que « le conditionnement ne peut être reproduit que s'il est conforme aux dispositions précédentes ». Comme l’indique le tribunal judiciaire, « le conditionnement (soit la bouteille et son étiquette) ne peut en lui-même être considéré comme une publicité sans aller au-delà de la lettre du texte, et le contenu des mentions de son étiquette n’est donc pas strictement limité à l’énumération des éléments objectifs autorisés dans tout message publicitaire relatif à l’alcool ». Donc, « sur la base de la loi Evin, il n’est donc pas possible pour le Tribunal de déclarer illicite un conditionnement de boisson alcoolique, indépendamment de sa reproduction à des fins publicitaires » juge le tribunal qui prononce la relaxe sur ces motifs.
Un rejet de ses arguments qui pousse l’ANPAA à étudier un possible appel. Mais il s’agit d’une pure lecture du texte de loi pour maître Benjamin Gourvez, la défense de José Garcia, qui rapporte à Vitisphere que « depuis des années l’ANPAA s’évertue à dire que le conditionnement est un support de communication comme les autres et qu’il doit répondre à la loi Évin. Mais ce n’est pas vrai. » Pour l’avocat parisien, « la loi Évin n’est pas une loi sur l’étiquette ou le conditionnement. Il suffit de la lire pour savoir que c’est une loi d’autorisation de ce qui est permis comme supports et thèmes de communication. Les juges sont clairs, en droit pénal le texte s’interprète strictement pour être au service de la sécurité juridique et de la protection des justiciables. C’est une vraie victoire, qui remet l’église au centre du village. »
Communiquer avec modération
Ce jugement permet également d’autoriser l’humour dans la filière vin, ce qui est dans le viseur de l’ANPAA (ayant fait condamner des marques décalées sur des bières). Une approche repoussée par le tribunal, qui juge que « la publicité se définissant comme toute forme de communication faite dans le cadre d’une activité commerciale industrielle, artisanale ou libérale dans le but de promouvoir la fourniture de biens ou services, il ne saurait être retenu que la publicité pour l’alcool est illicite au seul motif qu’elle serait attractive ou qu’elle inciterait à la consommation de boissons alcoolisées, puisque par nature la publicité a pour objectif de modifier le comportement de son destinataire en provoquant l’achat ou le désir d’acheter et de consommer. » Pour le tribunal, « seule l’incitation à une consommation excessive contrevient à l’objectif de santé publique de lutte contre l’alcoolisme défini par le législateur à l’origine de la loi Évin ».


« Les juges rappellent une évidence : la spécificité de la publicité, c’est d’être attrayante » résume maître Benjamin Gourvez, pour qui « il ne faut pas faire de loi Évin une loi pour faire de la communication sur le vin une tristesse monumentale, sans créativité, aseptisée… » Précisant bien le cadre d’application de la loi Évin, ce jugement permet pour maître Benjamin Gourvez de revenir à l’application stricte des textes pour éviter toute « volonté arbitraire sur fond de courant hygiéniste ». L’avocat pointant que la loi Évin est « objectivement une loi attentatoire à la liberté d’expression », et que si le packaging était inclus de facto dans son périmètre, ce ne serait plus une limitation de la liberté d’expression, mais d’entreprendre : « un professionnel ne pourrait plus confectionner un conditionnement comme il l’entend ».
« Il est évident cependant que l’étiquette d’une boisson alcoolique devient un vecteur de publicité dès qu’elle est reproduite et diffusée à des fins publicitaires, notamment via un service de communication en ligne ou des affiches » prévient le jugement, pointant que « dès lors qu’il est difficile de faire la publicité d’un produit sans reproduire soit son contenant soit son intitulé, il existe en pratique le plus souvent un alignement des caractéristiques même du conditionnement sur les exigences de la loi Évin, et ce afin que la bouteille puisse figurer sur les supports destinés à la faire connaître et à la populariser. » À noter que lesdits packagings peuvent être repris en ligne sur des sites de vente. « La reproduction du visuel du conditionnement, qui ne figure pas sur un site de vente à titre de publicité, ne saurait être poursuivie en application de la loi Évin » précise la juridiction, l’expliquant par la mise en place la cas échéant d’« une situation de concurrence déloyale avec les magasins physiques proposant la même prestation de vente, dénuée de toute volonté publicitaire ».
Les parties prenantes ont 10 jours pour faire appel.