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nologue : nom, spécialiste d’œnologie » définit le Robert. C’est un peu court jeune homme dirait un cadet de Gascogne… Un lecteur du Dictionnaire absurde et impertinent de la vigne et du vin de Jean-Pierre Gauffre (éditions Feret, 2010) compléterait : « animal à sang froid, doté d'un odorat encore plus exceptionnel que celui d'une meute de bassets artésiens ». Un étymologiste vous aurait doctement parlé grec ancien, de l’οἶνος et du λόγος. Un farceur vous citerait une punchline du négociant rhodanien Michel Chapoutier : « quand j’entends quelqu’un dire "j’aime bien le vin, mais je n’y connais rien", je lui réponds un peu abruptement : "vous n’avez pas besoin d’être gynécologue pour faire l’amour, donc vous n’avez pas besoin d’être œnologue pour déguster du vin" ».
Traduit par enologo en Amérique du Sud et winemaker en anglais*, l’œnologue est un titre protégé par la loi du 19 mars 1955, le titre d’œnologue n’est pas apparu il y a 70 ans. « Il faut définir les mots tant que les pages sont blanches » écrit Émile Peynaud dans Le vin et les jours (éditions Payot, 1996). L’éminent œnologue bordelais rapporte que « l'œnologie ferait figure de science ancienne, puisque le mot est signalé dès 1636 ». Cette science du vin est rapidement devenue métier : « Labbé Rozier (1772) nommait œnologiste l'homme qui étudiait et enseignait la science du vin », puis « vers 1770, Béguillet et Chevalier employaient œnologie dans le sens de "discours sur les vignobles et les vins". Le baron Chaptal, ministre de l'Intérieur sous le Directoire, dans son livre L'Art de faire le vin (1804), a senti le besoin de redéfinir le terme pour les lecteurs de l'époque, un peu moins forts en grec sans doute : l'œnologie est "la science qui traite du vin". »
Technœnologie
Aujourd’hui, « l’œnologue accompagne [le vin dans son] élaboration (on ne parle pas de "fabrication" !) par des méthodes et des techniques qui sont codifiés » définissent les professeurs montpelliérains Alain Carbonneau et Jean-Louis Escudier dans De l’œnologie à la viticulture, par (édition Quae, 2022), qui rappellent que « l’œnologue n’est pas qu’un chimiste qui réalise les analyses des vins ! Du laboratoire où il contrôlait la composition des vins, il apporte ses connaissances au vignoble et aux chais pour élaborer des vins correspondants à des objectifs commerciaux. » En creux, la définition de l’œnologue est aussi le positionnement de ce qu’il n’est pas, la technœnologie n’étant pas un concept plébiscité par une filière où la production de vin tient de l’image d’Épinal.
Si jamais il y avait un doute, « l'œnologie scientifique n'a pas eu pour conséquence une standardisation et une banalisation de la qualité » défend le professeur bordelais Pascal Ribéreau-Gayon dans sa préface de 2004 du Traité d’œnologie, tome 1 microbiologie du vin et vinifications (éditions Dunod), y précisant que « tout au contraire, en permettant d'éliminer les défauts, l’œnologie a permis de mettre en valeur les éléments qualitatifs spécifiques des différentes vendanges, en relation directe avec la nature du cépage et celle du terroir, qui ne sont plus masqués par des imperfections techniques. »
Impasse sur la dégustation
« Les conditions d'accès et le programme du DNO prévu lors de sa création, paraissent aujourd'hui totalement insuffisants » reconnait Pascal Ribéreau-Gayon dans L’histoire de l’œnologie à Bordeaux de Louis Pasteur à nos jours, (édition Dunod, 2011), relevant qu’« à titre d'exemple, dans ce premier programme, l'enseignement de la dégustation n'était pas prévue ». Ce qu’épinglait Émile Peynaud dans le Vin et les jours (éditions Payot, 1996) : « les programmes d'enseignement préparant au diplôme d'œnologue de 1955 avaient dû être établis par des abstèmes. Ne savaient-ils pas que l'on doit goûter pour vinifier, pour conserver, pour clarifier, pour stabiliser, pour analyser ? »
Une lacune corrigée depuis, comme en témoigne la réputation, plus ou moins flatteuse des titulaires de ce titre. « Un œnologue normalement constitué est capable, en passant simplement son nez au-dessus d'un verre de vin, d'y détecter des odeurs de fruits rouges, mûrs ou pas, de vanille, de café, de cuir, de sous-bois après la pluie, de gibier aux abois. Mais aussi, quand il est particulièrement en forme, de clé à molette, de corde à linge, de démonte-pneu, de bonnet de nuit, de téléphone portable, d'agrafeuse de bureau et de militant Modem. C'est impressionnant » taquine Jean-Pierre Gauffre.
* : Enologist étant rattaché à un laboratoire d’analyses du vin dans le monde anglo-saxon indiquent Alain Carbonneau et Jean-Louis Escudier.
