’est une note du Crédit Agricole qui a fait tousser des opérateurs de la filière vin en lutte pour leur survie économique et trouvant corsée la leçon de stratégie donnée gratis par leur banquier gentleman farmer. Intitulé "Viticulture en crise : la filière doit se réinventer", le billet de la banque verte annonce déployer dans un contexte de crise viticole « des mesures financières pour diminuer la pression qui règne sur la profession et encourage les producteurs à mettre à plat leurs stratégies de production et de commercialisation ». Si le réseau bancaire indique avoir soulagé « la trésorerie des exploitations à hauteur de 139 millions d’euros », il ne vend pas du rêve pour autant.
« Notre volonté est de rester l’acteur majeur des vins et spiritueux : on veut accompagner au mieux et dans la pérennité nos clients. Et ne surtout pas mettre de la dette sur quelqu’un qui n’a pas d’avenir sur un territoire trop difficile ou une AOC trop compliquée » indique Jean-Christophe Roubin, le directeur du marché agri agro du Crédit Agricole, précisant qu’« il faut poser les diagnostics et proposer des solutions : l’arrachage, la consolidation des caves coopératives et leurs probables rapprochements, fusions… » afin de résoudre « les questions de positionnement sur les marchés [qui] sont très importantes ».
Vignes et ligne de Crédit Agricole
Une approche qui se revendique pragmatique par l’expérience du Crédit Agricole du vignoble. Sa filiale CA Grands Crus exploitant 205 hectares de vignes à Bordeaux (château Grand Puy Ducasse, grand cru classé en 1855 à Pauillac, château Meyney à Saint-Estèphe et château) et en Bourgogne (domaine du Château Philippe le Hardi, ex-château de Santenay). S’étant désengagé de deux crus bourgeois du Médoc en 2019 (châteaux La Tour de Mons et Blaignan) et de Sauternes (château Rayne-Vigneau en 2015), la stratégie de la banque verte ressemble plus à une concentration sur le haut de gamme établi qu’à une réinvention de la filière. Bien que la crise n’épargne plus personne désormais. « Depuis deux ans au moins, on observe des difficultés commerciales. Cela commence aussi à toucher les crus classés spéculatifs » indique Anne le Naour, la directrice générale de CA Grands Crus, s’attaquant rien de moins qu’à un « enjeu de taille : la distribution sur la partie bordelaise. Ce qui fera le renouveau du vin de Bordeaux, c’est sa capacité à créer un lien fort entre la propriété et le consommateur final. » Réinventer la roue et le rouge par la même occasion ?