e 6 décembre 2024, l’Anses a décidé de ne pas renouveler l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) de l’herbicide vigne Pledge/Rami, et fixé deux dates butoir, 6 juin 2025 et 6 juin 2026, pour la vente et pour l’utilisation des produits. Les pépiniéristes ont appris la nouvelle dans Vitisphere et se désolent du peu de temps qui leur est laissé pour revoir leur itinéraire technique. « Nous sommes prêts à faire évoluer nos pratiques pour plus de durabilité et nous avons déjà testé plusieurs alternatives à la flumioxazine par le passé, mais jusqu’à présent aucune ne s’est montrée satisfaisante, explique Christophe Raucaz, nouveau président de la fédération française de la pépinière viticole (FFPV). Les autres molécules n’ont pas un spectre assez large et les enherbements courts n’empêchent pas les adventices de se propager au sol au détriment du porte-greffe dans les parcelles de vignes mères. Aujourd’hui nous sommes dans une impasse. Nous avons besoin de plus de deux campagne pour faire de la recherche et remettre en place des essais, par exemple sur la conduite en vignes hautes », insiste-t-il.
Sans délai supplémentaire, les pépiniéristes sont certains de subir d’importantes baisses de rendement. Le travail de récolte des boutures va aussi se compliquer. « Il va être très difficile pour le personnel de tirer les sarments en janvier s’ils sont pris dans la végétation », anticipe le président de la FFPV. L’enjeu est également sanitaire. Sans Pledge/Rami, Christophe Raucaz a peur que les pépiniéristes aient du mal à bien pulvériser les insecticides obligatoires contre la flavescence dorée. Il finit par pointer la distorsion de concurrence créée par la décision de l’Anses avec les pays voisins, comme l’Italie, l’Europe ayant accordé le droit d’utiliser la flumioxazine comme désherbant de pré-levée ou de post-levée précoce avant le débourrement de la vigne jusqu'en 2037.
Le désherbage mécanique étant presque impossible dans les vignes mères de porte-greffes, « risquant d’écraser les sarments et les bois dès que la végétation se développe », le président de la FFPV déplore l’absence de consultation des pépiniéristes par les pouvoirs publics et espère obtenir une dérogation temporaire à l’interdiction, le temps de trouver des solutions.
Chez Mercier, qui, malgré le surcoût à la plantation et la baisse de rendement, a fait le choix depuis plusieurs années de palisser la plupart de ses champs de pieds mères de porte-greffes pour éviter la contamination du bois par la bactérie du sol Agrobacterium vitis et les champignons telluriques, et homogénéiser la qualité des boutures, et peut donc mulcher ou bâcher l’inter-rang, l’inquiétude porte surtout sur l’entretien des parcelles de jeunes plants plantés en mai. « Ce ne sont que des baguettes, sans racines, pour lesquelles la moindre concurrence avec l’herbe peut être fatale. Sans herbicides, la seule solution pour les protéger est de passer la binette tous les jours, avec un coût conséquent, notamment lors des années pluvieuses, qui peut remettre en cause l’équilibre économiques des exploitations », prévient Olivier Zekri, directeur adjoint et responsable R&D du groupe.