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Lutte contre l'esca : une bataille loin d’être gagnée
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Dépérissement
Lutte contre l'esca : une bataille loin d’être gagnée

Taille respectueuse des flux de sève, curetage, recépage : ces méthodes ont fait leur preuve dans la lutte contre l’esca. Pourtant, selon les experts des maladies du bois, elles peinent à s’imposer sur le terrain.
Par Pauline Orban Le 25 novembre 2024
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Lutte contre l'esca : une bataille loin d’être gagnée
« En Centre-Loire, en vingt-cinq ans, on a divisé par deux l’incidence de l’esca, affirme François Dal, conseiller viticole au Sicavac, à Sancerre - crédit photo : DR
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 En Centre-Loire, en vingt-cinq ans, on a divisé par deux l’incidence de l’esca, affirme François Dal, conseiller viticole au Sicavac, à Sancerre. Au début des années 2000, on arrachait entre 300et 350pieds dans les vignes plantées à 6 500pieds/ha. Soit près de 5 % de pieds malades chaque année. Aujourd’hui, la majorité des vignerons comptent moins de 2 % de symptômes dans leur parcelle. »

Ces viticulteurs disposeraient-ils d’une solution miracle ? « Ils s’appuient surtout sur un panel de méthodes de lutte préventives, qui va de la préparation du terrain à la plantation et la taille respectueuse de la vigne, en passant par le choix de greffons de qualité. Le respect du flux de sève et la formation lente des pieds de vigne sont fondamentaux dans leur longévité. En 1936, en appellation Sancerre, un pied entrait en production au bout de huit ans. Aujourd’hui, le délai est de trois ans, avec des tailles allongées et des techniques qui permettent de produire plus vite, mais qui mettent en péril la longévité de la vigne. »

Curatif autant que préventif

Si, dans l’ensemble, François Dal constate une diminution de l’incidence de l’esca, cela ne se semble pas être le cas dans les parcelles âgées de 12à 25ans, période de la vie du végétal où il est le plus sensible à cette maladie. « Dans cette tranche d’âge, le pourcentage de pieds atteints évolue peu, confie le conseiller viticole. Tout simplement parce que la taille ne fait pas tout. Il faut aussi optimiser les réserves de la plante. Les divers stress – déficit ou excès de rendement, gel printanier, stress hydrique, carence en potasse… – fragilisent la plante et favorisent l’esca. Cette maladie doit être traitée de manière multifactorielle, et pas seulement de façon préventive. La lutte curative, qui passe par le curetage ou le recépage, est tout aussi importante. »

« En Alsace, l’incidence de l’esca a tendance à baisser légèrement depuis une dizaine d’années, rapporte Céline Abidon, ingénieure viticole et directrice du pôle Alsace à l’IFV. En 2023, notre observatoire relevait 5à 6 % de pieds exprimant des symptômes. Mais en 2024, ces symptômes ont explosé, touchant près de 10 % des pieds de gewurztraminer et 15 % des pieds de riesling. En cause le dérèglement climatique, qui accélère le dépérissement des pieds, mais aussi le manque de dynamisme des vignerons à mettre en place les méthodes de lutte. Et pourtant, ceux qui s’y attellent parviennent à réduire de moitié l’incidence de l’esca sur leurs parcelles. Il faut certes cinq ans en moyenne avant que d’en constater l’effet, mais rien qu’avec une taille respectueuse des flux de sève, les pieds gagnent en vigueur dès la première année. »

Des solutions peu pratiquées

Outre la taille respectueuse, Céline Abidon préconise le recépage et le curetage. Pour s’y mettre, elle conseille de sélectionner une ou deux parcelles qui expriment pour la première fois des symptômes foliaires, et de recéper ou de cureter tous leurs pieds de manière préventive. « Le choix entre curetage et recépage dépend de la capacité des pieds à produire des bourgeons sur le vieux bois. Autant il est très facile de recéper un gewurztraminer jeune et vigoureux, autant c’est quasiment impossible sur un vieux riesling. Dans ce second cas, mieux vaut opter pour le curetage. Mais c’est un travail long et fastidieux, d’une grande technicité, qui en freine plus d’un. Le curetage peut prendre jusqu’à 15minutes par pied. Ça a un coût, forcément. »

Dans le Bordelais, où les dernières observations recensent près de 14 % de pieds manquants ou morts du fait de l’esca, la lutte peine à s’enclencher, comme en Alsace et pour des raisons similaires. « La taille respectueuse du flux de sève est très peu pratiquée, souligne Coralie Dewasme, ingénieure d’étude en viticulture à Bordeaux Sciences Agro. Par manque de formation des tailleurs, et parce que le turn-over du personnel est de plus en plus important. Le curetage n’est pas non plus d’usage. Cela nécessite de faire appel à un prestataire et coûte entre 5et 15 euros par pied, une dépense que peu d’exploitations peuvent se permettre dans la situation économique actuelle. Quant au recépage préventif, il est parfois difficile pour les vignerons d’accepter de couper un pied qui n’exprime pas encore de symptômes. De plus, les cabernets sauvignon âgés de plus de 15ans ne développent presque plus de pampres. Les vignerons se tournent donc davantage vers la complantation, même si les aléas climatiques de ces dernières années rendent délicate la reprise des complants. »

Face à l’esca, la lutte reste donc timide. « Les vignerons rêvent d’un traitement simple à mettre en œuvre, confie Céline Abidon. Mais on en est loin, très loin. »

 

Des cépages plus sensibles que d’autres

Dans le cadre du projet Climesca financé par le Plan national Dépérissement du vignoble, une équipe de l’Inrae a suivi l’expression de l’esca dans plusieurs parcelles en France, entre 2017 et 2023. « Nous avons constaté des différences de comportement selon les cépages, détaille Chloé Delmas, directrice de recherche à l’Inrae. Le merlot ou la syrah, par exemple, sont peu sensibles quel que soit leur environnement, ce qui n’est pas le cas du colombard ou du pinot noir, dont l’expression des symptômes varie selon la région viticole. » Cette étude confirme également des observations plus anciennes. « Nous remarquons que le chenin, le sauvignon blanc, l’uni blanc et le riesling sont parmi les cépages blancs qui expriment le plus de symptômes, avec une incidence annuelle moyenne supérieure à 5 %, complète l’experte. Et parmi les cépages rouges, les plus atteints sont le mourvèdre, le cabernet franc et le cabernet sauvignon. »

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Tous les commentaires (1)
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Paolo Le 02 décembre 2024 à 19:20:21
Bonjour, je suis viticulteur depuis 36 ans, je n'utilise pas d'insecticide et la seule année où j'ai eu des symptômes d'escas sur des mourvèdres ou des cabernets, cela faisait suite à un traitement insecticide. Cordialement.
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