endez-vous est donné ce mardi 10 décembre au Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux pour la deuxième réunion de travail entre les représentants de la filière des vins girondins (producteurs, négociants, courtiers…) et la grande distribution (enseignes individuelles et fédérations nationales). Après une première rencontre le lundi 8 avril dernier sous l’égide de la préfecture (qui organise sa cellule opérationnelle sur le vin le vendredi 6 décembre), les discussions reprennent huit mois plus tard alors que la situation économique de la filière bordelaise n’a cessé de se dégrader, et que des prix ont de nouveau défrayé la chronique lors des foires aux vins. « Il va falloir que l’on rentre dans le concret » résume Jean-Samuel Eynard, le président de la FDSEA 33, pour qui « il y a plus qu’urgence. Les vignerons sont à bout. A Bordeaux, on a été les premiers à prendre la vague. » Son espoir est « que l’on arrive enfin à trouver un niveau de valorisation qui permette de vivre à tout le monde dans la filière. Que l’on arrive à repositionner les vins AOC (on a encore vu les prix en Côtes-du-Rhône). Que le consommateur accepte de payer les produits agricoles à un prix rémunérateur, juste. Que l’on arrête avec le dumping permanent qui aboutit à des prix indécents. »
« Il est urgentissime de tirer la filière par le haut » confirme Philippe Tapie, le président de Bordeaux Négoce, qui ne participera pas à la réunion, mais sera représenté par ses vice-présidents. « On sera là pour défendre un prix minimum qui soit rémunérateur et surtout que l’on arrête de faire des ventes à perte : c’est illégal » pointe le négociant spécialisé dans les grands crus, qui compte « tout faire pour défendre nos intérêts et ceux de la viticulture : Bordeaux va faire corps. » Au-delà de la question essentielle du prix rémunérateur, « la réunion doit permettre de parler de la dynamisation du rayon vin. Il y a toute une collaboration à construire » évoque Stéphane Gabard, le président de l’AOC Bordeaux, qui souligne que face « aux grandes difficultés de la filière vin, il n’y a pas une solution miracle, mais plusieurs travaux à lancer pour avancer. Avec le commerce il faut améliorer la mise en avant, nous travaillons aussi avec les mandataires judiciaires, etc. »


L’un des objectifs de cette réunion est aussi de ramener de l’espoir dans les exploitations, le risque de la crise actuelle étant que des producteurs à bout basculent dans les actions violentes par désespoir. Le moral du vignoble étant particulièrement bas. « On est sans trésorerie. Il n’y a pas d’achat » résume Didier Cousiney, le porte-parole du collectif Viti 33, qui n’attend pas grand-chose de la réunion du 10 décembre : « les gens sont désabusés et résignés. Certains ne passeront pas la fin 2024. Cela fait 20 ans que l’on alerte sur le besoin d’arrachage et de valorisation. Rien n’a été fait, nous manifesterons jeudi prochain (le 14 novembre à Planète Bordeaux). Je ne vois pas ce qui va pouvoir nous sauver. C’est trop tard. »
« Le système entier n’est pas vraiment en mesure de répondre à un phénomène de récession généralisée. Avec un effondrement de la demande, les actifs ne valent plus rien » craint également Dominique Techer, le porte-parole de la Confédération Paysanne de la Gironde, pour qui « on est dans la spirale descendante. Il y a deux ans c’était Bordeaux qui était dans le dur, puis les Côtes et le Médoc, maintenant c’est Saint-Émilion et Pessac-Léognan. » Pour Dominique Techer, « on peut toujours discuter, mais Egalim est un outil de croisière pour un marché relativement équilibré. A partir du moment où il faut gérer la décroissance, il faut piloter le plan d’arrachage (en restructurant le foncier) et donner des perspectives agricoles différentes (entre diversité territoriale et spécialisations). » La réunion de travail du 10 décembre s’annonce animée.