ujet de compétitivité des exploitations pour les uns, de nivellement par le bas des salariés saisonniers pour les autres, le dispositif d’exonération des charges patronales pour Travailleurs Occasionnels et Demandeurs d’Emploi (TO-DE) a été vivement débattu ce mardi 29 octobre à l’Assemblée Nationale lors de l’étude du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (PLFSS). Pérennisé après des années de va-et-vient et relevé de 1,2 à 1,25 SMIC, le dispositif est complété dans ses effets par des amendements adoptés par les députés. La proposition portée par le gouvernement lève ainsi le risque de retirer les avantages donnés au TO-DE d’une main par l’autre (avec une hausse de 2 points du taux de la cotisation vieillesse de base pour les rémunérations au niveau du SMIC qui a été dénoncée par les syndicats agricoles). De nombreux amendements, comme celui du député Dominique Potier (Meurthe-et-Moselle, Parti Socialiste), ouvrent l’exonération aux Coopératives d’Utilisation de Matériel Agricole (CUMA), suivant une demande de leur fédération nationale (FNCUMA).
Sujet plus discuté, voire disputé, celui de la conditionnalité de TO-DE. Si l’amendement conditionnant de bonnes conditions de logement a été retiré en séance (après avoir été adopté en commission), il semble que cela soit parce que ses porteurs, les députés la France Insoumise, se soient concentrés sur la suppression du TO-DE (totalement ou progressivement*). Portant un amendement conditionnant le bénéfice du TO-DE à l’engagement d’« un jour de repos hebdomadaire et de respecter un socle minimum de conditions de travail dignes, précisées par décret après avis de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail », le député Arthur Delaporte (Calvados, Parti Socialiste) évoque en séance l’objectif « d’une part, respecter évidemment des conditions minimales de travail décentes et en assurer le contrôle, puisqu’on a évoqué notamment le cas – cela m’a marqué – de quatre travailleurs saisonniers décédés en septembre dernier dans les vignes de Champagne - d’autre part, respecter le droit au repos hebdomadaire ». L’élu socialiste dénonçant que « le gouvernement a pris, en juillet dernier, un décret qui permet aux entreprises agricoles de s’exonérer, en particulier en Champagne, de l’obligation du jour de repos hebdomadaire. Je pense, quant à moi, qu’il faut conditionner le bénéfice du dispositif TO-DE au respect du jour de repos hebdomadaire, qui est un principe fondamental du droit du travail ».


« J’entends vos arguments, mais c’est mal connaître l’agriculture et vouloir lui imposer une forme de bureaucratie » réplique le député Yannick Neuder (Isère, les Républicains). Défendant un « avis très défavorable », le rapporteur général de la commission des affaires sociales rejette « cette paperasse chronophage qui ne rapportera rien aux agriculteurs » et estime que « votre mesure induirait pour les agriculteurs beaucoup de paperasse, alors qu’ils en souhaitent moins, pour plus d’efficacité ». Un avis partagé par la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, et le député Jean-René Cazeneuve (Gers, Ensemble pour la République). Pour ce dernier, l’outil TO-DE « est absolument vital pour nombre de nos productions agricoles, en particulier celles qui utilisent beaucoup de main d’œuvre, comme la viticulture » et l’amendement socialiste « [sème] le poison de la suspicion [sur le respect du droit du travail] autour des agriculteurs, et je ne peux pas le supporter. S’il vous plaît, ne compliquez pas la vie des agriculteurs ! »
« Nous ne mettons pas globalement en cause les agriculteurs mais pointons les cas où les conditions de travail peuvent être problématiques » répond Arthur Delaporte, ajoutant que « la suppression de l’obligation du jour de repos hebdomadaire au nom de l’assouplissement du droit du travail, elle provient d’un décret et donc du gouvernement. Là non plus, ce n’est pas la faute des agriculteurs mais celle de l’État, qui ne remplit pas son rôle en ne protégeant pas les intérêts et la santé des travailleurs. » Le député normand estimant que « rien ne doit empêcher les contrôles et la suppression des exonérations si le droit du travail n’est pas respecté. Contrairement à vous, nous défendons la conditionnalité des aides de l’État, et c’est ce que nous proposons ici, notamment pour protéger la santé. »
Adoption
L’amendement est adopté à 117 voix pour et 100 contre, causant de « vives exclamations sur les bancs du groupe Ensemble Pour la République » d’après le compte rendu de la séance. « Arrêtez de râler ! Vous n’aviez qu’à gagner les élections ! » réplique le député Antoine Léaument (Essonne, la France Insoumise).
* : D’après l’exposé de l’amendement, « promise en réaction à la mobilisation des agriculteurs, cette mesure est inefficace et malhonnête » et « la France insoumise s'oppose à l'exonération TO-DE et propose qu'elle soit éteinte progressivement afin de financer un véritable soutien au monde agricole : prix planchers pour garantir un revenu décent aux paysans, limitation des marges de la grande distribution, relocalisation des productions et développement des circuits courts, arrêt des traités de libre-échange qui mettent en péril l’agriculture française, sortie planifiée des pesticides, soutien financier à la conversion du secteur par les aides directes, désendettement massif des exploitations, etc. »