Boutique éphémère

Le succès des ventes de vin en gare TGV

e 4 septembre, 11 h 30 à la gare TGV d’Avignon (84). Tandis que des voyageurs attendent leur train, Odile Couvert, propriétaire du domaine de l’Odylée situé à Violès (84), garnit le stand qu’elle tient dans le hall de la gare, juste en face de l’espace de restauration. Elle dépose ses blancs et ses rosés dans de belles vasques transparentes qui attirent l’œil. Puis elle dispose les magnums sur des caisses en bois, ses bouteilles sur son comptoir ainsi que dans les petits présentoirs au fond du stand. Une présentation du plus bel effet ! Elle met aussi en place un choix pointu de produits du terroir : miels, calissons, nougats, confitures, biscuits sucrés et salés, terrines… Elle a même des glaces en bâtonnet ! « Les produits locaux, ça marche toujours fort ! », affirme cette vigneronne qui a un sens inné de la mise en scène de ses produits.

Crédit photo : Chantal Sarrazin

Conçu par une designer, son stand en bois clair, sobre et élégant, reste en place du 1er mai au 30 septembre et s’intègre parfaitement dans cet immense espace tout en longueur qu’est le hall de la gare TGV d’Avignon. Une grande photo en noir et blanc de la vigneronne capturée dans l’intimité de sa cuverie complète le décor. « Mon idée, c’est de recréer l’atmosphère conviviale d’un caveau de dégustation », explique Odile Couver, qui exploite 15 ha en appellation Côtes-du-Rhône. Ici, elle propose la quasi-totalité de ses vins au prix du caveau : une dizaine de bouteilles de rouges, blancs et rosés, allant de 14 à 25 €, des Bib de trois litres de rosés et de blancs (25 et 35 €) et son huile d’olive.

Odile Couvert a ouvert cet espace pour la première fois en 2020. Depuis, elle loue l’emplacement tous les ans à la SNCF pour cinq mois : du 1er mai au 30 septembre. Elle reste discrète sur le montant du loyer, mais rappelle que le chemin pour en arriver là n’a pas été simple. « J’ai répondu à un appel d’offres en 2019, explique-t-elle. Au début, je n’ai pas été retenue. J’ai dû m’y prendre à plusieurs reprises. Finalement, mon obstination a payé. J’ai fait valoir l’ancrage local de mon domaine et j’ai soumis un plan en 3D du stand que je voulais installer. C’est ce qui a fini par convaincre la SNCF. » Et force est de constater que son petit coin de terroir crée de l’animation dans cette gare isolée et dépourvue de boutiques.

La vente se déroule comme sur un salon : en faisant déguster. La vigneronne a installé une réserve et un réfrigérateur au fond de son stand pour servir les vins à bonne température. « La clientèle est très variée, raconte Odile Couvert. Je vois passer des touristes du monde entier : Américains, Canadiens, Japonais, Belges, Allemands, etc. Mais aussi des locaux qui viennent chercher ou déposer des proches à la gare ou tout simplement prendre leur train. » Quelques professionnels – sommeliers ou importateurs en villégiature dans la région – l’ont aussi découverte ici.

Ce qui se vend le mieux ? Les magnums de rosés, les Bib, pratiques car incassables et faciles à transporter, les bouteilles à l’unité, les valisettes de trois flacons panachés. « Les gens achètent surtout pour offrir à leurs hôtes ou pour remercier la personne qui a gardé leur chat ou arrosé leurs plantes pendant les vacances », sourit la productrice. Mais ce qui fait un tabac, c’est la vente du vin au verre à 5 € accompagné de bouchées apéritives. Succès assuré à l’heure de l’apéro : entre 11 heures et midi, et à partir de 17 heures. Les clients dégustent au comptoir ou sur la terrasse à l’extérieur.

Cette clientèle diversifiée lui a inspiré des nouveautés : « Beaucoup de touristes étrangers me réclamaient des “sparklings”. Alors, j’ai lancé des vins effervescents : un blanc il y a deux ans, un rosé l’an dernier et un rouge cette année. » Autre innovation née de cette expérience en gare, un rouge pétillant, conditionné dans des bouteilles de 25 cl fermées par des capsules à vis bleu et rouge, vendu 4 € l’unité. Clin d’œil au JO 2024, Odile Couvert a baptisé cette création « Bleu, Blanc, Bulles ». « Ça a très bien marché, se félicite-t-elle. En voyage, les gens préfèrent transporter des petits flacons. » Un rosé pétillant est d’ores et déjà dans les cartons pour l’an prochain.

Après quatre années d’existence, ce stand contribue fortement aux ventes du domaine. Odile Couvert, qui vend 70 % de sa production de 90 000 cols auprès des particuliers, y réalise 20 % de son chiffre d’affaires annuel. Le panier moyen se situe entre 20 et 25 €. En outre, la fréquentation et les achats sont réguliers, contrairement au caveau où ils sont plus aléatoires. Satisfaite des ventes, la vigneronne souhaite ouvrir d’autres emplacements en gare. Elle a ainsi fait des démarches auprès d’Eurostar dans le but de tenir un stand à Paris.