’est une profession de foi : « je pense que dans ces moments difficiles pour la production et les marchés, les courtiers en vins et spiritueux doivent continuer à accompagner au mieux les producteurs et les négociants avec professionnalisme, discrétion, empathie, indépendance et avec une éthique élevée » pose dans son discours Jérôme Prince, le président de la Fédération Nationale des Syndicats de Courtiers en Vins et Spiritueux de France, à l’occasion de son soixante-huitième congrès national (ces 23-25 mai en Provence). Alors que de plus en plus de vignobles sont en tension, le président des courtiers bourguignons met les pieds dans le plat face aux déstockeurs et autres profiteurs de crise : « quoi de plus facile dans ces moments difficiles de brader les vins, de faire du catastrophisme, d’entrainer toute une production vers le bas, comme on peut le constater ici et là, avec des intermédiaires arrogants qui n’en ont rien à faire de l’avenir de la filière et qui ne sont que de passage… Et qui voient dans les difficultés ou la prospérité du vignoble la manière de faire du business de bas niveau. » Un rappel de la mission du courtage pour que son usage reste la norme dans la filière vin.
Alors que la rémunération des vins a marqué l’hiver, avec des manifestations et diverses annonces sur la relance d’une révision de la loi Egalim ou la création de prix plancher, « dans cette crise globale de l’agriculture que nous connaissons, on devrait bien sûr prendre du recul et ne pas faire n’importe quoi ! » s’exclame Jérôme Prince, pour qui « les lois Egalim 1 et 2 ont été pensées pour le lait et la viande. Et pas du tout pour le vin. » Ne croyant pas dans l’intérêt d’un Egalim 4 pour revaloriser les cours du vin, le président des courtiers note que « le monde agricole veut une simplification administrative, mais veut imposer une complexité via le recours aux lois qui rendent une simple affaire digne de l’œuvre de Kafka… Prix minimum, prix plancher, offre préalable écrite avec préavis, refus écrit ou réserve motivée par écrit de l’acheteur, indicateurs de coûts de production, indicateurs de marché etc… »


Dans l’immédiat, « nous demandons à ce que l’on écoute notre bon sens et notre expérience, et que l’on cesse de prendre peur à la première décision d’un tribunal esseulé qui n’avait que la loi comme vecteur de décisions » s’exclame Jérôme Prince, lui-même président du tribunal de commerce de Beaune, faisant référence à l’arrêt du tribunal de commerce de février dernier, condamnant pour prix abusivement bas deux négociants, l'affaire Rémi Lacombe. « On ne prend pas toujours soin de se défendre sérieusement et on préfère accuser les jugements des tribunaux qui n’ont d’autre choix que de prononcer des sanctions faute de recevoir des moyens juridiques solides des parties » grince le président des courtiers, confirmant qu’« il est possible que nous fassions une intervention volontaire à la Cour d’appel de Paris ». La Fédération Nationale des Syndicats de Courtiers en Vins et Spiritueux de France défendant une « jurisprudence constante » qui « reconnait notre mandat d’intérêt commun et notre seule signature sur le bordereau de confirmation d’achat qui rend la vente parfaite, ce qui a d’ailleurs été confirmé une nouvelle fois par le jugement de Bordeaux. Pourquoi cet usage qui fonctionne parfaitement ne serait-il pas reconnu dans notre prise d’échantillon, d’information des cours et de proposition du prix réclamé par le vendeur ? »
Pour Jérôme Prince, la balle de la revalorisation des vins est d’abord dans le camp de la filière avant d’être réglementaire ou judiciaire : « l’exemple du changement de stratégie de la Champagne passant d’un vin de dessert à un vin d’apéritif et festif est une réussite qui démontre que l’on peut le faire avec succès ». Alors que « certains vignerons sont réfractaires à tout cahier des charges proposé par des négociants. Sachons écouter ce que veut le marché ! » poursuit le courtier, pour qui « sans dire que tout est simple, nous constatons que certains vignobles sont en manque d’objectifs et de stratégie face à cette réalité et cette transformation ultra rapide de ce monde d’aujourd’hui ».