n attendant le rapport complet de Wine Australia d’ici quelques semaines, c’est le ministre australien du Commerce et du Tourisme Don Farrell qui a annoncé la bonne nouvelle le 12 juin dans un communiqué de presse. « En un mois, depuis la levée des droits sur les vins conditionnés, l’Australie a exporté des vins de qualité d’une valeur de plus de 86 millions AUD [soit 54 M€] vers la Chine », s’est félicité le ministre, ajoutant : « Plus de 350 producteurs et entreprises australiens ont ré-établi leurs exportations vers la Chine continentale depuis la levée des droits ». Son enthousiasme est corroboré par le dernier rapport mensuel de la société de courtage Ciatti, qui évoque « une multiplication par sept » des expéditions australiennes en avril 2024 par rapport au même mois de l’année dernière, chiffrant les volumes mensuels à 462 518 litres, soit 10,52% des importations chinoises (contre 1,45% en mars). Reste à savoir si cette poussée volumique se traduira par des ventes en hausse ou servira plutôt à abonder les stocks.
Diversification des marchés
De son côté, le géant Treasury Wine Estates – propriétaire de la marque iconique Penfolds – a confirmé « le sentiment d’un nouvel élan sur le marché depuis que la Chine s’est ouverte de nouveau ». Sans pour autant chiffrer cette dynamique. Il faut dire que la société avait mis en place des stratégies pour tenter d’atténuer l’impact de cette décision chinoise catastrophique pour les exportateurs australiens. TWE avait notamment continué à commercialiser son portefeuille de vins du monde en Chine, développant son offre de vins français entre autres, et s’était implanté dans le secteur vitivinicole chinois pour continuer à asseoir la notoriété de ses marques. « A l’instar de la feuille de route que nous poursuivons en France, nous continuons à explorer de nouvelles opportunités de vinification en Chine, y compris en investissant dans des possibilités d’approvisionnements et de production locaux pour soutenir des perspectives de croissance de notre portefeuille à l’avenir », a souligné le directeur de Penfolds, Tom King. De son côté, le PDG de TWE, Tim Ford, a estimé que l’entreprise émergeait de la période des droits de douane punitifs « plus forte et plus diversifiée sur le plan mondial, avec tous les outils à notre disposition pour maximiser les opportunités de croissance à long terme offertes par la Chine ». L’allusion à la nécessaire diversification des activités et à la reprise progressive du marché chinois est claire.
Chat échaudé… ?
Globalement, les exportateurs australiens – tout en se réjouissant de cette bouffée d’oxygène salutaire apte à réduire leurs excédents de vins rouges – se font peu d’illusions. Certaines études montrent que la consommation chinoise de vin a entamé une spirale à la baisse vers 2018, avec peu d’espoir de renouer avec les niveaux d’avant (7% de la consommation mondiale en 2017). Bon nombre d’opérateurs australiens expriment un « optimisme mesuré » « sans aveuglement », ne croyant pas à la « panacée absolue » et constatant que d’autres fournisseurs « se sont installés à leur place » ces trois dernières années. Certains observent par ailleurs une orientation vers l’entrée de gamme opérée sur le marché chinois, et tous s’accordent sur le ralentissement de l’économie chinoise. D’autres marchés du Sud-Est Asiatique – la Thaïlande, Singapour, Hong Kong, la Malaisie et les Philippines par exemple – apparaissent désormais comme plus porteurs. D’ailleurs le gouvernement australien a annoncé une enveloppe financière de 3,5 millions AUD (2,2 M€) pour faire face à la surproduction de vins rouges en diversifiant les marchés, tout en apportant des données plus précises pour aider les producteurs à prendre des décisions avisées (avec notamment la création d’un registre viticole national attendu depuis longtemps) et en développant des produits alternatifs et l’oenotourisme.