a coopérative de Buzet semble être en pleine ébullition. Après l’annonce en février du licenciement économique de Pierre Philippe, directeur depuis 20 ans de la cave, voici que son conseil de surveillance vient de démissionner cette fin mars. Quelle est la situation alors que vous prenez la présidence ?
Nathalie Roussille : La cave de Buzet est à l’image de la société. Elle vit, elle évolue, ce qui peut faire apparaître des divergences. Nous rentrons dans une nouvelle ère avec un directeur qui s’en va et une nouvelle équipe* qui arrive avec la volonté de s’impliquer davantage dans la cave, avec une direction moins pyramidale et plus horizontale avec les équipes et les adhérents. Tout le monde attend plus de transparence. Le contexte viticole est ce qu’il est, nous souhaitons apporter notre pierre à l’édifice. L’assemblée générale du 6 février a vu arriver deux nouveaux membres au conseil de surveillance (dont moi). J’ai toujours évolué à Buzet, je suis du cru. J’avais envie de m’impliquer.
Quel est votre vision de la situation économique de la cave et de ses adhérents ? Faut-il arracher de la vigne pour restructurer le vignoble face à la déconsommation de vin rouge ?
Nathalie Rousille : Je dirais que la solution est un mix de tout ça. Il n’y a pas d’objectif de grande politique d’arrachage. Nous avons l’espoir de nous développer et de garder un maximum de viticulteurs, même si les départs sans succession impliquent une réduction. Des surfaces. Des réflexions sont en cours sur la diversification de gamme. Nous avons l’impression de pouvoir aller vers de bas degrés, vers du premium…
Prévoyez-vous des inflexions stratégiques concernant les orientations de développement durable (parcelle New Age sans intrant par exemple) ou d’activité de négoce à Cahors (avec Rigal racheté à AdVini) ou de distribution (avec les partenariats Cordier en France et AdVini à l’export) ?
Nous restons sur la même stratégie, sans modifier ces sujets. Nous œuvrons depuis lnogtemps dans cette voie durable et investissons tous dans de nouvelles techniques. Ça fait partie de notre ADN et de notre force. Nous allons continuer pour garder notre avance et aller plus loin pour moderniser notre image. Cela fait partie notre volonté, assoir notre position dans le Sud-Ouest, avec une offre de Buzet et de Cahors.
Quelle est votre feuille de route en tant que présidente ?
Mon objectif premier, et ultime, c’est de garder une cave de vignerons dans ce marasme économique. Nous devons essayer de résister avec tout ce que nous mettons en place pour se renouveler et être demain encore présents sur le territoire. Notre objectif est de rester le fleuron du département. Ce n’est pas une mission, nous sommes viticulteur, c’est notre vie. Nous voulons pouvoir transmettre nos domaines à nos enfants. Tout est mis en place pour que ça perdure. Il va falloir être innovant, se réinventer : on a envie et on va se battre.
Dans ce combat, allez-vous vous doter d’un nouveau directeur général ?
Peut-être pas un directeur général. Ça peut être un coordinateur, un manager sur des missions spécifiques. Nous sommes à l’écoute des personnes en fonction.
Alors que le sujet n’est jamais évoqué quand un élu de la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FDSEA) prend la présidence d’une cave coopérative, votre implication dans la Coordination Rurale du Lot-et-Garonne (CR 47) aliment des craintes de politisation de la cave de Buzet ou de gestion défaillante comme la Chambre d’Agriculture du Lot-et-Garonne**, dont vous êtes vice-présidente. Entendez-vous et comprenez-vous ces appréhensions ?
Je l’entends, je suis une personne assez ouverte. Mais je trouve que l’amalgame n’a pas lieu d’être. Je suis légitime. Nous sommes des vignerons de tous bords, on ne se pose pas cette question. Le président du directoire n’est pas affilié CR47, des personnes parties en faisaient partie.
Comment expliquer alors ces critiques ?
Il y a eu certaines divergences, des frustrations, qui font certaines oppositions. Maintenant on essaie de calmer tout ça, d’avancer, de défendre la viticulture.
* : Souhaitant impliquer davantage le conseil complet dans la gouvernance en transparence, l'équipe de Buzet est constituée d'un directoire avec François Philippe de Royer Dupré (président), Immaculada Rosa et Stéphane Rufoni. Le conseil de surveillance accueille Nathalie Roussille (présidente), Chantal Pozzoli (vice-présidente), Jean-Michel Laffon, Jean-Michel Gasson, Maxime Escarmant et Sébastien Roumat.
** : Récemment publié, le rapport de la cour des comptes sur la gestion 2015-2023 de la Chambre d’Agriculture du Lot-et-Garonne émet notamment des critiques sur le fonctionnement des instances incluant des personnes non-élues, la gestion jusqu’à début 2023 de la structure sans directeur, des vagues de départs dans le personnel, des irrégularité dans les activités…
De gauche à droite : Sébastien Roumat, Chantal Pozzoli, Jean-Michel Laffon, Jean-Michel Gasson, Nathalie Roussille, Maxime Escarmant, Stéphane Ruffoni, Immaculada Rosa, François-Philippe de Royer Dupré. Photo : Les Vignerons de Buzet.