ien que les produits soient en hausse dans le vignoble du Beaujolais, la performance économique des exploitations du beaujolais suivies par le CerFrance est en recul. L'organisme présentait début mars l'édition 2024 de Vitiscopie en Beaujolais, qui synthétise les résultats économiques d'un échantillon de domaines viticoles suivis d'année en année.
L'analyse doit être prudente puisque l'échantillon consolidé a tendance – involontairement- à retenir des exploitations plus performantes que la moyenne. « Mais davantage que les valeurs absolues, il faut regarder la tendance, qui est générale », affirme Damien Raffin, responsable du conseil au CerFrance Rhône et Lyon.
Les 136 exploitations affichent des produits en hausse sur l'exercice 2022/2023 grâce à un rendement moyen en progression de 2 hl/ha et à une revalorisation des prix du vrac et des bouteilles. Les produits courants ont crû de 8 %, mais l'ensemble des charges a augmenté de 13 %. Bilan : l'EBE recule de 6 %, entraînant dans sa chute le revenu disponible qui passe de 81 000 € à 74 000 € par exploitation (61 000 € par UTH familial). La marge d'orientation qui permet de faire face aux besoins financiers de l'entreprise (autofinancement et trésorerie) baisse aussi, mais pour la seconde année consécutive, elle reste positive même pour les 25 % d'exploitations les moins performantes.
Si le Beaujolais ne renoue donc -heureusement- pas avec la crise, l'inflation sur les moyens de production vient ternir un peu l'embellie de ces dernières années.
Dans le coût de production global, passé de 301 à 320 €/hl en moyenne, c'est le coût de la main d'oeuvre salariée qui a le plus flambé (+10 €/hl), suite à la revalorisation du Smic. « De plus, les cotisations sociales des exploitants ont augmenté du fait des bons résultats des années précédentes », ajoute Damien Raffin. Finalement, les charges opérationnelles sont assez stables et le poste mécanisation n'augmente que d'un euro par hecto.


Un constat est invariable : les meilleurs résultats économiques s'expliquent par le rendement et la maîtrise des charges. « Les deux sont d'ailleurs liés puisque le rendement dilue les charges, reprend l'expert. Or chez les 25 % d'exploitations les plus performantes, le rendement est de 56 hl/ha contre 43 hl/ha pour le quart inférieur. Ni la surface exploitée, ni les appellations ne jouent sur les résultats. En revanche, la maîtrise des coûts de production, en particulier la mécanisation, explique une grande partie des écarts de rémunération. » Les plus performants vendent aussi leurs bouteilles en moyenne 0,77 € plus cher que le quart moins performant.
Quant au mode de commercialisation, il n'a pas l'influence habituelle. « L'année est atypique car les vendeurs en bouteille s'en sortent moins bien, observe Damien Raffin. Ils ont davantage subi l'inflation car le prix de la bouteille n'a pas tout compensé. Le cours du vrac a augmenté plus rapidement en réaction à l'inflation. » De fait, le prix des bouteilles n'a pris que 5 % en moyenne, contre 24 % en moyenne pour le vrac. Quant aux coopérateurs, ils tirent leur épingle du jeu cette année, avec un EBE en hausse de 23 %. « Ils bénéficient avec retard de la revalorisation des ventes sur 2021/22, note Damien Raffin. En plus, ce sont des systèmes moins consommateurs de main d'oeuvre et de matières premières : leur coût de production moyen s'est établi à 174 €/hl au lieu de 320 €/hl pour la moyenne de l'échantillon. »