n vigneron ne crève pas la bouche ouverte sans se battre"
Ardèche, Aude, Drôme, Gard, Gers, Hérault, Pyrénées-Orientales, Tarn, Var, Vaucluse... Ce 25 novembre, le grand Midi viticole s’est réuni nombreux pour marcher dans les rues de Narbonne. En car ou par leurs propres moyens, 6 000 viticulteurs et sympathisants du monde rural dans son ensemble, (6 000 selon l’organisation, 4 000 selon la préfecture) ont répondu à l'appel du syndicat des Vignerons de l'Aude (SVA) pour envahir la place de l'hôtel de ville et arpenter dans une ambiance pacifique les grands axes de la sous-préfecture audoise, au son des bombes agricoles, des pétards, sans déplorer le moindre débordement. Si 300 viticulteurs avaient trouvé refuge en 1976 dans la cathédrale Saint-Pierre sous la protection de l’évêque de Montpellier, cette fois c’est monseigneur Bruno Valentin, évêque du diocèse de Carcassonne et Narbonne qui s’est joint à la foule pour appuyer la population viticole et rurale de son soutien. Tous les représentants syndicaux régionaux et de nombreux présidents de chambres d’agriculture garnissaient les premiers rangs, aux côtés des nombreuses écharpes tricolores des élus de la république des territoires viticoles d’Occitanie.
14h20 : une délégation de représentants syndicaux a été reçue par le préfet
Aux côtés du président du syndicat des Vignerons de l'Aude Frédéric Rouanet, le président des Vignerons indépendants de France Jean-Marie Fabre, des Vignerons coopérateurs d'Occitanie Ludovic Roux, des Jeunes agriculteurs de l'Aude, Fabien Mariscal, et de la FNSEA, Jérôme Despey et Guilhem Vigroux, ont rappelé durant une vingtaine de minutes aux préfet et sous-préfet de l'Aude le besoin urgent de réponses rapides aux revendications exposées en amont de la manifestation

14h45 : La place de l'hôtel de ville de Narbonne est pleine comme un oeuf
Déjà, les pétards agricoles résonnent sur la place du centre de Narbonne.
Aux premiers rangs, les nombreux élus des territoires viticoles arborent leurs écharpes tricolores
15h : Fabien Mariscal, Jérôme Despey et Frédéric Rouanet se succèdent à la tribune
Le président des JA audois Fabien Mariscal prend le premier la parole et n’hésite pas à dénoncer les successions de contraintes toujours plus fortes auxquelles sont soumis les vignerons. Il en profite pour adresser un tacle aux « escrologistes » et la « violence » de leurs charges à l’encontre d’agriculteurs qui ne demandent qu’à vivre de leur travail. En parallèle, « l’Europe nous annonce tranquillement que la disparition de la vigne est acceptable ! Comment ne pas réagir sans violence ? » face à ces assauts répétés à l’égard de la profession vigneronne, tonne un président des JA audois habité et largement applaudi.
Derrière lui, Jérôme Despey rebondit sur l’attention particulière « à porter à ces jeunes agriculteurs qui sont l’avenir de la filière, mais plus fragilisés », avant de s’écorcher la voix en listant les éléments d’une crise « qui peut avoir de lourdes conséquences sur tout un pan de l’économie », et d’intimer le ministre de l’agriculture « d’agir vite ». Arrachage temporaire primé avec replantation différée, retraite anticipée, promotion à l’export, appel à la restauration de réfléchir à ses coefficients multiplicateurs sur les vins vendus… Jérôme Despey réitère les leviers qui pourront faire souffler l’économie des entreprises vigneronnes. Là encore, une attention toute particulière est portée « à cette clique d’activistes écolos qui devraient lâcher leurs téléphones et venir nous aider à désherber à la pioche ! Ils sauraient ce qu’est la vraie fatigue et on leur offrirait une bonne soupe, un bon repas avec des bons fruits et légumes de notre production… et un bon verre de vin ! », déclenchant les huées de la foule. Le besoin essentiel en eau, le pilier patrimonial que constitue le vin et le nécessaire « ajustement de prix du vin qui n’ont pas évolué depuis 15 ans » sont également rappelés par celui qui préside la chambre d’agriculture de l’hérault.
Vient alors le tour de Frédéric Rouanet, qui rappelle en préambule combien « la solidarité coule dans le sang de notre profession qui a toujours refusé de se soumettre », au cœur d’un lieu historique de la contestation viticole. Il le répète depuis des mois, « le prix du vin est indécent », au regard de tant « d’efforts de qualité, d’engagement environnemental, d’endettement lourd qui ne sont pas récompensés par une rémunération à la hauteur ». La crise frappe sans distinction dans les rangs vignerons mais « Emmanuel Macron ne doit pas prendre notre patience pour de la faiblesse ! », tonne le leader syndical audois, « car ce ne sont pas quelques mesures qui vont suffire, sans réponses fortes la colère contenue éclatera ! ». Fustigeant l’image rabaissée du vin en France « alors qu’il est affiché comme un fleuron dans bien d’autres pays, nous voulons que le vin soit considéré comme un produit de la nation ! ».
Frédéric Rouanet martèle combien aider la population viticole est la solution économique la moins coûteuse. « Un vigneron ne crève pas la bouche ouverte sans se battre ! Notre raison est celle de la justice sociale ! Jamais nous ne déserterons car fiers de ce que nous sommes !», lance-t-il avant d’engager la marche dans les rues de Narbonne.
15h45 : Le cortège se met en route
Précédés par les pétards agricoles, élus et représentants syndicaux mènent une longue foule à travers les artères de la ville.
Les pancartes résument les revendications vigneronnes, sans oublier le clion d'oeil à la déconsommation et l'hygiénisme
17h : La manifestation se disloque. Trêve syndicale pendant Sitevi
Au moment d’annoncer la fin de la mobilisation du jour, sur le parvis du théâtre de Narbonne, Frédéric Rouanet confirme une trêve syndicale pendant les 3 jours du salon Sitevi du 28 au 30 novembre à Montpellier. Le ministre de l'agriculture sera présent mercredi à Montpellier et rencontrera une délégation de représentants syndicaux. « A défaut d’avoir les moyens d’investir dans du matériel, nous irons voir les machines. Les fournisseurs de matériel sont nos partenaires et souffrent comme nous de la baisse d’activité », annonce Frédéric Rouanet. Alors qu’un vigneron a été interpellé pendant la manifestation, le leader syndical explique « qu’il a bien été relâché, nous pouvons disloquer dans le calme cette manifestation ».
Pendant que la foule se disperse, le président des Vignerons indépendants de France Jean-Marie Fabre souligne la réussite de cette mobilisation et attend une réponse « dès cette semaine » des pouvoirs publics pour répondre d'urgence aux difficultés de trésorerie. « Les causes sont multiples mais les solutions sont simples et connues, et couteront bien moins cher que la disparition d'un pan entier de notre secteur ». Un classement de la région en zone test vis-à-vis du changement climatique est également attendu.