ouvelle saison pour le sauvetage de la marque régionale Sud de France utilisée par les vins occitans. Le conseil interprofessionnel des vins du Languedoc (CIVL), la fédération des IGP Sud de France et l’union des entreprises vinicoles méridionales (UEVM) ont mandaté un cabinet d’avocats pour déposer un recours gracieux auprès du préfet de région Occitanie et du ministre de l’Agriculture le 18 septembre dernier, et dont a pu prendre connaissance Vitisphere. En fin d’été, à peine la décision d’abandon de la marque Sud de France pour les vins annoncée par le ministre, les défenseurs de la mention réaffirmaient déjà leur volonté de ne pas lâcher une identification pour laquelle ils ont travaillé pendant 16 ans. « Depuis l’annonce de la décision préfectorale et ministérielle de juillet dernier, nous avions deux mois pour déposer un recours, sans quoi l’interdiction d’apposition de la marque sur les bouteilles de vins aurait été définitive », résume le président de la fédération des IGP Sud de France Jean-Michel Sagnier.
Outre la demande de « convoquer dans les meilleurs délais une réunion en votre présence, avec l’ensemble des acteurs du dossier, de manière à ce que nous puissions vous exposer les difficultés du secteur, relativement à ce problème, et explorer ensemble le moyen de sortir par le haut de cette difficulté », l’objet principal du courrier est l’introduction d’un recours gracieux auprès du préfet, en contestation « de la décision du 18 juillet du Ministre de l’Agriculture et votre communiqué la relatant du 21 juillet ». Ce type de recours administratif est exercé pour contester une décision déjà rendue par l’administration publique et pouvant, selon les cas, être un préalable obligatoire à un recours contentieux devant les juridictions de l’ordre administratif.


Rappelant qu’au sens des entités ayant mandaté ce cabinet d’avocats, « des solutions existent, permettant de pérenniser l’usage de cette marque, et qu’il est par conséquent faux d’affirmer que son utilisation est irrémédiablement contraire à la réglementation », le courrier interroge en premier lieu la compétence matérielle de « la Préfecture coordinatrice de bassins ou du Ministre pour édicter une telle interdiction ». Le courrier énumère ensuite les arguments, juridiques, de contestation d’une décision qui « énonce une impossibilité définitive d’utiliser la marque sur les étiquettes, au regard notamment de la réglementation communautaire ».
Pour les contestataires, le régime des ‘unités géographiques’ précisé à l’article 55 §3 du règlement (UE) n°2019/33 « ne paraît pas opposable à la mention Sud de France, dès lors qu’elle ne fait référence à aucune zone précisément délimitée ». La notion renvoyant à un terroir, à son fort ensoleillement et à ses traditions, « elle ne correspond à aucune unité géographique identifiable ». Elle ne nécessite donc pas que les cahiers des charges des AOC et IGP concernées « aient prévu la possibilité de mentionner une unité géographique plus grand ou plus petite, puisqu’en l’occurrence il ne s’agit pas d’une unité géographique ».
D’autre part, le courrier souligne que l’utilisation de la marque Sud de France respecte les critères de l’article L. 711-2 du Code de la propriété intellectuelle. Le pouvoir évocateur de la marque la rend certes distinctive, mais ne constitue pas une indication de provenance, sans référence à une unité territoriale précise. Sud de France n’est de surcroît « en rien déceptive, puisque les vins sont bel et bien produits dans le sud de la France », ne trompant donc pas les consommateurs « sur la qualité, la nature ou la provenance du produit ».
L’introduction de ce recours gracieux demande donc au préfet Pierre-André Durant de « retirer la décision dans les meilleurs délais », pour permettre aux acteurs de « sécuriser leurs débouchés commerciaux ». Comme évoqué en fin d’été, la filière indique envisager toutes les voies de recours possibles, y compris contentieuses, pour garantir ses intérêts. Avec ce recours, les organisations professionnelles viticoles viennent de s'accorder un répit de deux mois supplémentaires avant de décider des suites à donner au dossier et un éventuel recours administratif. « Le préfet nous avait promis une réunion de concertation une fois les vendanges passées », rappelle Jean-Michel Sagnier. Et connaître ainsi le nombre d'épisodes qui composeront cette nouvelle saison de la série Sud de France ?
Iniitalement présentés parmi les signataires de ce recours gracieux introduit auprès du préfet de région, les représentants de l'ODG de l'AOP Languedoc n'ont finalement pas accepté de valider le document adressé. Les leviers juridiques présentés ne leur apparaissant pas adaptés pour ce recours.