Éric Chantelot : Tout se base sur la décision de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire) d’anticiper en février dernier le retrait européen de l’herbicide S-métolachlore en grandes cultures. Ce retrait par anticipation a conduit le ministère de l’Agriculture à mettre en place une procédure de concertation pour qu’il n’y ait plus de retraits causant des impasses techniques. Sur les 250 matières actives qui seront réévalués par l’Union Européenne dans les cinq ans, le ministère en a identifié 75 qui pourraient ne pas être réhomologuées ou l’être avec des restrictions.
Dans des réunions avec l’INRAE (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement) et les interprofessions (le Comité National des Interprofessions des Vins à appellation d'origine et à indication géographique, CNIV), la filière vin a identifié quatre problématiques avec des risques d’usages orphelins faute de solution alternative. Notre position est de ne pas travailler molécule par molécule, comme les services ministériels nous le demandent année après année, mais de répondre par usage. C’est l’accumulation des retraits successifs qui amène le vignoble dans le mur : il faut prendre en compte la globalité.
Quels sont les quatre stratégiques et les points critiques relevés par la filière ?
Le premier usage est la lutte contre le mildiou. Il y a un risque de retrait de molécules multisites (comme folpel et métirame), alors que toute la stratégie française contre le mildiou vise à éviter l’apparition de résistances en utilisant conjointement des molécules multisites et unisites. Il y a aussi un risque identifié sur le cuivre, dont on n’a aucune nouvelle alors qu’approche la fin du renouvellement de 5 ans et que cela pèse sur tous les viticulteurs bio. Toujours sur le mildiou, il y a une problématique de résistance comme il existe 8 modes d’action des molécules : s’il y a retrait de certains modes d’action et molécules, la pression sur les autres voies va augmenter et il y a un risque de résistance croissant du mildiou.
Demain, on risque d’avoir de plus en plus de millésimes comme 2023 pour le mildiou. Le risque de résistance pourrait se généraliser. La situation est critique pour le mildiou, la panoplie globale doit être maintenue faute d’alternatives. Toutes les solutions de biocontrôles connues, qu’elles soient homologuées ou en développement, n’ont pas l’efficacité suffisante en cas de forte pression.
Quels sont les autres risques stratégiques identifiés ?
Un autre usage concerne le black-rot. Il y a un fort risque de perte d’usage sur un mode d’action multisite (métiram de zinc voire, folpel…) et deux unisites (Strobilumines - QOI-P et molécules IDM type difénoconazole, fenbuconazole, myclobutanil, tébuconazole et tetraconazole). Même si le black-rot est une maladie secondaire, il y a un risque d’impasse totale : le soufre et le cuivre ne sont pas suffisants en cas de forte pression.
Le troisième usage porte sur la flavescence dorée. Il y a actuellement une forte pression sur les insecticides. Il reste un mode d’action et toute restriction poserait problème alors qu’il s’agit de traitement obligatoire et qu’il y a déjà un risque de résistance de la cicadelle. Seuls les pyrétrinoïdes restent et certaines molécules sont sur la liste à risque pour une réhomologation ces cinq prochaines années.
Le quatrième usage concerne le travail du sol. La filière a connu une forte restriction de l’usage du glyphosate qui pose des problèmes aujourd’hui. Il faut absolument maintenir le cadre actuel pour éviter des impasses sur des parcelles compliquées. D’autres herbicides de prélevée sont sur la liste, mais ils demandent de toute façon l’usage de glyphosate.
Qu’en est de l’oïdium ?
L’oïdium n’est pas considéré comme à étant à risque. Il existe une solution tant que le soufre est homologué en biocontrôle.
Maintenant il faut définir un plan d’action. En septembre nous aurons de nouvelles réunions pour éviter des impasses techniques.