e terroir charentais a une particularité : les lettres de corbeaux. Égayant ponctuellement les débats vignerons, ces missives anonymes prennent souvent à partie les orientations et décisions des instances charentais. Dernier exemple en date, celle envoyée à Éric Billhouet, le président de l'Organisme de défense et de gestion (ODG) par « un viticulteur fier de l'être et qui a honte d'être représenté par vous ».
Circulant depuis plusieurs semaines dans le vignoble charentais, cette missive réagit, vertement, à un article récent de « La Charente Libre traitant du désherbage chimique [où] vous appeliez à la dénonciation de vos collègues viticulteurs pour le non-respect du cahier des charges AOC Cognac, ce qui nous ramène au temps des gestapistes et des vichistes ». Faisant référence à la création d’une adresse mail au sein de l’interprofession pour être informé de parcelles trop désherbées (pour ne pas dire orange), l’auteur anonyme d’enchaîner « que vous incitez à la dénonciation calomnieuse qui est certainement punie par la loi » et de préciser que « vous prétendez que des largeurs maximales de désherbage doivent être appliquées. Cela est totalement faux puisqu'elles n'apparaissent pas dans le cahier des charges. »
En effet, le cahier des charges de l’AOC Cognac impose depuis 2020 que « le désherbage chimique total des parcelles est interdit. Sur tous les inter-rangs, la maîtrise de la végétation, semée ou spontanée, est assurée par des moyens mécaniques ou physiques. Le désherbage chimique des tournières est interdit. » Mais un projet d’évolution du cahier des charges souhaite limiter au tiers de l’écartement la bande désherbée explique à Vitisphere Éric Billhouet, qui porte la proposition auprès de l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO). En attendant, l’ODG promeut les bonnes pratiques de gestion des sols pour réduire le désherbage en sollicitant les remontées de terrain pour informer les viticulteurs et les aider à adopter de nouvelles pratiques. « Des contrôleurs spécialisés ont été mis en place, nous avons une task-force qui peut former et informer. Mais il est rare de voir des vignes orange » pointe Éric Billhouet.


« 98 % vignerons sont déjà dans les clous de la limitation du désherbage sous le rang. Il y a quelques cas où la bande un peu large, mais ça a énormément bougé. Les paysages ont beaucoup changé » abonde Anthony Brun, le président de l’Union Générale des Viticulteurs pour l'AOC Cognac (UGVC), qui confirme que la proposition d’accompagnement a été confondue avec de la délation par incompréhension.