ace aux vignerons présents le 27 avril à l’assemblée générale du syndicat des Vignerons de l’Aude, Jérôme Despey a apporté des réponses, chiffrées mais restant à valider, sur la mesure de distillation, pendant que certains participants le haranguaient d’un « parle-nous ! » pour lâcher des informations sur ce point brûlant. En contact direct avec les services du ministère de l’Agriculture, qui l’avaient jusque-là invité à rester discret sur le sujet, le président du conseil spécialisé vins de FranceAgriMer (FAM) et 1er vice-président de la FNSEA a enfin pu donner du grain à moudre à une assistance impatiente. « Nous devons encore rester prudents, car les prix de rémunération des vins qui seront distillés restent sous réserve de validation par la Commission Européenne. 3 niveaux de prix ont été arbitrés par le ministre de l’Agriculture : 75€/hl pour les AOC, 65€/hl pour les IGP et 45€/hl pour les vins sans IG. C’est sur la table de la Commission, qui doit trancher avant de que le ministère puisse procéder à des annonces officielles », a déroulé Jérôme Despey.
Pour l’heure pourvue de 160 millions € (M€) pour 3 millions hl à distiller en France, la somme globale attend encore l'éventuelle rallonge de 40M€ en provenance du fonds de crise européen. « Nous souhaitons avancer vite pour ouvrir les souscriptions dès la mi-mai et procéder à la 1ère phase de livraison des vins à distiller dès le 10 septembre, puis la 2nde phase à partir d’octobre, une fois la prochaine campagne démarrée », poursuit le président du conseil spécialisé vins FAM. Les 160 M€ doivent en effet être obligatoirement ventilés sur deux campagnes successives de 80 M€ chacune.
Depuis des semaines, la discussion de ces prix a été sujette à d’âpres négociations et Jérôme Despey ne cache pas que « le combat a été rude ces dernières semaines pour atteindre un prix maximum, et privilégier celui-ci par rapport aux volumes à distiller, et ne pas voir ensuite les metteurs en marché s’aligner sur ces bas prix pour la prochaine campagne ». La règle communautaire ne permet cependant pas que les prix de distillation atteignent les prix du marché. « Sur la base des contrats et cotations enregistrés par FranceAgriMer, nous avons du nous battre pour ces niveaux de prix. Et le combat n’a pas été de tout repos pour les vins sans IG, où la contractualisation de 40 000hl à 31€/hl, dans les bassins Centre-Val de Loire et Rhône-Provence est venue montrer quel peut être le niveau de prédation du marché dans ce contexte de crise », assène Jérome Despey. Grévant fortement les capacités de négociations des prix de distillation des vins sans IG, décisions a été prise par les responsables de filière « de sortir les bassins Centre-Val de Loire et Rhône-Provence des critères de distillation de la tranche des vins sans IG, et éviter d’embarquer tout le monde vers des prix qui auraient été établis à 25€/hl sur cette base », décrypte-t-il.
Comme en 2021, le président du syndicat des Vignerons de l’Aude Frédéric Rouanet aurait préféré une décomposition de ces prix de distillation en deux segments, vins sans IG et IGP/AOP. Présent également à l’assemblée générale, le président des Vignerons indépendants de France Jean-Marie Fabre précise en retour que cette répartition était la seule qui permettait de maintenir une valorisation supérieure des AOC, « sinon ceux-ci se seraient retrouvés à 65€/hl avec les IGP si on n’avait gardé que deux tranches de rémunération, alors que le contexte de marché est différent de celui de 2021 ». Conscients des impacts de cette distillation sur les prix du marché de la prochaine campagne Jérôme Despey, Jean-Marie Fabre et Frédéric Rouanet insistent sur la nécessité de pénalités si les engagements de distillation ne sont pas respectés par les caves entre les deux phases de mise en œuvre. « Si une cave s’engage à distiller 10 000 hl répartis sur les deux campagnes, elle sera pénalisée si elle fait finalement machine arrière sur une partie du volume parce qu’un opérateur viendrait lui proposer un prix supérieur au prix de distillation. Non seulement cela tirerait vers le bas les prix de la prochaine campagne, mais pénaliserait également, en cas de réfaction, ceux qui auraient joué le jeu », précise Jean-Marie Fabre, « sauf, d’ici là aléa climatique majeur et reconnu », termine-t-il.