ix ans de travaux portant sur 18 000 ha, quelque 15 000 sondages à la tarière et mille fosses creusées jusqu’à 2 m de profondeur… La colossale étude menée entre 2008 et 2018 par le bureau d’études Sigales avait révélé l’extraordinaire diversité des sols du vignoble beaujolais : plus de 300 types différents, valant au Beaujolais de décrocher le label Geopark mondial Unesco.
Ce travail a été mis en avant par Inter Beaujolais à travers un documentaire d’une vingtaine de minutes en 2022, et désormais à travers douze vidéos courtes diffusées sur les réseaux sociaux au cours du premier semestre 2023. Douze, comme le nombre d’appellations que compte le vignoble beaujolais. Car « on arrive très bien à distinguer les personnalités entre différentes appellations et entre les dix crus », note Isabelle Letessier, pédologue-agronome au sein du bureau d’études Sigales.
De Chiroubles, au sol 100 % granitique, à Juliénas, dont le sol ne comporte que 17 % de cette roche, en passant par les pierres bleues des Côtes de Brouilly et toutes les nuances de Saint Amour, chaque cru voit son portrait géologique dressé en une courte vidéo. Les beaujolais du Sud ne sont pas en reste et leur grande diversité fut l’un des enseignements de l’étude Sigales. « Les sols calcaires ne représentent qu’un quart environ des sols des beaujolais, et pas du tout une majorité comme on le pense parfois », souligne Isabelle Letessier, notant la présence de sols « vraiment granitiques » ainsi que de pierres bleues d’origine volcanique très ancienne.
« Dans les beaujolais, on va trouver quasiment tous les types de sols qu’on trouve dans le vignoble, et même certains qu’on ne trouve pas dans les crus », abonde Nicolas Besset. Quant aux beaujolais villages, loin de se résumer à des sols pentus et riches en pierres bleues, ils comptent autant de terroirs différents que de villages, soit trente-huit. Ce qui donne à chacun une « signature géologique », explique l’expert dans le documentaire.
Même si l’étude s’est achevée il y a plus de quatre ans, « elle nous donne du travail pour une vingtaine d’années au moins car nous n’avons pas fini d’en exploiter tous les éléments, assure aujourd’hui Nicolas Besset, conseiller viticulture-oenologie à la chambre d’agriculture du Rhône. La connaissance quasi-parcellaire de la géologie et la pédologie des sols permet d’adapter la conduite de la vigne : depuis le choix des porte-greffe, voire des cépages, jusqu’à l’enherbement qui pourra être supporté par le sol, en passant par la fertilisation. On sait par exemple que les pierres bleues sont des mines de magnésium, que le granite est très riche en potassium, ce qui élimine le risque de carences en ces minéraux. Cette connaissance peut aussi guider la vinification : on ira chercher plus de puissance dans les argiles et les roches sombres. »
L’autre intérêt est commercial : « Vignerons et négociants sont confortés dans leur discours, reprend Nicolas Besset. Ils savent mieux parler du beaujolais, montrent qu’ils ont une connaissance fine de leurs terroirs. »
Lien vers les vidéos : https://www.youtube.com/playlist?list=PLYMw8F9YauFOy7yUj-cI8oUTnUfJQg1Zu