n passant du statut de directive à celui de règlement, le cadre européen sur l'Utilisation Durable des Pesticides (SUR) inquiète particulièrement le vignoble communautaire : si la volonté de réduction des phytos est partagée entre la Commission Européenne et la filière vin, Bruxelles vise depuis l’an dernier une diminution rapide, de -50 % d’ici 2030, qui impose des restrictions d’usage sans assurance d’alternatives ou d’accompagnements, à proximité de zones sensibles et même au sein des parcelles agricoles. De quoi inquiéter dans le vignoble alors que le Conseil des ministres demande fin 2022 de prendre le temps d’études d’impact mais que la commission environnementale du parlement européen (Comenvi) souhaite non seulement avancer rapidement, mais aller plus loin que les propositions de la Commission Européenne.
Dans ses propositions rendues mi-mars, la rapporteuse de la Comenvi, l’eurodéputée germano-autrichienne Sarah Wiener (Les Verts, Autriche) propose ainsi « une réduction de 80 % des produits phytosanitaires "les plus dangereux" d'ici la fin de la décennie. Elle a en outre introduit un objectif de réduction intermédiaire jusqu'en 2026 afin de resserrer le calendrier de diminution des doses » et prône l’« 'interdiction totale des produits phytosanitaires » dans de larges zones sensibles s’inquiète Christian Schwörer, le secrétaire général de l’Association Allemande des Vignerons (Deutscher-Weinbauverband). Dans son édito « ce n’est pas acceptable », l'avocat note que « ce n'est qu'en unissant nos forces que nous parviendrons à empêcher ces réglementations en matière de protection phytosanitaire, qui rendraient de facto impossible l'exploitation de nombreux vignobles ».
Réponse bruxelloise
Dans une lettre au Conseil datée de la fin mars, le commissaire aux relations interinstitutionnelles Maro? ?efčovič acte pour sa part la demande d’étude d’impact, mais en réduisant la portée des documents complémentaires qui pourront être fournis car « la Commission n'est pas en mesure d'effectuer une étude avec une analyse détaillée distincte pour chacun des 27 États membres ». Sollicitée, la Commission Européenne indique que l’étude d’impact reposera « sur la base des preuves et des données disponibles dès qu'elles seront disponibles au cours du printemps 2023, et en tout état de cause avant la date limite du 28 juin demandée par le Conseil ». Bruxelels ajoute que « la nécessité d'agir sur les pesticides est claire pour tous. Tout échec à réduire l'utilisation et les risques des pesticides aujourd'hui aura des effets à long terme et potentiellement irréversibles sur notre sécurité alimentaire à l'avenir ». Si la Commission précise avoir « entendu les préoccupations des États membres concernant la proposition SUR », elle ajoute que « les citoyens européens souhaitent clairement réduire l'utilisation et les risques des pesticides. Ils ont exprimé cette demande dans de nombreux forums, dont la Conférence sur l'avenir de l'Europe et les initiatives citoyennes européennes. »
Entre vignoble et commission, il semble également qu’un dialogue de sourds s’instaure. « Nous sommes objectivement inquiets. Car la Commission ne veut plus attendre les études d'impact. Nous sommes dans un réel corner » explique à Vitisphere l’Assemblée des Régions Européennes Viticoles (Arev).