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Combien d'hectares de vignes sacrifiées sur l'autel d'un nouveau réglement européen ?
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ZNT élargies
Combien d'hectares de vignes sacrifiées sur l'autel d'un nouveau réglement européen ?

Dans un nouveau règlement phyto, la Commission Européenne envisage des interdictions de traitements phytos à sur 3 mètres de distance de sites sensibles (chemins, parcs...). Au Parlement Européen un rapport va plus loin encore, avec une interdiction de 10 à 50 mètres.
Par Alexandre Abellan Le 20 mars 2023
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Combien d'hectares de vignes sacrifiées sur l'autel d'un nouveau réglement européen ?
L'Europe planche sur des zones de non-traitement élargies aux chemins vignerons, jardins publics... - crédit photo : Cédric Faimali (NGPA)
Q

ui protégera les vignobles de la poussée de fièvre réglementaire européenne ? En cours de négociation, le nouveau règlement européen « concernant une utilisation des produits phytopharmaceutiques compatible avec le développement durable » doit remplacer la directive 2009/128/CE « pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable » (directive SUD, pour Sustainable Use of Pesticides) et pourrait conduire en l’état à l’interdiction de traiter des milliers d’hectares du vignoble. Le concept français de Zone de Non-Traitement (ZNT) serait ainsi étendu aux abords de toute « zone sensible », définie de manière extensive dans la proposition de la Commission Européenne comme étant « une zone utilisée par le grand public, telle qu’un parc ou jardin public, un terrain de jeu ou de sport, ou un sentier public ; une zone utilisée principalement par un groupe vulnérable [NDLA : femmes enceintes et femmes allaitantes, enfants à naître, nourrissons et enfants, personnes âgées, travailleurs et habitants fortement exposés aux pesticides sur le long terme], un établissement humain (communauté où vivent et travaillent des personnes), une zone urbaine traversée par un cours d’eau ou dotée d’un ouvrage hydraulique, une zone écologiquement sensible »

Actuellement, le projet réglementaire propose une zone tampon de trois mètres entourant la zone sensible, avec interdiction de traitement. Si la Commission a depuis proposé de nouvelles possibilités de dérogation, notamment pour les produits utilisables en agriculture biologique, une ZNT systématique de 3 m autour de toute zone publique pourrait concerner des surfaces considérables de vignes. Incertain, ce cadre laisse crainde une exposition accrue aux risques sanitaires à des parcelles entières. Sans produits alternatifs ni investissements dans de nouveaux matériels, cette évolution aux airs de révolution pourrait condamner rendements et pérennité économique. Et encore, c’est sans compter des propositions de ZNT à 10 ou 50 mètres quasiment sans traitement autorisé…

-50 % de phytos en 2030

Encore peu connu en dehors de Bruxelles, ce projet de règlement communautaire doit harmoniser les pratiques phytosanitaires au sein de l’Union Européenne en passant de la simple directive SUD (appliquée de manière incomplète d’après le bilan de Bruxelles) à un cadre obligatoire (commun aux 27 États membres). Cette dernière s’annonçant plus ferme et contraignante, afin d’atteindre l’objectif fixé en 2020 de réduire de 50 % l’utilisation de pesticides chimiques en 2030 : soit le pacte vert pour l’Europe (Green Deal). Dévoilée en juin 2022, la première position de règlement de la Commission Européenne a alimenté de vifs débats depuis. Jugeant trop rapides les obligations de réduction de l’usage des phytos (mise en place de ZNT élargies, mais aussi définition du biocontrôle sans soufre ni cuivre, obligations de tenue d’un registre de protection intégrée et d’un registre de matériel de traitement*…), le conseil des ministres européens bloque toute discussion depuis décembre 2022. Du moins tant qu’une étude d’impact n’est pas fournie par la Commission. Au Parlement européen, les discussions se poursuivent au sein de commissions : celle de l’environnement (Envi, étant désignée avec une compétence principale sur le sujet) et celle de l’agriculture (Agri, avec une compétence partagée).

Alors que le Parlement européen doit se positionner en séance plénière sur le projet de règlement en octobre prochain, les commissions Agri et Envi doivent donner leurs avis respectifs en juillet et septembre. Si la rapporteure de la commission Agri, Clara Aguilera (Parti socialiste ouvrier espagnol) semble prendre son temps, l’étude d’impact manquant toujours, celle de la commission Envi, Sarah Wiener (les Verts allemands) paraît plus pressée, ayant déjà publié un projet de rapport en février dernier. Dans ce prérapport, l’eurodéputée estime qu’« en ce qui concerne les zones tampons, la distance suggérée de 3 m par rapport aux aires protégées n’est pas suffisante. Elle est même trop étroite pour empêcher les pesticides de pénétrer dans les aires protégées par dérive de pulvérisation lors de leur application. La science suggère que les zones tampons efficaces doivent avoir une largeur de plusieurs centaines de mètres pour empêcher l’entrée des pesticides. »

Dérogations au cas par cas

Et de proposer une distance tampon de 10 mètres en général, et de 50 mètres en particulier « pour les zones sensibles utilisées par des groupes vulnérables et pour l’utilisation des pesticides les plus dangereux ». De quoi remettre en cause le modèle de culture de milliers d’hectares de vignes en zones urbaines, avec la proximité de riverains, mais aussi en territoire rural, un sentier suffisant théoriquement. Limitant la possibilité de déroger à cette interdiction aux seuls traitements autorisés en bio, la rapporteur indique encore que « les dérogations à l’interdiction ne devraient être accordées que pour […] permettre une poursuite des activités agricoles existantes ou dans certaines conditions et au cas par cas ».

Pouvant avoir d’énormes conséquences sur l’économie et la physionomie du vignoble, ce règlement ne peut qu’interpeller et mobiliser la filière vin pour éviter un emballement menaçant des milliers d'hectares. Si ses stratégies nationales et locales s’inscrivent depuis des années dans un démarche de réduction progressive des intrants viticoles, l’objectif de sortie pure et simple des phytos est une aspiration partagée, pour ne pas dire consensuelle, dans le vignoble, mais reste inenvisageable sans perte ni fracas si une logique quantitative de court-terme l'emporte sur une transition agroécologique coconstruite, avec des alternatives tout-terrain et de moyens d'investissements adaptés à une culture pérenne**. En l’état de son projet, l’objectif de réduction accélérée des phytos pourrait conduire à une forte déprise viticole : les contraintes techniques et économiques évoquées précédemment pouvant amener des milliers de vignerons à jeter l’éponge. Qui protégera les vignobles des évolutions réglementaires européennes ?

 

* : À noter cependant dans la liste des nouvelles obligations administratives une déclaration de soutien à l’agriculture de précision. Si la Commission est prudente sur l’autorisation des traitements phytos par drones, le pré-rapport de la commission Envie souhaite clairement les interdire, comme tout traitement aérien.

 

** : Reconnaissant le besoin de moyens conséquents pour réaliser son projet, la rapporteur Sarah Wiener « propose de créer un fonds d’État qui pourrait, entre autres, être approvisionné par la taxation des pesticides. Une taxe sur les pesticides fondée sur le risque servirait l’objectif du présent règlement de deux manières : d’une part, elle entraînerait automatiquement une réduction de l’utilisation des pesticides, comme le montre l’exemple du Danemark, et d’autre part, elle fournirait des fonds pour la mise en œuvre du règlement et offrirait la possibilité d’indemniser les agriculteurs. »

 

 

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Tous les commentaires (16)
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VignerondeRions Le 24 mars 2023 à 12:47:13
Assez consternant de voir de telles aberrations prendre le pas sur le bon sens. Reculer de 50 m partout n'est qu'un début. Revenir à l'agriculture d'antant comme nous l'entendons partout n'est pas réaliste, si ce n'est à sacrifier les 3/4 de l'humanité. Ou alors on va develloper des usines qui fabriqueront des aliments à partir de cellules souches ou autres innovations... Plus d'animaux, plus de champs, plus de vignes. Le rêve en somme
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Renaud Le 21 mars 2023 à 19:23:46
Et pourquoi pas interdire les véhicules thermiques près des écoles ou même des routes car il y a sûrement des piétons ou riverains?.. On fait toujours de plus en plus de réserves d?indiens mais pour les réserves pas pour les indiens. Comme disait Audiard : «  les Cons ça ose tout, c?est même à ça qu?on les reconnaît ».
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Renaud Le 20 mars 2023 à 14:27:43
Et pourquoi pas interdire les véhicules thermiques près des écoles ou même des routes car il y a sûrement des piétons ou riverains?.. On fait toujours de plus en plus de réserves d?indiens mais pour les réserves pas pour les indiens. Comme disait Audiard : «  les Cons ça ose tout, c?est même à ça qu?on les reconnaît ».
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Billy le Bordelais Le 20 mars 2023 à 13:50:32
Il serait plus intelligent de savoir quels sont les phytos indispensables, que de sacrifier l'ensemble de l'agriculture sur l'incompétence de la classe politique.
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Chelmi Le 20 mars 2023 à 13:34:56
On peut faire comme en Allemagne et en Alsace; accès aux chemins interdits au public ! Sinon continuons et développons les produits importés.
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Vivre Le 20 mars 2023 à 12:01:24
Produire, produire, produire... à n'importe quel prix,avec toutes les conséquences dramatiques pour l'environnement, la santé de tous,. Oh! Agriculteurs qui voulez continuer de ruiner la nature, les humains, à commencer par vous même, cessez d'accuser l'Europe, qui vous permet de vivre financièrement par toutes les aides, les ONG, qui critiquent à juste raison les BAYERN, MONSANTO et autres... et cessez de prétendre que vous ne pensez qu'au bien des autres que vous voudriez nourrir à tout prix Ok mais pas à n'importe quel prix.
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bourvil Le 20 mars 2023 à 11:06:04
Quel paradoxe (un de plus), lors de son marathon inaugural du salon de l'agriculture le président Macron(Roi d'Europe dans son imaginaire) priorisait devant les professionnels de la viticulture et les caméras du monde entier,la modération au détriment de l'éradication, nous sommes un mois plus tard!!!! une gifle supplémentaire........, cela se passe de commentaire.
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COCO69 Le 20 mars 2023 à 10:18:55
Tout est fait contre les français qui, de leur côté, veulent laver plus blanc que blanc. Serions-nous un peuple aveugle à ce point qu'il crée la corde pour se faire pendre ?
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Rol Le 20 mars 2023 à 08:46:55
Pas de doute; en 2050 on sera à moins 50 %de phytos et même beaucoup plus puisque TOUS les vignerons n?existeront plus.
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MG Le 20 mars 2023 à 08:35:36
Après le nucléaire, l'agriculture. Le déploiement de solution OGM (et pas seulement les obtentions variétales) sont la seule solution a moyens terme.
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Benji Le 20 mars 2023 à 08:01:19
On a vraiment pas l?impression que l?agriculture est necessaire pour nourrir les peuple! Le lobby écolo poussé par celui du bio bussiness emmène tout les producteurs dans le mur! Ces idéologies écolos et hygiénistes déphasés des réalités de productions et surtout économiques vont conduire à la destructions de toutes les agricultures européennes avec la France en leader! Combien d?élus ,de fonctionnaires et de militants écolos ont déjà produit quelques choses sur leurs bien privé pour nourrir la population ? Évidemment aucun!!! La gangrène de la France et de de l?Europe par les ong écolos est bien réelle après avoir détruit l?industrie française,fait explosé les coûts de l?energie(lobby antinucléaire mais pro éolien), militer pour la voiture électrique ( importation massive et délocalisation chinoise),c?est au tour de l?agriculture d?être détruite par ces lobbys sectaire! Quand à croire que seule le modèle bio (sans cuivre et sans soufre) peut nourrir la population européenne on se rend vraiment compte que ces personnes vivent dans un monde déconnecté des réalités !!! Il est temps d?enquêter sur ces lobbyistes et de voir l?impact économique sur nos productions,sur les emplois,sur le droit à la propriété et sur le PIB
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Francis Le 20 mars 2023 à 07:57:17
Oh mais quelle honte cette commission européenne qui emmerde les gentils viticulteur... Je vais dire ça a mon pote Gégé qui a failli crever d'un cancer...
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DARIUS Le 20 mars 2023 à 07:49:45
Pour Hubert Vedrines, l'ancien ministre des affaires étrangères de Mitterand, l'Europe croit que l'on vit dans un monde de bisounours alors que l'on est dans Jurassic parc. Encore une belle démonstration de la déconnection de l'Europe de la réalité en général et de celle des viticulteurs en particulier. Puisque l'on parle de déconstruction déconstruisons l'Europe nous n'en tirerons que du bien!
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BureaucrateA5000EuParMois Le 20 mars 2023 à 07:38:37
Donc d'un coté, il faut préserver les terres agricoles...... mais de l'autre les interdires sur 50m aux abords des chemin ??? Bref, des gros tarés. Il y a des chemins partout à la campagne.
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Brigitte Le 20 mars 2023 à 07:27:59
Ce qui est dommage c'est que la France ne soit pas capable prendre ce genre de décision sans l'UE! d'ailleurs cela ne sera pas appliqué et la France paiera des amendes. Nous sommes un pays de lâches.
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Caramail Le 20 mars 2023 à 06:36:50
Bof... foutu pour foutu... par devant, par derrière...
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