i gouverner, c’est prévoir, comment préparer l’avenir d’une filière quand les défis auxquels elle est confrontée sont aussi nombreux et variés que « les évolutions macroéconomiques, sociétales, climatiques, technologiques, la modification des débouchés ou les défis de transmission, de renouvellement variétal, digitalisation, pratiques œnologiques », interroge un communiqué de FranceAgriMer. Sous la direction des prospectives de FranceAgriMer et de l’institut agro de Montpellier, un groupe d’experts a construit ces 4 scénarios ‘Vignes et vins 2040’, dont les responsables de filière ont pris connaissance en ce début d’année.
« Ces 4 scénarios valorisent 20 ans de prospective, depuis celle publiée en 2003 par Inrae, puis suivie de différents exercices sur des secteurs de la filière : vin bio, coopératives, Anivin de France… Nous manquions toutefois jusque-là de scénarios globaux », décrit Françoise Brugière, responsable de la prospective chez FranceAgriMer. Ce travail de synthèse sur la globalité de la filière a été conduit depuis 2020, se nourrissant de 20 ans d’hypothèses et d’orientations « auxquelles il a fallu adjoindre de nouveaux paramètres qui ont depuis pris une importance essentielle : évolution climatique, e-commerce, poids de la grande distribution (GD) », énumère Françoise Brugière. Démarré avec un groupe de prospectivistes, ce travail s’est ensuite affiné en collaboration avec un regroupement de professionnels de la production, mais aussi des experts de la GD et du merchandising. Avant d’aboutir le 17 janvier dernier, à cette ultime journée de travail impliquant plusieurs dizaines de responsables de filière, « qui ont travaillé en petits groupes sur les différents scénarios, et en fin de journée, voter sur leur côté désirable ou repoussant et proposer des actions à mettre en œuvre pour faire advenir le meilleur futur… et empêcher le pire », valide Françoise Brugière.
Un 1er scénario, nommé ‘filière nomade pilotée par l’aval’, voit les vignobles migrer progressivement vers des zones climatiques plus favorables, avec des acteurs de l’aval qui pilotent la filière « pour répondre aux attentes des marchés internationaux et s’adapter aux nouvelles pratiques de consommation », déroule le communiqué de FranceAgriMer. Le 2ème scénario se place dans le contexte du marché intérieur français qui poursuit son déclin, rendant l’export totalement incontournable. Nommé ‘production innovante et vertueuse pour des vins d’exportation’, il met en avant l’amélioration de la productivité à la vigne et en cave et la connaissance fine des consommateurs.
Le 3ème scénario, ‘filière performante et vin plaisir’, table sur le contraire, « le vin pouvant reconquérir le marché intérieur grâce à la compétitivité permise par les biotechnologies et les assemblages internationaux », relate le communiqué. Ce scénario signale néanmoins des tensions entre régions concurrentes ou avec les « rurbains » voisins des vignobles. Lui aussi axé vers le marché intérieur, le dernier scénario valorise ce marché national grâce à « des vins affichant l’indication géographique, mais aussi des pratiques vertueuses pour l’environnement », valide le communiqué FranceAgriMer. Dans ce cas de figure, les producteurs, le négoce et une grande distribution rénovée s’accordent pour « résister à l’uniformisation des vins dans un univers agroalimentaire libéral », ajuste le communiqué.
Maintenant que ces 4 orientations sont consolidées, le travail du service de la prospective de FranceAgriMer va devoir mettre en lumière l’ensemble des points de consensus et de friction pour chacun des scénarios. « L’intérêt de ces scénarios repose sur le fait qu’ils incitent à l’action des acteurs de la filière. Ils ne sont pas la seule résultante de facteurs extérieurs, mais bien de l’attitude qu’adopteront ces acteurs en fonction de leurs objectifs. Les enjeux ne sont pas immédiats mais cela permet à la filière d’être proactive et en mesure de s’impliquer dans son avenir en anticipant l’évolution du contexte », termine Françoise Brugière.