’Agence nationale des impôts, à l’origine de la campagne, a lancé un concours pour encourager les jeunes à consommer davantage d’alcool. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître en 2022, l’idée est de freiner la chute des recettes fiscales, provoquée à la fois par le vieillissement de la population et l’évolution des habitudes de consommation liée au Covid-19. En réalité, pour les vins, cette contraction de la consommation est antérieure à la pandémie. Comme l’explique l’analyste britannique Wine Intelligence, « près de quatre millions de consommateurs ont quitté la catégorie vin entre 2018 et 2022, malgré une stabilité de la population adulte ». Le vieillissement constitue un facteur clé, de même que la montée en puissance d’autres boissons comme les prêtes-à-boire. Résultat global : selon le Japan Times, les recettes fiscales sur les boissons alcoolisées ont chuté d’environ 814 M€ en 2020, enregistrant le recul le plus important depuis 31 ans.
L’Agence nationale des impôts a donc décidé de solliciter des jeunes âgés de 20 à 39 ans – sans critère de nationalité – dans le cadre d’un concours intitulé « Sake Viva ! » (www.sakebiba.jp) pour qu’ils partagent leurs idées pour relancer les ventes de boissons alcoolisées. De nouveaux services et promotions, des suggestions portant sur les produits et leur conception et même des initiatives pour identifier le meilleur moyen de s’appuyer sur l’intelligence artificielle et le métaverse, toutes les idées sont les bienvenues. Les inscriptions seront clôturées le 9 septembre et l’agence a affirmé qu’elle soutiendrait le lancement de la proposition gagnante. Son enthousiasme n’est pourtant pas partagé par tout le monde. L’initiative a fait grand bruit, en Asie mais pas que, provoquant stupéfaction, indignation et critiques. Pour les impôts, il s’agit d’une promotion commerciale et non pas d’une incitation à consommer de manière excessive. Exprimant leur incrédulité sur les réseaux sociaux, de nombreux Japonais ont estimé au contraire qu’il s’agissait d’une vision purement pécuniaire à court terme qui ne tient pas compte des enjeux sanitaires. « Si les taxes sur l’alcool ont baissé, l’Etat devrait revoir le taux d’imposition », a affirmé un commentaire publié par le « Business Insider », tandis qu’un autre a établi un parallèle avec le tabac : « C’est comme si l’agence des impôts lançait une campagne pour encourager les jeunes à fumer à cause d’une baisse des recettes fiscales sur les cigarettes ! »
Quels que soient les avis, les perspectives du marché du vin au Japon ne sont pas pour autant négatives. Selon Wine Intelligence, les générations Z, Y et X constituent les groupes démographiques les plus impliqués dans le vin, leur esprit de découverte facilitant le développement des typologies alternatives comme les vins natures et les produits faiblement ou non alcoolisés. « Leur volonté de monter en gamme et d’expérimenter avec les vins va générer des opportunités pour la filière vin à l’avenir, notamment sur le plan des valeurs », estime l’analyste. Son optimisme est étayé par les projections de la plateforme Statista, qui évaluent à 12,54% la croissance annuelle composée du marché japonais du vin en valeur d’ici 2025. Les volumes ne sont pas en reste, l’agence estimant à 7,3% l’augmentation du segment du vin en 2023 pour un volume global de 341,6 millions de litres d’ici 2025.