évoilé ce 26 février en ouverture du salon de l’agriculture à Paris, le livre blanc des Vignerons Indépendants de France résume en quarante pages toutes les demandes de soutien des caves particulières à l’attention des candidats aux élections 2022 (présidentielles des 10 et 24 avril, législatives des 12 et 19 juin). Dans ce livre blanc, disponible en ligne, « nous souhaitons porter quatre thématiques prioritaires pour nos entreprises et le secteur : l’aide à l’emploi et à l’économie, le choc de simplification administrative, l’adaptation aux aléas climatiques et la diplomatie économique » résume Jean-Marie Fabre, le président des Vignerons Indépendants (voir encadré pour le détail des propositions).
« Le livre blanc est un outil à remettre aux candidats à la présidentielle sur le salon, ainsi qu’à leurs équipes de campagne. Il sera aussi utilisé par les fédérations départementales pour les élections législatives » résume Audrey Monségu, la responsable du pôle syndical Vignerons Indépendants. S’appuyant sur campagne d’interpellation de 6 500 panneaux d’affichage en France (« Présidentielles 2022 : qui mettra les vins d’artisans au programme ? ») et la publication d’une pleine page ce samedi dans le Parisien et le Figaro (« Qui s’engagera pour nous changer la vigne ? »). Entre l’élection présidentielle d’avril et les élections législatives de juin, « nous mettons à profit ce contexte particulier où il y a une écoute plus particulière des TPE (Très Petites Entreprises) que nous représentons » indique Audrey Monségu.


Au-delà de l’écoute, les caves particulières demandent une réaction politique forte. « Nous attendons de nouvelles postures des candidats : qu’ils soient conscients et fiers de nos plus-values pour l’économie, pour l’emploi, pour l’aménagement du territoire, pour l’environnement… » indique Jean-Marie Fabre, qui souligne que « tous les politiques s’accordent à s’enorgueillir de ce que représente notre métier, comme structurant civilisationnel, mais je trouve ça très réducteur. Notre secteur n’est pas seulement patrimonial, c’est un secteur économique stratégique dans la balance commerciale (l’un des derniers à avoir un excédent positif). »
Après la valse-hésitation de certains eurodéputés concernant le rapport européen contre le cancer, le vigneron de Fitou souhaite plus globalement que les candidats sortent de « l’ambiguïté du grand écart permanent » où des politiques n’osent pas soutenir clairement la filière des vins. Pour Jean-Marie Fabre, une nouvelle approche politique serait d’appliquer une politique de prévention contre les excès, tout en soutenant la consommation responsable. Soit une forme de cohérence politique indique le président des vignerons indépendants, tirant un parallèle avec la filière automobile, que l’État soutient tout en encadrant les excès avec le code de la Route.
Comme le rapporte le livre blanc, les vignerons indépendants « sont confrontés, comme beaucoup de TPE artisanales, à un mille-feuille de contraintes administratives inversement proportionnel à la taille de leurs structures, à des charges de plus en plus lourdes, freinant les investissements, le développement des activités de production et de vente, et décourageant la création d’emploi. Il est maintenant temps de donner à la viticulture française et aux Vignerons Indépendants les moyens d’atteindre pleinement leurs performances et ainsi les accompagner dans les différents enjeux auxquels ils doivent à l’avenir faire face ».
Sur le volet de « la consolidation des TPE pour l’économie et l’emploi des territoires », les priorités sont d’affirmer le soutien de la nation à la viticulture (« s’attaquer à toute forme de consommation, y compris faible, c’est nier le plaisir, le partage et la convivialité pourtant indissociables de notre mode de vie et que l’UNESCO a classé au patrimoine mondial de l’humanité »), baisser les charges (diminution des impôts de production comme une exonération de 50 % de la Taxe sur le foncier non bâti, TFNB, sanctuariser l’exonération sur l’emploi saisonnier, Travailleur Occasionnel/Demandeur d’Emploi ou TO/DE…), éviter les impasses dans les modifications culturales avec une approche progressive et scientifique (« chaque nouvelle règlementation doit être évaluée au préalable par rapport à son impact sur la viabilité économique des entreprises, notamment des TPE artisanales, et aux alternatives culturales qu’elles peuvent mettre en œuvre ») et faciliter la transmission (avec « une réelle politique d’exonération fiscale lors des transmissions en vue d’une installation » et notamment « l’exonération des droits de succession pour le foncier, avec engagement à exploiter pendant une durée minimale »).
Pour la thématique de « l’impérieuse simplification des démarches règlementaires », le livre blanc demande un choc de simplification (évoquant les aides européennes à l’investissement, « il est impérieux d’aller vers une simplification générale des mesures et des téléprocédures pour permettre aux TPE de continuer à en bénéficier et ainsi accroitre leur compétitivité et renforcer leur performance économique »), limiter la dématérialisation aux cas pertinents (« l’option de non-dématérialisation doit être maintenue dans le cas de la Capsule Représentative de Droits (CRD) ») et appliquer le droit à l’erreur administrative (notamment « lors des contrôles des différentes administrations encadrant l’activité, que ce soit la règlementation fiscale, douanière, viticole, sociale, ou liée à l’attribution des aides de la Politique Agricole Commune (PAC) »).
Concernant « l’accompagnement à la transition sur les enjeux environnementaux et climatiques », il s’agit de favoriser le bien-vivre ensemble entre vignerons et riverains (en prévoyant « dans tout projet d’aménagement et de nouvelles constructions, une zone de transition entre l’espace habité et l’espace agricole à la charge du constructeur ou aménageur, permettant ainsi de préserver le potentiel de production des zones agricoles pour les espaces restant à urbaniser » et compenser les pertes liées aux « actuelles zones de non traitement imposées par la loi »), valoriser les démarches vertueuses environnementalement et économiquement (avec des actions pour alimenter « l’appétence des consommateurs pour les produits issus de ces différentes certifications à leur juste niveau de valorisation, en lançant des campagnes de communication massives ») et créer des outils de gestion des risques climatiques (avec l’aboutissement de la nouvelle assurance multirisque climatique, la réforme du calcul de la moyenne olympique, déployer le principe de Volume Complémentaire Individuel, VCI, soutenir la Déduction pour Épargne de Précaution, DEP,…) et sécuriser l’usage de l’eau dans le vignoble (« pour faire de la gestion de la ressource en eau un axe majeur de la protection des populations, de la biodiversité et du maintien et du développement économique dans ces territoires »).
Concernant « l’affirmation et la consolidation du rôle de la viticulture sur la scène européenne et internationale », il s’agit de donner à la filière les moyens de conquérir de nouveaux marchés à l’export (« la diplomatie française et européenne doivent se positionner en véritable VRP du secteur vitivinicole à l’international [avec] l’intégration, dès que le déplacement présidentiel ou d’un membre du gouvernement s’y prête, d’un ambassadeur du secteur dans la délégation », la signature d’Accords de Libre-Échange favorables à la filière et la création d’un “fonds de solidarité” européen pour compenser les pertes lors de sanctions venant de conflits commerciaux extérieurs au vignoble), y compris pour les ventes directes sur le marché européen (« la règlementation fiscale européenne doit s’adapter plus rapidement aux évolutions du marché et de la société » avec le bond des ventes de vin en ligne) et soutenir le développement de l’œnotourisme (avec « un investissement poussé des pouvoirs publics à la structuration de l’offre, ainsi qu’à la promotion de l’œnotourisme en France et à l’étranger »).