ourse contre la montre. Présenté ce premier décembre en conseil des ministres, le projet de loi portant sur la réforme des assurances agricoles doit honorer une promesse présidentielle : faire adopter par les parlementaires un nouveau système assurantiel début 2022 pour qu’il soit opérationnel dès le début 2023. Dans le discours, « l’ambition est de refonder le régime en généralisant l’assurance récolte climatique et en créant un régime universel accessibles à tous les agriculteurs, là où le système actuel laisse sans réponse des pans entiers de l’agriculture française » pose-t-on au ministère de l’Agriculture, qui rappelle que des travaux sont menés sur la question assurantielle depuis 2019, avec une relance suite au rapport du député Frédéric Descrozailles et à ses propositions cet été (dans le cadre Varenne agricole de l’eau et du changement climatique). Cette réforme « ne change pas les paramètres, mais le modèle d’assurance des risques agricoles » renchérit-on au ministère de l’Économie.
Résultat des courses ce premier décembre, la dizaine d’articles du projet de loi dévoilé ce jour donne les grandes lignes d’une réforme structurelle, alors que les modalités de mise en œuvre restent encore à arbitrer, notamment pour le système d’assurance privée. Dans son architecture générale, l’outil rénové de gestion des risques climatiques se divise en trois niveaux inspirés du système espagnol Agroseguro. Jusqu’à un certain seuil de dégâts, constituant le plafond du premier étage, les pertes de récolte sont à la charge de l’agriculteur via la prévention (tour antigel, filet antigrêle…) et des dispositifs fiscaux (comme la DPE : Dotation pour Épargne de Précaution). À partir d’un niveau supérieur de pertes, le deuxième étage assurantiel prend le relai, avec une assurance multirisque climatique privée (mais subventionnée par l’État). Au-delà d’un dernier seuil de dégâts, le troisième étage prend le relai, sous la forme d’une solidarité nationale (qui prend le relai à partir de ce niveau plancher).
Ces trois seuils d’intervention sont encore à discuter indique-t-on à Bercy et rue de Varennes, ce qui n’est pas pour déplaire à la filière vin. Secrétaire général de la Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FNSEA), Jérôme Despey indique à l’occasion du salon Sitevi que cette possibilité de négociation par filière est plutôt rassurante, alors qu’il craignait que certaines propositions défavorables soient retenues. L’ayant voté cet été l’unanimité, le conseil d’administration de la FNSEA préconise pour sa part un déclenchement assurantiel à 20 % de pertes de récolte, pour une intervention de la solidarité nationale à partir de 50 % de dégâts rappelle Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA. Qui milite pour la création d’un pool d’assureurs pour « proposer un produit unique, accessible et proposé à tous les agriculteurs ». Cette proposition fait partie des modalités d’organisation du deuxième étage que l’exécutif n’a pas tranché, comme ce qui concerne l’idée d’un interlocuteur unique pour gérer les versements d’aides par les assurances et par la sécurité nationale.
Un arrêté et une ordonnance devront préciser ces éléments avant le premier janvier 2023 et l’entrée en vigueur de ce nouveau dispositif, mais après que le projet de loi soit voté par les parlementaires (avec une arrivée à l’Assemblée Nationale pour mi-janvier 2022). « Le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie s’engage à finaliser cette loi dans cette mandature. Il faut des décrets rapides pour que les assureurs envoient leurs appels à cotisation aux agriculteurs et que l’outil soit en vigueur dès 2023 » conclut Christiane Lambert. La course contre la montre se poursuit.